Il tient parole. Tous les jours durant mon séjour à l'hôpital, monsieur Yamazaki vint me rendre visite. Il restait parfois quelques minutes, parfois un peu plus longtemps. Il n'a pas réabordé le sujet de mon travail et je n'ose pas y faire allusion.
Assis sur mon lit, je rassemble tant bien que mal les maigres affaires que monsieur Yamazaki m'a apportées durant mon séjour. J'ai beau avoir deux côtes brisées, un poignet cassé et des hématomes de partout sans compter le coup de couteau qu'on m'a dit avoir reçu dans le ventre, je ne peux pas me permettre de louper mon travail. Je me retrouverais à la rue. Certains me diront que c'est de la folie, moi j'appelle cela de la nécessité. Je n'ai pas le choix.
Debout contre le mur en face de moi, les bras croisés, monsieur Yamazaki m'observe en silence avant de revenir à la charge :
- Tu ne peux pas retourner chez toi. Ou alors change d'appartement.
- J-je peux pas... Et pou-pourquoi j-je devrais pa-partir ?
Je suis las de cette conversation qui ne mène à rien.
- Cet homme sait où tu habites, et crois-moi, il reviendra te chercher...
Je soupire, tout semble être tellement simple pour lui.
- Je ne p-peux pas dé-déménager... J'ai p-pas les moyens.
Il me regarde avec étonnement. On appartient vraiment à deux mondes différents. Il ne dit rien et pendant un instant j'ai cru qu'il avait abandonné la lutte. Cependant, il reprend avec hésitation :
- Tes parents ne peuvent pas t'héberger ?
- Mes pa-parents ?
J'esquisse un rire jaune mais je ne réponds pas. Du coin de l'œil, je le vois s'approcher et malgré moi, je ne peux retenir un sursaut tandis que je recule précipitamment de quelque pas, afin de garder entre nous une distance que je juge raisonnable. Je le vois hésiter un instant, visiblement surpris de ma réaction :
- Plus de mensonges ! Si tu m'as menti sur autre chose que ton âge, c'est le moment de me le dire. Je n'aimerais pas faire d'autres découvertes inattendues comme celle-ci. Sais-tu dans quel embarras tu m'as mis ?
Malgré moi, je sens les larmes inonder mes yeux et cascader sur mes joues. Décidément, mis à part causer du tort autour de moi, je ne suis bon à rien...
- J-je suis dé-désolé...
Noyé dans mes larmes, c'est à peine si je le vois me contourner pour aller se servir un verre d'eau. Verre d'eau qu'il me tend dans un soupir.
- Gwendal, m'appelle-t-il lorsqu'il s'aperçoit que je ne réagis pas.
Timidement, je m'empare du verre et avale une gorgée d'eau avant de le reposer. Je sens le regard de monsieur Yamazaki posé sur moi, mais je suis incapable de le décrypter. Il semble profondément troublé. Tout à coup, il m'attrape brusquement le menton et me relève la tête. Quant à moi, je détourne le regard et tente de me soustraire à son étreinte, sans succès, cependant.
Il m'observe un moment puis demande d'une voix dure :
- Gwendal, c'est ton vrai prénom ?
Incapable de prononcer le moindre mot je me contente de secouer la tête. Le cœur battant à tout rompre, j'attrape mon portefeuille – qu'il m'a ramené en même temps que mes affaires de rechange – et lui tend ma carte d'identité. Si seulement le sol pouvait s'ouvrir sous mes pieds et me faire disparaître...
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Comment j'ai rencontré un ange.... [auto-édition]
RomanceLe journal intime d'un jeune homme à qui la vie décide de sourire après des années à vivre dans le noir... Voici un avant goût de l'histoire sur laquelle je suis actuellement en train de travailler :) En espérant que ce court extrait vous donne env...