II

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오늘은 가지 마

Peut-être ne devrais-je pas ouvrir. Parce que je sais que c'est toi, que tu es la seule à savoir où je me trouve, que sur le papier je te haïs et que c'est réciproque. Parce que tout le monde m'aurait certainement déconseillé de le faire.

Mais puisque plus personne n'est là pour m'en empêcher, je me lève, m'arrache à mes draps qui semblent s'accrocher à ma peau tels des ventouses. Les doigts sur le verrou de la porte, j'hésite. Ma main tremble, mais ma paume moite se pose sur la poignée.

Lorsque j'ouvre, tu es là. Comme je t'imaginais. Droite comme un i ; ta veste de cuir sur le dos, celle qui te donne un air hargneux ; les cheveux ébouriffés par une course que ta posture militaire ne trahit pas ; les joues rosées ; tes yeux scintillants. Ces prunelles brunes parsemées d'éclats d'or et de cuivre que je ne pensais plus croiser.

« Je peux entrer ? »

Ta voix rauque me tire de mes pensées et je m'efface du pas de la porte afin de t'ouvrir la voie. Tu t'engouffres dans ma chambre d'hôtel, miteuse mais assez spacieuse. Avec cette avidité curieuse que je te connaissais, tu scrutes, inspectes le moindre recoin sans bouger d'un iota, plantée au milieu de la pièce. Sur ce tapis certainement rongé par les mites, dont je n'ose pas même imaginer l'existence, tu pourrais rester longtemps cloitrée dans ton mutisme, si je ne tentais pas une tentative d'approche.

« Pourquoi tu es venue ? »

Approche certes plus agressive que je ne l'aurais souhaitée, mais tu m'as arrachée d'une torpeur angoissée de laquelle j'ai encore du mal à m'extirper et les quelques repères qui me restaient en ressortent brouillés.

« Fallait que je te vois.

— Pour quelles raisons ?

— Je sais pas. »

Sur la défensive, car cela fait plusieurs mois que tu n'as donné signe de vie et que tu débarques ici à l'improviste, je fronce les sourcils. Je recule un peu et me laisse choir sur mon matelas. (J'aurais eu du mal à appeler un tel meuble un lit. Cela ressemblait seulement à un sommier sommaire surmonté d'un matelas si fin qu'il n'en mérite pas même le nom. Je me demande comment j'ai fait pour dormir toutes ces semaines sur cette chose.)

« J'avais besoin de te voir. »

LullabyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant