PARTIE 6: Retombée.

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  Le vague. Je me perds. Je me tue. Je cherche, chemin, route, présence, Alexi. Son visage apparaît sur le vide dans lequel je nage depuis...depuis...Ses traits fins s'imposent à moi, son regard me transperçe comme si nous étions face à face, sa bouche délicate, son nez rougis par le soleil alpin, ses cheveux dorés...

Vite la Voix, sauve-moi: je veux pas le voir...

Débrouille-toi, rétorqua celle-ci.

Non...pas lui...Je hurlai. Mais...n'étais-je pas morte? Je criai derechef. À ce moment, je me rendis compte que cela ne produisait aucun son, même infime. Que se passait-il? Soudain, une vague de noirceur me submergea, et m'emporta dans une tropeur profonde.

   Mes paupières s'ouvrirent toutes seules. Ce fut comme un flash qui m'aveugla alors. La lumière éclatante me fit réprimer un sursaut.

-Laura! s'écria une Voix.

Qu'est-ce que ma mère faisait en enfer?  Ne me dites pas que...

- Je ne suis pas morte.

- Non mon bébé, oh ma chérie! Mais pourquoi tu as fait ça? Oh mon ange, ma...

Je ne répondis même pas, et n'écoutai pas plus. Je tirai sur moi le drap blanc reconnaissable entre mille de l'hôpital.

- Laura? Mon ange arrêt...

- Ta gueule! je hurlai à plein poumon, terriblement agacé.

Hésitation éphémère

Et puis que dire à ma mère?

Partir avant d'en finir?

Ou rester dans ce monde

Cruel, absurde et immonde?

Fuir ou encore survivre

Opressée, bien malheureuse

Soudain, la porte s'ouvrit en fracas.

- Laura!

Alexi vennait de pénétrer, probablement en tout illégalité, dans la chambre exigüe. Dans ma chambre exigüe.

Il sauta sur le lit et m'étreignit de toutes ses forces.

- Non mais ça va pas, toi! Lâche-moi!

Il me fixa, surpris, ensuite il recula et s'assit sagement sur le bord du lit.

- Pars, sifflai-je.

- Laura...mon poussin, laisse-le rester, commença ma mère, après tout c'est grâce à lui que tu...

- Non m'man! c'est à cause de lui. Tu comprends pas, je suis horriblement malheureuse. J'en peux plus, j'ai supporté toutes vos emmerdes, toutes les miennes, tout...tout! Chaque soir, avant de dormir, je passais des heures à veiller le regard mort. Tu sais pourquoi? parce que j'ai une voix dans ma tête. Parce qu'elle me hurle dessus. Parce qu'elle m'empêche de dormir. Tu sais pourquoi je mets toujours de la musique? Parce que je ne veux pas l'entendre. Parce que...parce qu'elle me fait peur! Elle me torture! Maman, j'ai mal! Horriblement mal. Je ne veux pas d'aide, je veux mourir. Laisse-moi partir.

Quelques secondes d'un silence abasourdi s'écoulèrent avant que je réalise l'ampleur de mes dires. Je plaquai alors la main sur ma bouche, devant l'air ébahi de ma mère et d'Alexi. Les larmes brulantes débordèrent de mes paupières.

Non dits

Trop dits

J'ai mal

Je souffre

C'est votre faute

Je me précipitai dans le couloir, bousculai les infirmièrs, les patients, les médecins, je fonçai à travers tout l'hôpital. "Sortie". Je reçus ce mot à la figure comme une gifle et bifurquai dans la direction indiquée. Derrière moi, cris catastrophés, bruits de course et alarmes se déchainèrent. Une main se posa sur mon épaule, une brève rotation de la tête m'apprit que c'était encore lui. Je me dégageai et...vis le panneau sur le mur. Quatrième étage. Et la fenêtre un peu plus loin. Ça suffirait peut-être...

La mort peut être la solution, parfois.

Il n'est pas toujours trop tardOù les histoires vivent. Découvrez maintenant