Chapitre 6

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- Alors ? Vous avez choisi ? me demande, agacé, un gigantesque homme à la voix ( trop ) grave.

Je me fiche bien de ce que je vais avaler, je veux juste parler à Réda !

L'homme devient de plus en plus agacé. Ses cheveux noirs huileux, son visage flasque, sa cicatrice sur son front et sa moumoute de poils noirs sortant de sa salopette rouge réglementaire à l'uniforme du café ne lui donnent pas l'air plus sympathique. C'est sans compter sa grosse moustache qui frémit de plus en plus, ses yeux incroyablement plissés, ses sourcils épais et sa taille impressionnante.
Mais qu'est-que fait un homme pareil à travailler comme serveur dans un café ?

- Alors ? répète-il en haussant le ton. Vous avez choisi ?

À chaque mot, il semble de plus en plus énervé.
Afin d'éviter l'arrivée précoce d'un tremblement de terre, je me presse de prendre la première chose sur le menu.

- Pasratcel de Wdiotfux, spécialité du chef, s'il vous plait.

Je n'ai aucune idée de ce que c'est, et encore moins de sa prononciation.

L'homme mime un petit fou rire.

- Une pastarsselle de Wiodfux et un café gourmand, ça marche.

Puis le serveur repartit, me laissant ( enfin ) seule avec Réda.

- Alors Tasha... Qu'est-ce que tu voulais me dire ?

- Eh bien... Tu vois, c'est assez compliqué à expliquer...

- J'ai tout mon temps, répond Réda pour me rassurer.

Je lui décoche un petit sourire hésitant avant de continuer :

- Il y a environ six mois, ma famille a été accusée d'un crime horrible, dont j'ignore complètement les faits.
Une journée, la police est venue jusqu'à nous, jusqu'à notre maison ! Elle a cassé la porte afin d'y pénétrer...
Mon père a tenté de s'expliquer avec l'officier en chef, pendant que ma mère nous faisait passer par la porte de derrière.
La police a emmené mes parents et ils sont actuellement sous les barreaux, sans jugement !
Mon petit frère a été trouvé par la police mais je ne sais pas ce qu'il est devenu. Il est mineur, donc il ne risque rien pour l'instant.
Pour l'instant.

Je suis interrompue par le serveur qui arrive avec deux plateaux. Dans l'un des plateaux se trouve le café gourmand de Réda. Et dans l'autre....
Dans l'autre se trouve ma " collation ", la spécialité du chef au nom imprononçable.

Mon dieu ! J'aurais vraiment dû me renseigner avant de commander ! C'est une sorte de bouillasse d'haricots, de lentilles, des saucissons reconstitués, de ketchup et de beurre. De beaucoup, beaucoup de beurre. La " chose " flottait dans une gigantesque flasque d'huile.
Je suis absolument dégoûtée, mais je décide de continuer mon récit :

- Aujourd'hui, ma famille est détruite, anéantie par des accusations et des propos faux.
Je sais que j'ai raison, qu'il y a un corbeau dans le champ de blé, une conspiration.
Je veux sauver ma famille, la délivrer de ce cauchemar !
Mais je ne peux pas le faire seule, j'ai besoin de ton aide...

Es-tu avec moi ?

Ce que je ne lui ai pas dit en revanche, c'est que j'ai surtout besoin d'aide pour me faire pardonner.
Car je suis fautive.

CLANDESTINE Où les histoires vivent. Découvrez maintenant