Le chateau de la renaissance

                                                                                    Ce château.
D'aussi loin qu'elle s'en rappelle, elle l'a toujours vu sur son poignet. Depuis tout petite, elle passe son doigt sur le fin trait noir légèrement en relief. Lors de son enfance, ses parents disaient qu'elle était la princesse de ce château et qu'elle aurait peut-être, un jour, la chance de s'y rendre. Ils lui décrivaient ses murs en pierre, ses escaliers monumentaux, ses larges fenêtres et ses salles immenses. Et elle, si petite qu'elle était, elle s'imaginait parcourir les couloirs de l'édifice et s'assoir sur son trône imposant.

     Mais peu à peu, ses rêves d'enfants s'étaient évaporés pour laisser place aux pensées d'une adolescente. Elle voyait maintenant les regards insistants, menaçants ou interrogatifs dirigés vers son poignet. Elle sentait qu'un tatouage n'avait rien à faire sur le corps d'une personne si jeune. Ses parents se rendaient compte qu'elle comprenait que ce n'était pas normal. Elle se posait de plus en plus de questions sur ce mystérieux château et sur les chiffres inscrits sur sa peau pâle.

    Un jour elle se plaça en face d'eux et elle attendit patiemment les réponses à ses questions silencieuses. Ils lui expliquèrent que ce château était son but ultime et qu'elle allait devoir le trouver. Que ces chiffres servaient à savoir où il se situait mais ils ne purent expliquer leur fonctionnement. Seul Altaïr le Sage pourrait lui montrer comment les utiliser. Et elle allait devoir le chercher dans l'immensité de l'univers sans aide, sans rien savoir de lui à part son nom. Mais elle apprit aussi qu'ils étaient les derniers. Les derniers humains. Que l'espèce s'éteindrait avec elle. Et qu'il fallait qu'elle soit prudente car sa race n'était pas aimée. Ses ancêtres étaient des meurtriers, des monstres pour beaucoup de peuples.

Ainsi, ses parents lui apprirent tout ce qui pourrait lui être utile pour son voyage : conduire un vaisseau à énergie exotique, parler les langues des différents systèmes,  l'art de négocier, le maniement d'un fusil-plasma, la culture spatiale où encore les coutumes des autres êtres vivants intelligents. Alors, lorsqu'ils eurent tout transmis, la mort vint les cueillir car leur tache étaient accomplie. Elle savait que cela allait arriver tôt ou tard, elle s'y était préparée. Elle versa une seule larme, larme seule comme elle,  qu'elle essuya avec sa manche. Elle fut alors la commandante de ce vaisseau et de son long voyage. Dans son esprit limpide apparaissait seulement le but de sa quête : le château.

Les premiers mois furent durs pour elle. Elle se sentait seule dans ce vaisseau. Seule dans ce vide interstellaire pourtant peuplés de plusieurs centaines de milliards d'être vivant plus ou mois évolués, pourtant rempli d'étoiles au couleurs variées et vives autour desquelles gravitaient des planètes battues par les vents, noyées sous les océans où meurtries par les météores. Et elle n'avait pas été préparée à cette solitude, à l'absence de la douce voix de sa mère et des bruits forts des pas de son père. Elle espérait voir un autre humain mais elle savait que l'autre, seul restant, l'attendait sans bouger, probablement perdus sur une lune au nom oublié. Et c'est pour cela qu'elle écumait l'espace à la recherche de cette relique vivante. Elle s'arrêtait souvent dans les astroports et elle questionnait les voyageur pour essayer d'obtenir quelques maigres informations. Elle repartait toujours bredouille ayant seulement récoltée des regard courroucés ou même, de temps en temps, une nouvelle blessure : un hématome, une entaille ou, plus rarement une entorse. Elle se
soignait alors patiemment, en grimaçant de douleur. Elle se faisait violence pour recommencer, pour ne pas s'arrêter avant d'avoir trouvé le château.

Mais le 12 janvier de l'an 34242, elle ne revint pas les mains vides. En effet, elle avait rencontré une personne qui savait. Plus précisément, Alkt'ari, un palpusse à en juger par ses longs tentacules translucides brillant d'une lueur rouge sang inquiétante. Une capuche masquait son visage mais la lumière verte émise par ses yeux traversait le fin maillage de tissus.