Casting ? C'est une blague ?

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La veille, je me suis réveillée à une heure du matin avant de me rendre compte que j'étais toujours dans la jardin. Je suis rentrée le plus vite possible, mais mes parents m'ont surprise et m'ont crié dessus pendant vingts minutes. Ils ne m'ont pas crus quand je leur ai dit que j'étais où j'étais pendant tout ce temps. Enfin... Avant de voir toutes les feuilles et autres débris végétaux sur moi. Je suis allée me coucher et le lendemain, ma mère m'a réveillée à six heures pour le casting. Elle m'a coiffée, habillée et m'a suppliée d'être correcte parce qu'elle avait dû faire jouer toutes ses relations et que c'était le seul casting qui avait accepté de me prendre. 

Là, je suis dans la voiture... Passionnant. Je suis persuadée de faire une tête ridicule, tant je suis plongée dans ma bouderie intérieure. Une fois arrivée, je prends sur moi et fais mon plus beau sourire à chaque personne que je croise. Les locaux de l'agence sont élégants, quoique légèrement stériles. Nous marchons d'un pas nerveux dans le couloir blanc et gris qui semble sans fin et  arrivons enfin devant une porte que nous nous empressons d'ouvrir. Les filles dans la salle d'attente sont toutes plus moches les unes que les autres et sont très peu nombreuses. Étonnée, je demande à ma mère ce qu'il s'est passé. Elle m'adresse un petit sourire mi-désolé, mi-frustré avant de détourner le regard. Préoccupée moi aussi, je n'en rajoute pas. 

Les laiderons aux cheveux gras passent les unes après les autres et c'est enfin mon tour. Je me faufile entre la porte et le mur, un peu nerveuse et observe les gens en face de moi. Deux hommes d'environ quarante ans sont assis derrière une table et se consultent du regard d'un air désespéré. Un garçon, qui à l'air d'avoir mon âge est assis entre eux deux et se tient la tête entre les mains. Je lance un vague "bonjour !" et ils regardent enfin dans ma direction. La mâchoire des deux plus vieux se décroche et l'adolescent me sourit doucement, d'un air satisfait. Devant leur air béat, j'abandonne l'idée de faire en sorte de tout gâcher pour plutôt leur en mettre plein la vue.

Étrangement, au lieu de me demander de me trémousser en rythme et en agitant mes longs cheveux aubrun, comme je m'y serais attendue, il m'intiment de présenter un saucisson et de faire comme s'il était délicieux et qu'il me rendait joyeuse (ce n'est évidemment pas le cas, le saucisson me dégoutte, je préfère largement le chocolat !) J'ai l'air de me débrouiller plutôt bien, puisqu'au lieu de me laisser partir, ils appellent ma mère pour signer un contrat immédiatement. Je n'arrête pas de lancer des coups d'œils appuyés à celle-ci pour lui demander ce qui se passe, mais elle m'ignore royalement et signe. Je signe aussi, quand même heureuse d'avoir réussi. Les deux messieurs semblent soulagés mais me demandent de sortir un instant pour discuter des formalités avec ma mère. Je souffle bruyamment, histoire de montrer mon mécontentement, mais personne n'a l'air de le remarquer. Je marche d'un pas exagérément lourd et lent vers la porte blanche et pars explorer les lieux. Le garçon me suit, mais je fait mine de ne pas le voir et essaie de le semer dans le dédale de couloirs de l'agence.

 Je marche de plus en plus rapidement, le souffle court, jusqu' à me décider à courir. Je dévale un escalier, et manque de trébucher. De longues mèches de cheveux me sont passées au dessus de la tête, et je m'arrête quelques secondes pour les remettre derrière mes oreilles. Je tourne à gauche , puis à droite, puis encore à gauche, jusqu'à tomber dans un cul-de-sac. Je me retourne vivement, remonte les manches de ma petite chemise, qui je le crains est pleine de transpiration et cours dans le sens inverse. Je tombe nez-à-nez avec l'inconnu, mais  je fais comme si de rien n'était et passe à côté de lui en sifflotant, d'un pas assuré et la tête haute. Un peu surpris, il me regarde le contourner, mais se lance à ma poursuite dès qu'il voit que je repars à toute vitesse dans une autre direction après lui avoir tiré la langue. Mes rires se mêlent au sien,mais je sais que je ne pourrais pas tenir longtemps, je n'ai pas joué à chat depuis mes six ans ! Ses pas se rapprochent tandis que je ralentis sensiblement. Je tourne la tête vers lui et aperçois la lueur de vainqueur dans son regard.

Un amour de saucissonWhere stories live. Discover now