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Il faisait juste semblant.

C'est ce qu'elle croyait désormais, en tout cas. Il l'appréciait, en silence, alors qu'elle voulait qu'il lui crie son amour à pleins poumons.

Toutes ces fois où leurs regards s'étaient croisés timidement, gênés, désireux, inquiets, joyeux... Tous ces signes qu'il avait longtemps démentis, puis qu'il avait fini par admettre. Tous ces efforts qu'elle avait fait.

Il en avait sûrement fait aussi. Pas assez, cependant.

Elle avait lu dans un roman une phrase qui l'avait marquée, quelques mois auparavant. C'était quelque chose du genre : «Celui qui ne sait pas aimer n'aime pas.» Cela résumait bien la situation. Wilhem ne savait rien de l'amour. Il avait essayé de se convaincre du contraire, mais au fond, il n'avait jamais aimé personne d'autre que lui-même.

Elle lui manquerait sûrement.

Il lui parlerait de temps en temps, un petit mot pour tenter de se remémorer en vain la flamme maladive qu'ils nourrissaient, avant.

Mais il l'aura perdue.

Après maintes et maintes peines, elle qui pensait qu'il serait un des plus grands amours de sa vie, elle s'était rendu compte d'une chose fort importante : elle valait bien mieux que ça. Elle lui aurait tout donné, mais ça aurait été comme jeter de l'or dans un puit sans fond.

Elle avait une certitude, après tout ; elle rencontrerait quelqu'un qui l'aimerait pour ce qu'elle était, qui s'intéresserait aux discours les plus stupides qu'elle tiendrait, mais aussi ses pensées philosophiques, qui essaierait de la comprendre, quelqu'un qui sentirait son coeur battre la chamade en la voyant, quelqu'un qui la surprendrait et qui la ferait rire. Quelqu'un qui lui prouverait qu'elle mérite d'être aimée, et que l'amour vaut la peine d'être ressenti.

Quelqu'un qui la rendrait heureuse, pour une durée déterminée : jusqu'à sa mort.

Elle porta la main à son coeur, ferma les yeux et chantonna.

C'était le début d'une nouvelle vie.

disastroOù les histoires vivent. Découvrez maintenant