Histoire d'un élémentariste 3 - La fin d'un monde

Chapitre 1

Le réveil sonna. Il faisait encore nuit dehors et je pouvais déjà sentir le froid s'infiltrer dans la chambre. Je me levai, pris un petit-déjeuner rapide puis partis courir. Après j'irais à l'école des élémentaristes - dans la section soulbreaker - pour apprendre le maniement de l'épée jusqu'au soir avant de rentrer chez moi pour dormir... Puis je recommencerais la même routine le lendemain.

La seule chose qui me permettait de tenir ce rythme infernal était la vision de notre "Empereur-Créateur" étalé à mes pieds, implorant ma pitié. Cet enfoiré avait détruit ma vie et celles d'un nombre incalculable de personnes depuis plus de cinq cents ans... Il n'avait même pas la décence de mourir comme un être humain normal !

Un frisson de rage me parcourut, me redonnant de l'énergie. J'en profitai pour accélérer ma course. Il ne me tardait qu'une chose : que le tournoi annuel commence. Je venais d'avoir dix-sept ans, me permettant ainsi de rentrer dans la plus jeune catégorie. Le gagnant pouvait demander un duel contre l'Empereur-Créateur. S'il survivait deux minutes contre lui, il se voyait octroyer des pouvoirs d'élémentariste hors-norme ainsi qu'un titre de noblesse.

Officiellement, trois personnes avaient réussi à survivre à ce duel depuis la création du tournoi il y avait près de quatre cents ans. La dernière gagnante l'avait remporté il y avait deux cents ans. Elle avait déjà la quarantaine quand elle avait accepté le défi et était morte il y a une dizaine d'années - apparemment, de puissants pouvoirs rallongeaient considérablement l'espérance de vie -. Beaucoup d'autres avaient tenté leur chance depuis mais personne n'avait réussi. Il était très rare de nos jours que quelqu'un demande le défi. En général ils se "contentaient" (on parle de plusieurs millions) de la récompense du tournoi.

Cependant, je les comprenais parfaitement. Pour avoir vu un certain nombre de rediffusions de ce défi, il fallait être fou pour tenter sa chance. Même ceux qui y avaient survécu n'y étaient parvenus que par chance plus que par talent. Pour résumer, l'Empereur-Créateur était un monstre. Il était complètement inhumain. L'affronter revenait juste à signer son arrêt de mort. Le défi qui m'avait le plus marqué était celui qui avait eu lieu juste après l'assassinat de la femme de l'Empereur-Créateur il y a un peu plus de 300 ans, quand la situation était plus ou moins revenue à la « normale ». Le combat avait duré 2.2 secondes (ç'avait été chronométré). Il ne restait absolument rien du cadavre. Littéralement. Le nombre de défis avait drastiquement chuté depuis cette fois-là.

Malgré tout ça, rien ne pouvait me détourner de mon obsession. Cette vengeance qui me dévorait en permanence. J'obtiendrais justice envers ce monstre qui n'avait que trop vécu.

Quand je rentrai chez moi, tout ce qui m'accueillit fut le silence. Cet appartement avait appartenu à mes parents avant qu'ils ne meurent dans un accident de train, nous laissant seuls, mon petit frère et moi. J'avais douze ans à l'époque. N'ayant pas d'autres membres de la famille encore en vie, on nous avait proposé de rejoindre un orphelinat. J'avais refusé : je ne voulais pas quitter tout ce qui nous restait de nos parents. Mon refus avait été accepté et on nous avait mis sous tutelle jusqu'à mes quinze ans. Grâce aux aides de l'Empire, nous nous en étions sortis sans trop de problèmes. Tout allait presque pour le mieux.

Puis vint le jour de l'Examen de Benjamin. Lorsque les enfants atteignaient l'âge de onze ans, on leur faisait passer l'Examen. Officiellement, cela permettait d'empêcher la propagation de défauts génétique ou de toute autre anomalie. Officieusement, beaucoup de gens émettaient des doutes sur ce qui était vraiment vérifié. Je n'y avais jamais prêté attention jusqu'à ce que je reçoive la visite d'un inspecteur de l'Empire pour m'annoncer que mon petit frère avait échoué et qu'il avait été "retiré de la population". C'était il y a un an. Depuis ce jour, je ne cessais de m'entraîner. Sa mort ne resterait pas impunie !

Heureusement pour moi, il s'était avéré que j'étais doué pour le combat et que mes capacités de soulbreaker étaient suffisamment élevées pour me permettre de rapidement combler mon retard et même de dépasser ceux avec qui je m'entrainais. En l'espace de huit mois, j'étais devenu le meilleur soulbreaker de ma catégorie d'âge. Mes entraîneurs ne tarissaient pas d'éloges à mon égard bien que mon obsession pour l'entraînement les inquiétait beaucoup. Je leur avais fait part de mon intention de participer au tournoi, mais pas celle de relever le défi. Bien évidemment, ils étaient très enthousiastes à cette idée.

Le temps défilait à toute vitesse. Presque aussi vite que grandissait mon impatience. Le tournoi se rapprochait rapidement, mais pas assez vite. Je n'en pouvais plus d'attendre ! Je m'améliorais un peu plus chaque jour et je savais que je n'étais pas prêt, mais cette attente était un véritable supplice...

Le grand jour arriva enfin. J'étais aussi prêt qu'il m'était possible de l'être. Il était temps d'y aller !