Chapitre 10 | Traces

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Le matin est frais. Au début, c'est très démotivant, mais je suis maintenant habituée. J'enfile des bas chauds, mon ensemble de course et, depuis deux semaines, mes caches-oreilles. J'ai tout un style! Si Kate me surprenait ainsi vêtue, elle ne me laisserait jamais sortir de la maison! Je tresse mes longs cheveux pour ne pas les avoir dans le visage. C'est devenu ma nouvelle coiffure, depuis leur croissance accélérée.

Je mange un fruit, m'échauffe un peu et sors.

Aujourd'hui, le vent souffle dans tous les sens et les feuilles brunes, sur le sol, virevoltent d'un bord et de l'autre de la rue. Le soleil ne me fait pas défaut par contre! Il me réchauffe doucement le dos alors que je traverse le bois à toute allure. À mon grand contentement, j'ai développé beaucoup d'endurance, rapidement. Je traverse le sentier, filant comme le vent, j'ai la sensation de voler à travers les arbres, c'est magique! J'adore ça! Je ne ressens alors, plus aucune douleur, à part le froid sur mes joues. Je respire l'air pur, il n'y a plus de limites, je suis libre.

Je vais hors du sentier depuis quelques semaines. J'évite les obstacles avec souplesse, je zigzague à travers les arbres qui ont perdu leurs feuilles sans souci de trébucher dans les branches cassées sur le sol, sans me préoccuper des roches par-ci, par-là qui encombrent le chemin.

À vrai dire, il ne faudrait pas que quelqu'un me voie dans cette petite routine. Je vais très vite, beaucoup trop vite. Et je n'ai pas le courage de regarder, mais je sais que mes pieds frôlent à peine le sol lorsque je courre.

Je finis par retourner dans le sentier. Je ralentis un peu et termine mon chemin jusqu'à la maison. J'arrive en sueurs, je saute dans la douche. Deux heures plus tard, mon cours de danse commence.

Ma fin de semaine est libératrice! Puis le lundi arrive et je reprends les cours. Là, est la partie difficile: Traverser l'entrée principale. Tous les jours, j'essaie d'ignorer cet espace. Là où Gabriel m'attendait avant et après les classes. Je tente désespérément de la parcourir sans regarder autour de moi, en marchant tout droit le regard concentré vers l'avant, rien d'autre. Une fois sur deux, je risque un coup d'œil un peu partout, scrutant la foule voir s'IL n'apparait pas quelque part. Il serait assis sur notre banc habituel à m'attendre ou encore, il se pointerait avec sa voiture blanche et me ferait signe de le rejoindre au stationnement.

J'espère tous ces scénarios qui deviennent de plus en plus impossibles. Alors je continue à avancer tout en souhaitant la fin de la semaine pour me sentir vivre de nouveau par mes activités physiques.

Octobre n'est pas terminé que l'hiver s'installe dans toute sa grandeur déversant la neige à grands torrents. Les rues sont enveloppées d'un tapis blanc, les arbres et les sapins sont aussi devenus blancs. Je me dirige dans le bois et on dirait que l'on vit dans de la ouate. Je peux courir sans problèmes à travers les arbres. C'est très agréable, je laisse à peine quelques traces dans la neige légère qui retombe doucement après mon passage rapide. C'est seulement à ce moment que je sens pour la première fois, que quelque chose d'étrange se manifeste autour de moi.

J'ai l'habitude de courir seule, sans me soucier de quoi que ce soit à part d'éviter les arbres avec allégresse. Mais aujourd'hui, je sens une présence autour de moi dans la forêt, quelque chose me suit. J'en suis sure. Je l'entends, c'est un drôle de sifflement près de moi qui me suit. Comme je vais à une vitesse surnaturelle, il faut que cette présence le soit aussi.

Alors j'accélère et la chose aussi. Qu'est-ce qui serait capable de me suivre à une telle allure? Plutôt QUI?

Je repense à la silhouette en noir du mois de septembre. Le souvenir me revient aussitôt et l'espoir de retrouver cet être qui m'a guérie dans ces mêmes bois quelques mois plus tôt monte en moi.

Jenny & Jack Tome 1 - L'Autre MondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant