Le trajet dans ce nouvel environnement paraît interminable alors qu'en réalité, il ne dure que quelques secondes. Un temps qui peut paraître court, mais qui, sous l'emprise de la peur, semble s'être rallongé. La lumière m'éblouit de nouveau, si bien que mon dos se colle un peu plus contre la paroi comme si j'espérais secrètement pouvoir m'enfoncer dedans et y disparaître.
Le train ralentit tout comme mon rythme cardiaque en apercevant le territoire dans lequel je vais devoir errer jusqu'à mon dernier souffle.
Mon front retombe lentement contre la vitre pendant qu'une première larme roule le long de ma joue pour s'échouer dans le coin de ma lèvre inférieure.
C'est donc à ça que va ressembler mon quotidien.
Des lamentations.
J'ai l'impression que mon moyen de transport ne va pas tarder à s'arrêter, mais je ne vois absolument rien qui pourrait laisser deviner que nous arrivons à destination. Je vais juste être lâchée comme ça ? Au milieu de nulle part ?
La porte de l'habitacle claque, après s'être réouverte à cause de la force du vent et du jeu présent dans la poignée qui la rend branlante. Je m'approche à pas de velours et sors. Face à l'orée de la forêt qui approche, la brise est supportable. Je peux tenter de sauter et de me camoufler grâce aux fourrés. De toute façon, maintenant que je suis coincée ici, il y a peu de chances qu'ils me tuent. Ils ne me toucheront pas d'autant plus si l'Alpha attend quelque chose de moi. Une mission dont je ne me souviens pas puisqu'il s'est bien gardé de m'expliquer comment je suis censée atteindre cette partie de mon subconscient.
Ce besoin n'est pas dû au fait de savoir que c'est ce qu'il attend de moi. Je dirais que c'est plus de l'ordre de la curiosité. Que peut-il bien craindre ici au point de vouloir envoyer un prisonnier infiltré ?
Décidée à tester cette théorie, je m'aventure sur le plancher tout en repérant à travers les lattes de bois les roues pivoter contre les rails. En retrait, je recule de quelques pas pour prendre mon élan tout en rabattant ma capuche sur la tête afin de me protéger du climat.
« Surtout, prends ton temps, on n'est pas pressé », grogne ma louve.
Le souffle coupé, je solidifie mon appui puis me jette hors du rebord lorsque les premiers arbres apparaissent. Je plonge la tête la première dans la neige puis tente de m'extirper tant bien que mal de cette épaisse couche. Le convoi continue sa progression. Gelée, je me redresse en chassant les particules de mes vêtements, les bottes submergées. Je patauge pour me traîner vers un endroit plus praticable. Une épaisse brume s'échappe de mes lèvres pendant que je reprends peu à peu mon souffle tout en m'adaptant à mon nouvel environnement.
« Voir toute cette étendue m'a soudainement donné l'envie de courir », prononce ma louve.
— T'es bien la seule à être enjouée, grogné-je, exaspérée.
Mon moyen de locomotion s'éloigne de plus en plus sans le moindre signe alertant. Je suis à présent isolée, livrée à moi-même.
Que suis-je censée faire maintenant ? Me construire une hutte et manger des insectes ? Je ne flaire absolument rien aux alentours et cela commence à m'inquiéter. J'ignore où je suis exactement par rapport à la civilisation qu'ils ont forcément dû se bâtir. La seule chose que je sais, c'est que je me trouve au début du mur.
Je reluque ce dernier se dresser de toute sa hauteur après avoir écarté une branche de sapin. Mes doigts effleurent l'écorce zébrée par de longues traces de griffures que je viens à peine de remarquer. Interloquée par ce geste qui signifie le marquage d'un territoire, je me tourne vers l'intérieur des terres. Pour des loups bannis, ils semblent étrangement faire preuve d'un esprit de communauté. Comment peuvent-ils créer un ordre ainsi ? Chacun a la possibilité de se réinventer, j'imagine que beaucoup doivent y voir une occasion de prendre le pouvoir. Je m'attendais plutôt à ce que cela soit le chaos complet.
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𝐍𝐎𝐑𝐓𝐇𝐄𝐑𝐍 𝐖𝐎𝐋𝐕𝐄𝐒 - (aperçu avant édition)
WerewolfCalysta est une louve errante, fugitive et sans meute qui subit les conséquences d'une règle qu'elle a transgressée. Ne jamais se transformer devant les humains. Contrainte de se rendre en Alaska, la terre des bannis, elle ne pensait pas en s'instal...