Chapitre 17

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Pfff... Ranger les assiettes c'est vraiment pas mon truc. Mais pourquoi elle a autant de vaisselle? Elle vit seule pourtant...
Enfin bref, c'est fini, maintenant je dois retourner chez moi, et surtout retrouver mon invité.

Je reste devant la porte d'entrée, planté là, comme une graine qui cherche à prendre racine, à attendre.
Attendre quoi au juste? Que Cédric sorte tout seul et rentre chez lui?
Non bien sûr que non... Je reste là car j'ai trop peur de croiser son regard, je ne veux pas voir son visage rempli de je ne sais quelle pitié.
Mais il faut bien que je me bouge.
Allez Adrien, prends ton courage à deux mains et ouvre cette fichu porte comme tu le fais chaque soir.

Ouf... Je suis passé, sans doute que le plus dur m'attend dans ma chambre.
Je défais mes lacets puis pose mes chaussures à côté de celles de Cédric.
Elles sont graves belles quand même, des baskets noires et blanches, neuves, sans doute un modèle récent.
J'ai pas vraiment l'habitude d'en voir, surtout ici, et le contraste avec les miennes est surprenant.

J'avance vers l'entrée de ma chambre, puis je constate,avec une certaine gêne, des fissures sur la porte entre-ouverte.
Je ne les vois pas d'habitude, mais aujourd'hui elles sont bien visibles...
C'est fou comme les détails paraissent plus évidents à mes yeux quand Cédric est là, comme si sa présence mettait en lumière les pires défauts de mon appartement.
Et qu'en est-il de ma chambre? Vais-je constater de nouvelles imperfections parmi tant d'autres? Et qu'en pensera Cédric?
Je m'imagine déjà ses pensées, et elles me font froid dans le dos.
Elles me font tellement peur, qu'elles balayent le peu d'envie qu'il me reste d'entrer dans cette pièce...
Tant pis, je ne peux pas reculer, je dois affronter mes peurs, pour mieux les surmonter.
Je pose ma main moite sur la poignée, et ouvre lentement la porte, laissant s'étaler un grincement assez hideux.

Cédric est là, assis sur mon lit, les pieds joints, les mains sur les genoux, et adoptant une posture digne d'un écolier.
Il tourne la tête vers moi, lève les yeux, et me glisse un sourire.
Mais pas n'importe lequel, pas celui qui me donne envie de sourire à mon tour, pas non plus celui qui me transperce en plein coeur, laissant couler mes émotions.
Non, plutôt un sourire forcé, un sourire qu'il m'adresse par commodité, rien de plus qu'un écartement des lèvres qui laisse vaguement apparaître des dents blanches.
Il n'y a plus cette lueur dans le regard qui colore ses yeux d'une incroyable douceur.
Non, rien de tout cela.
Alors je m'approche doucement de lui, d'un pas lent, en regardant le sol gris de ma chambre, jusqu'à apercevoir la couette de mon lit et les genoux de Cédric.
Je lève un peu les yeux, puis croise sa triste mine, et son regard perdu.
Je n'ai jamais vu une telle expression sur son visage.
Est-ce le reflet de la mienne? Sans doute.

Je ne sais pas quoi faire, moi aussi je suis perdu, sauf que je suis debout et lui assis.
Que faire? Le rejoindre? Rester comme cela?
Non... Je dois oublier tout ça, oublier toutes ses pensées, toutes ces réflexions qui pourrissent ma vie.
Mon esprit doit se taire, et se réfugier dans le silence.

Alors, laissant mon cœur orchestrer, je m'agenouille devant lui, un geste qui m'oblige à lever la tête vers la sienne, mais sans la quitter.
N'écoutant plus mes craintes, je pose ma tête sur sa cuisse, sentant son jean frotter sur ma joue.
Il se laisse faire, et ne dit rien; il a écarté ses mains, je le sens en train d'hésiter.
Alors je lui ouvre ma paume, n'attendant que la sienne pour y refermer ma main.

Ce qu'il fait à l'instant.

Ses doigts passent lentement entre les miens, et entourent doucement ma main par la délicatesse et la chaleur de la sienne.
J'aime cette sensation... Je l'adore... Je veux rester avec lui, sur le lit, nos mains liées, à jamais...
Je ne veux pas le perdre, certainement pas. Je me suis tellement attaché à ce garçon que je ne pourrai plus m'empêcher de rêver de lui. J'ai besoin de Cédric, besoin de l'avoir à mes côtés, besoin d'entendre sa voix, d'admirer ses yeux, et besoin de garder ma main dans la sienne.

L'Amour Est BleuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant