Even

9. Les copains d'abords

Lundi 5 Juin 7h46

« Even »

Le rituel recommence, je me relève un peu, mes yeux toujours collés de sommeil, j'ouvre la bouche, je sens sa main maintenir mon crane, la pastille descend douloureusement, un gout acre reste dans ma bouche.

« Even je vais en cours »

Je me suis déjà endormi.

17h10

Des baisers tendres sur ma joue et des doigts glissent entre mes cheveux me réveillent.

« Je veux que tu ouvres tes beaux yeux mon amour »

Je secoue la tête pour tenter de remonter à la surface, j'aime le son de sa voix. Il est tellement différent quand nous sommes dans l'intimité. Il est doux, attentionné, moins rustre. Sa voix me pousse à ouvrir les yeux. Il m'embrasse et je tente de lui sourire. Mon corps est lesté contre le matelas, mon visage est encore engourdit. Il passe sa main sur mes joues et ma nuque. Il repose le drap correctement sur moi, je ne l'entends pas s'éloigner, je dors déjà.

20h07

Retour au rituel, j'ouvre la bouche, sa main maintient ma nuque et la pastille glisse lentement, je tousse, une autre goutte d'eau et elle est passée.

Je dors.

Il fait noir, je marche, il fait sombre je ne vois pas où je suis, c'est très sombre, j'entends des bruits qui résonnent derrière moi, j'accélère le pas.

Je cours à présent, j'ai l'impression que je n'avance pas, pourtant je cours de toutes mes forces, je n'arrive pas à respirer.

Isak au loin devant, me tourne le dos, il marche. Je n'arrive pas à le rattraper, il tourne sur la droite, je dois le rejoindre, je vois des escaliers au loin, je n'arrive pas à les atteindre

Je cours toujours, j'ai l'impression d'avancer de deux millimètres alors que je développe de très grandes enjambées.

Je suis enfin devant ces escaliers, qui se sont déplacés, ils descendent maintenant vers encore plus d'obscurité, je les empreinte lentement, ils pivotent et deviennent une pente sur laquelle je glisse sans pouvoir me retenir, je me tourne tant bien que mal sur le ventre pendant cette descente infernale. Mes ongles griffent le sol lisse et dur, ça ne ralentit pas pour autant ma chute, la pente se fait plus forte, au bout un précipice, aucun endroit pour me retenir, je panique, je respire fort, je me débats mes bras frappent le sol de mes poings pour me retenir, je crie , aucun son ne sort de ma bouche, aucun point d'appel pour m'accrocher, la chute est imminente.

Je plonge dans le néant dans l'encre intense qui se repend autour de moi, je sens de l'air sur mon visage, j'attends l'impact, le silence m'enveloppe puis...

« Even, mon amour, Even !!! »

Je sens de l'humidité sur mon visage.

Isak est en train de me passer un gant mouillé sur la peau, il est au-dessus de moi le regard inquiet. Je suis en nage, les draps emmêlés autour de moi, je transpire et j'ai froid.

« Tu ... tu étais très agité ... » son regard sur moi me suffit pour comprendre, il m'embrasse, je sens sa chaleur qui irradie mon corps au travers de ce baiser.

Mercredi 7 juin

J'ai passé un jour entier à dormir, ce matin je me lève, ça va mieux, enfin je crois, j'ai eu moins de mal à me réveiller et surtout je suis sorti du lit  sans aide. Isak est déjà parti pour ses cours. Je vais dans la cuisine et me fait un thé. Sur la table un petit mot avec un verre d'eau et mes cachets. « Je n'ai pas osé de te réveiller, tu avais l'air si bien, j'ai appelé ton boss, tu peux rester tranquille aujourd'hui encore, n'oublie ton traitement, je t'aime, Isak »