Cinquième jour : Connard m'a tuer

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Putain de merde.

Ouais, je sais ce que vous allez me dire, commencer un truc par "putain de merde" ça le fait pas trop. Ben je suis sûr que c'est pourtant exactement pour ce genre de raison que vous lisez ça. Avouez. La vulgarité, ça soulage. Un jour, on m'a dit "à utiliser avec modération", mais j'ai toujours pas compris le quatrième mot.

C'est aussi le cas de l'autre abruti d'hier soir.

Ouais, je sais, j'ai pas écrit hier, et ça passe de "troisième" à "cinquième jour", vous êtes bouleversé dans vos petites habitudes, tout ça. Pauvres petits.

Eh, rappelez-vous que j'ai jamais promis écrire tous les jours. Une fois n'est pas coutume, pas vrai ? Ben trois non plus. Alors on la ferme.

Si seulement j'avais fait pareil hier.

Non parce que bon, je sais de quoi j'ai l'air, hein, d'un connard qui ouvre sa bouche que pour se plaindre de son prochain. Et croyez-moi que c'est exactement ce que je suis. Mais des fois, ouais, juste des fois, j'arrive à voir quand j'aurais dû fermer ma grande gueule.

Remarque, ce con de flic, aussi.

J'étais tranquillement entrain de faire en sorte que la nuit soit VRAIMENT noire, comme je l'ai dit en partant la dernière fois. Moi, ça me gonfle, quand y a de la lumière la nuit.

Eh ben les flics se sont ramenés.

D'abord, je vais vous parler de Bob.

C'est un voisin d'en face. Bob, la première fois que je l'ai vu, je me suis dit que c'était un gros con. Un bon gros vrai con, authentique, de première qualité. Du con bio.

Elle m'avait pourtant dit que non faut pas juger sur l'apparence comme ça, tout ça, il fait leur donner une chance.

Eh ben ça a pas loupé : Bob s'est carrée la sienne tout au fond de son fondement.

Alors qu'on commençait enfin à distinguer un semblant de ciel au-dessus des loupiottes décédées de la rue, moi, bien content, mes cailloux à la main, je me baladait en visant mes victimes. Et là, un Bob con comme un manche apparaît à la fenêtre. Le genre de voisin chelou qui t'observe en écartant le rideau, v'voyez., persuadé que la lumière de sa cuisine dans son dos ne se verra pas du tout de l'extérieur. Abruti.

Je me dis que c'est rien, au pire il sort, je lui dis la vérité, à savoir que sa connerie est susceptible d'un jour dépasser la taille de son bide, et il se cassera, pas de soucis. Mais non.

Voilà pas que quelques minutes après, les flics se ramènent.

Enfin, je dis les flics, mais c'est parce qu'ils étaient deux, lui, et son gros bide. A croire qu'ils sont tous gros.

Me faites pas dire ce que j'ai pas dit, hein, j'ai jamais dit que j'aimais pas les gros. Je les déteste pas plus que les autres. Ouais, du coup, je les aime pas, c'est vrai.

Donc ce mec a osé m'embarquer dans sa caisse, et en me foutant des menottes en plus. Tout ça parce que j'avais pété une demi-douzaine d'ampoules qui faisaient chier le monde entier - moi - et il ose en plus m'accuser de lui avoir pété le nez. N'importe quoi. Il était à peine déformé. Pfff. Fallait pas me pousser, aussi. Aucun sens du risque. Et c'est à ces types-là qu'on file des flingues. Autant donner des magnums à des moineaux. Au moins les connards de chasseurs réfléchiront à deux fois.

Bref.

Je suis donc arrivé au poste, en garde à vue, comme un crétin d'ado qui a réussi à se faire chopper avec deux ridicules grammes d'herbe, même pas de quoi se faire un pet.

Et y en avait, des cons, là-bas. Et pas que les flics, contrairement à ce qu'on pourrait penser.

Dans la cellule pourrie, y avait deux types. Un qui sentait la pisse et le vomit, et l'autre qui sentait la fin arriver. Enfin, sa mère. C'était un gamin qui avait piqué un truc dans une baraque, à tous les coups. Chien, alarme, flics, fin de l'histoire. Et ses potes s'étaient barrés dès la première sonnerie. Du coup il tremblait du genou, il était nerveux, le pauvre.

Après, bon, il m'a demandé si je voulais sa photo. Ben je crois qu'il a pas aimé quand je l'ai traité de petit con pré pubère sans avenir, parce qu'il s'est mit à gueuler à peu près tous les mots qu'il avait dans son vocabulaire. Une bonne douzaine, quand même. Pas mal, pas mal.

Nuit de merde. Ces abrutis m'ont gardé 24h. Putain de 24h. Eh ben ils les ont senties passer, croyez-moi. Qui a dit qu'on ne pouvait pas chanter du Claude François 18h d'affilée ?

Même moi je suis désolé pour eux, merde. J'aurais peut-être pas dû.

Je suis crevé.

Je vais dormir. Ouais, on est le matin, maintenant, à cause de la paperasse des autres abrutis, mais bon.

Je suis crevé. Mais je sais pas si je suis fatigué ou mort.

A voir si la vie ne tient qu'à un corps.

Sinon, les Parques sont passées depuis longtemps.

Finissez-moi, les filles.

Journal d'un conOù les histoires vivent. Découvrez maintenant