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Tout est maussade, tout est monochrome. Aveuglé par tant de couleurs taciturnes, le petit Yoongi, peau de sucre, est tête baissé, ses mains osseuses jointes sur le bout de ses genoux qui pointent misérablement sous son jean clair. Le siège de ce fauteuil de fausse noblesse lui cisaille le bas du dos et le bois précieux qui l'entoure l'étouffe. Le regard cet homme austère qui lui fait face le transperce et lui noue la gorge. Lentement les couleurs se sont effacés de ses pupilles et il ne voit plus ce sourire lumineux. Il n'entend plus que les battements lamentablement rapides de son propre cœur et la respiration abominablement tranquille de cet homme qui lui fait face.
« T'enfuir avec cet inconnu était stupide mon fils. Tu m'as beaucoup déçu. »
« Oui, père. »
Papa, gentil papa. Sais tu que j'ai tenté de me jeter d'un pont ?
Papa, papa chéri. J'ai voulu mettre fin à mes jours, le savais tu ? Ou étais tu trop concentré sur tes colonnes de chiffres ?
Ne me donne pas de réponse, je la connais déjà. Du papier glacé et de l'encre imprimé, ce sont pour toi les récompenses d'un travail bien mené. Papa, mon papa. J'ai peur parce que je déteste ça et doucement, je commence à te détester et l'aimer, lui.
J'ai eu mon premier rire, le savais tu papa ? J'ai ri à en avoir des crampes au ventre. J'ai mangé une pizza au fromage avec mes doigts et j'ai embrassé un ange mais pour toi ce n'est qu'un homme.
« Heureusement que Heujin et Sung t'ont retrouvé. Tu as au moins l'intelligence de les suivre sans histoires. »
« Oui père. »
Papa, papa. Avais je le choix ?
Tes deux molosses auraient fait du mal à mon ange et je ne l'aurais pas supporté.
Mais pourrait tu le comprendre ?
Pourrais tu seulement comprendre ce qui m'as poussé à faire ce choix ?
Non, bien sur que non.
Alors oui j'ai lâché sa main pour monter dans cette voiture avec tes deux gardes du corps et intérieurement je lui hurlais de revenir me chercher. J'aurais aimé qu'il me retienne mais c'est moi qui l'ai repoussé car je sais de quoi tu es capable quand tu es irrité. Les marques dans mon dos peuvent en témoigner.
« Tu devras bien évidemment assumer la conséquence de tes actes et ne plus jamais revoir cet homme. »
« Oui père. »
Papa, qu'est ce que ce sera cette fois ci ? La ceinture ? Pas de nourriture pendant deux jours ?
Tu m'as déjà infligé la pire des douleurs en m'arrachant à ma lumière. Je commençais enfin à voir les couleurs mon papa, une palette scintillante qui m'as donné envie de respirer et de garder mes yeux ouverts. Je me suis même nourri pour continuer de voir ces merveilles au coté de mon ange. Lui qui m'as tenu la main alors que tu as toujours ignoré celle que je tendais désespérément vers toi. Il m'as écouté et à pris soin de moi pendant que toi tu ne t 'inquiétais même pas de mon absence. Tu ne t'es jamais inquiété.
Tu as vu mes joues se creuser et mon corps se couvrir de plus en plus de vêtements, tu ne t'es jamais inquiété.
Papa, mon cher papa. Que tu as su bien jouer les aveugles pour ton égoïste plaisir.
« Et tu me jetteras ce collier ridicule. »
Papa, détestable papa. Vois tu mes doigts se crisper autour de ce pendentif enfantin ?
Il est ridicule je le sais, un simple cornet de glace avec un sourire et des yeux en plastique. De la bien mauvaise qualité, de la camelote pour quelqu'un comme toi qui ne vois que les métaux précieux.
Mais papa, papa abject. Je l'aime ce pendentif parce que c'est mon ange qui me l'a offert avec son si beau sourire. J'avais encore les yeux fermés à cet instant et je n'avais pas pu voir ce qu'il m'avait mis autour du cou. Je n'avais senti que la chaîne froide glisser sur ma peau avec un poids au bout, vaguement j'en avais deviné la forme mais sans plus. Pourtant quand je l'ai vu la première fois, un vrai sourire à étiré mes lèvres abîmées et il m'a dit que j'avais le plus beau des sourires.
Toi, tu m'as interdit de sourire sous prétexte que j'avais l'air d'un bébé.
Toi, je te déteste.
« Min Yoongi m'as tu entendu ? Retire tout de suite ce collier. »
« Non papa. »