Le Rêve

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Du haut de mes cinq ans, j'avais compris que mes parents ne pourraient jamais rien faire pour moi. Je me suis donc promise d'arriver à contrôler l'apparition de cette présence et à l'empêcher de me faire du mal. La tâche s'avéra compliquée mais je n'abandonnais pas. Après beaucoup d'efforts et pas mal d'insomnies, mes maux de tête finirent par disparaître, au grand bonheur de mes parents. Mon cauchemar, quant à lui, demeurait là chaque nuit. Mais je n'avais plus peur. J'avais pris l'habitude de le voir comme une sorte de rendez-vous mystère dont la cause était toujours inconnue.

Avec le temps, je m'étais rendu compte que mon cauchemar évoluait. Comme si au fur et à mesure des années la suite de mon rêve s'écrivait toute seule. Vingt ans ont passés et j'attends qu'une nouvelle suite apparaisse comme on attend la suite d'un roman à succès. Je fais preuve d'un calme qui m'étonne fortement. Je parle de cette partie de moi qui rend ma vie impossible comme s'il s'agissait d'une simple broutille. J'ai passé tellement d'années à pleurer à cause de ça que je me demande si mes yeux ne resteront pas secs à tout jamais. Néanmoins, je réussis à être fière de la personne que je suis devenue. Je me sens forte, prête à affronter toute la misère du monde.

Je me levai et quittai mon lit, en sueur, pour aller prendre une douche. A cause de mon rêve qui me causait de nombreuses insomnies, j'avais pris l'habitude de vivre la nuit plus que le jour. J'avais passé tellement de temps à errer, seule, dans ma chambre et à contempler le clair de lune en essayant de trouver le sommeil, qu'évoluer la nuit était devenu quelque chose de naturel pour moi. Vivre la journée était un véritable enfer. Tout ce bruit, cette lumière, cette obligation de paraître polie et avenante envers des personnes qui ne te connaissent pas et calme et patiente envers ceux qui ne comprennent rien à la vie que tu mènes. Pour moi les règles de la vie en société ne s'applique que pendant la journée. Mais la nuit rien n'est plus pareil. Je suis libre de faire ce qu'il me plaît sans avoir peur qu'on me prenne pour quelqu'un d'étrange ou de bizarre puisqu'il s'agit de mon monde, mon univers. Et personne ne pourra jamais me l'enlever sans vraiment savoir pourquoi cela fait parti de moi.

J'enlevai mes vêtements trempés pour les mettre à laver. Je me dirigeai ensuite vers la salle de bain. La sensation de l'eau chaude coulant sur ma peau nue me permettait de reprendre mes esprits et de continuer ma nuit comme si de rien n'était. En sortant de la douche, je ne pus m'empêcher de jeter un coup d'oeil à mon reflet dans le miroir. Je voyais une jeune fille de vingt ans au visage pâle, ses yeux gris entourés de cernes foncés et profondes , ses cheveux auburns longs et dégoulinants d'eau encadraient un visage neutre de toutes émotions. Dans certains boulots que j'avais pu faire, on m'avait déjà demandé de me maquiller pour camoufler mes cernes ou bien de sourire plus souvent car apparemment je faisais peur aux clients. En guise de réponse, je leur avait gentiment fais comprendre qu'on ne me verrait plus au travail le lendemain. C'est sûr que ce n'était pas avec ce genre de propos que j'arriverais à trouver un boulot stable. Mais je ne pouvais pas m'en empêcher. J'ai tellement besoin d'être moi-même...

Une fois séchée, je fouillai mon armoire à la recherche d'un pyjama propre et me dirigeai vers la fenêtre de ma chambre. Je l'ouvris, laissant une douce brise nocturne caresser mon visage. Je fermai les yeux et tentai, comme après chacun de mes rêves, d'en comprendre leur origine. D'où venait cette force, cette présence mystérieuse qui semblait les contrôler. Cette question, je me la posais depuis plusieurs années sans jamais trouver la moindre réponse.

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⏰ Dernière mise à jour : Jun 20, 2019 ⏰

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