Aep Order Arkésia - Le commencement

Chapitre 3

Du feu. Des flammes noires entourent mes rêves dans de grands crépitements. Elles approchent mes mains, les évitent et se mettent à danser au gré de mes mouvements. Avaient-elles une signification?
Mes yeux restent fixés aux ponts de lumières obscures qui frétillent et s'agitent. Je n'arrive pas à regarder autre chose que ces montagnes de flammes qui me dominent autant par leur chaleur que leur hauteur.

Ma main s'avance doucement vers ce brasier sombre et la chaleur s'immisce dans la chair de mes doigts. J'observe ces derniers et remarque que mes ongles se sont allongés et ont noircis. Quel rêve étrange!
En continuant mon avancée vers les flammes, je sens que quelque chose n'est pas normal. Un vide se forme au creu de mon ventre. La main restée sur le tronc ne trouvait plus d'appuis.

Je chute.

Une branche. Deux branches. Un craquement. Trois branches. Une bonne dizaine d'autres branches. Deux craquements. Le sol.

Le souffle court, je ne comprends pas tout de suite ce qu'il venait de se passer. Un vertige me fait tituber et une douleur lancinante traverse mon dos et mes côtes. Une de mes deux mains me brûle sans vraiment que je ne comprenne pourquoi, des tremblements agitent celle ci et le bras tout entier. De mon épaule, je m'appuie à l'arbre. Mes paupières chauffent et j'ouvre les yeux. Un incendie s'était déclaré dans ma petite clairière. 

Paniqué, essoufflé, j'attends que ma vision se précise. Pour l'instant le paysage se formait de points de lumières flous, de noirceur et d'un ciel sombre. La nuit est déjà là?! Je ne me suis pas rendu compte du temps de sommeil que je venais de faire. Il faut que je bouge avant d'être totalement acculé par les fauves embrasés, qui ne semblaient rêver que de me rôtir. 

Malgré ma chute, mes jambes n'avaient pas trop pris de coups. Je pouvais aussi discerner ma cape à quelques pas. Un plan s'échafaude déjà dans mon crâne, simple, efficace. J'espère tout du moins qu'il sera efficace, que je survive à cette journée!
Avec un bond digne d'un félin, je me rue sur ma cape et l'agrippe le plus fermement possible entre mes doigts. Je continue d'avancer rapidement sans réel but, mon seul chemin étant les restes d'herbes qui n'avaient pas encore été calcinés. Mon coeur s'accélère au fil des flammes que j'évite, ma respiration aussi. Ce n'est pas une bonne chose.. Je sens déjà l'air lourd et enfumé pénétrer dans mes poumons et les rendre moins performants.

Une liane enflammée tombe sur mon épaule. Je me hâte de la jeter ailleurs en me brûlant la main. Cette dernière se faufile dans ma cape pour limiter les dégâts.
J'ai réussi à dépasser le feu ! Mais il reste rapide et moi je fatigue déjà de ma course effrénée contre cet élément dévastateur.

Des animaux courent eux aussi dans mon sens, je n'ose pas imaginer les pertes qu'il allait y avoir pour la chasse et le bois. Mes pieds survolent les obstacles en heurtant de temps en temps une branche ou une pierre.

Je finis par trébucher et m'étaler de tout mon long au sol. Encore une chute ! Mon corps n'allait plus pouvoir supporter mon propre poid bien longtemps. En m'appuyant à mon genou et avec l'énergie du désespoir j'arrive à me relever. Tout juste. Une flamme me lèche le mollet ce qui m'arrache un cri de douleur.

Ma course s'arrête quelques mètres plus loin. Ma tête ne me permet plus de faire un pas de plus et je perds connaissance.