22h23 après

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Je rêve les yeux ouverts. J'essaie de m'imaginer la vie que j'ai pu vivre avant. Ça me fait sourire comme pleurer. Je commence à tomber dans une paranoïa. Je me pose un millier de questions n'ayant ni queue ni tête. Alors je me rendors malgré la position inconfortable dans laquelle je suis pour me réveiller 30 minutes plus tard, noyée dans mes pleurs silencieux. Après tout pourquoi perdurer ? Je ne me pose pas cette question sur un coup de tête mais c'est une chose à laquelle j'ai réellement réfléchi. Je ne sais pas qui je suis. Je ne sais même pas pourquoi je suis là, maintenant, aujourd'hui en haut de cet arbre dans ce pays vide et inconnu accompagné d'une multitude de fourmis marchant avec la plus grande ignorance sur mon visage sale et fatigué de cette aventure sans nom.
Cherchant à me rendormir en espérant ne jamais me réveiller, je baisse les yeux sur ma robe en lambeaux. Elle est brodée délicatement d'un "J" et d'un "M"; encore visible malgré la saleté. Mon esprit et ma vue se brouillèrent.
- Elle sera magnifique ma chérie.
- J'ai tellement hâte de la mettre !
J'ai l'impression de regarder un film vu de l'extérieur. Tout est flou .. sauf.. son visage. Pas le mien, qui est soi-disant passant très euphorique, mais elle. Ai-je eu à peine le temps de retenir la figure de ma mère que tout disparaît et redevient noir.
Je reste quelques instants les yeux clos à savourer ce doux souvenir. Jamais je n'oublierais son expression. Je me réveille le sourire aux lèvres en serrant dans mon poing le porte-feuille resté dans ma poche. C'est trop bizarre pour n'être qu'une coïncidence... je décide de l'ouvrir. Il est usé mais les coutures ont l'air de toujours tenir. L'odeur du cuir me semble familière. Elle refait surface comme dans mon rêve. Je n'ai pas eu le temps de regarder le contenu que cette senteur en est remplacée par une autre moins agréable: le soufre et le brûlé. Je me hisse sur ma branche pour savoir d'où est ce que cela vient. Tout le vert de la forêt a été remplacé par un feu aussi brûlant que le ciel. Je me dépêche de descendre en essayant d'ignorer l'asphyxie qui me saisie déjà la gorge. Je m'élance au pas de course mais le feu avance plus vite que ce que je pensais. C'est comme si il était pourvu de jambes et que son unique but était de me traquer. Mes multiples blessures, surtout aux jambes ne m'aident pas beaucoup à avancer et je me sens déjà faiblir. La vie me donne trop de leçons en ce moment et je ne veux pas que cela cesse. Dans un élan de désespérance je la revois. Elle et la robe que je porte. Alors que le feu me chauffait déjà les talons, je repars en ignorant, oubliant un instant tout. La chaleur et la souffrance physique et mentale, mon cœur qui ne demande qu'à s'arrêter, mes cheveux laches qui collent sur mon visage en sueur, l'environnement sauvage et ignoré dans lequel je me trouve embarquée, le cercle de feu auquel je m'arrache; et je me raccroche à elle.

ChuteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant