Chapitre 11

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Je l'avais aimée dès le début. Très vite, nous avions créé une relation profonde. Malheureusement pour moi, en en aimait un autre. Comment aurait-elle pu vouloir de quelqu'un qui ne lui avait jamais vraiment révélé ses sentiments ?



« Je vais partir à Paris dans quelques semaines.

Cette annonce produisit son effet. L'un après l'autre, mes amis me fixèrent, incrédules. Pour répondre à leur question silencieuse, j'expliquais :

- Ma tante habite là-bas. Ma mère veux se rapproché d'elle. Elle m'en a parlé hier.

C'était la première fois qu'ils venaient tous chez moi. Étions installés dans le salon ; Romain à ma gauche, Françoise à ma droite, Rémi en face de moi qui me regardait avec intensité. Depuis mon annonce , il semblait que nous nous étions rapprochés les uns des autres.

- Tu pars quand exactement ? Demanda Rémi.

Il n'avait pas douté une seconde de ce que je lui disais. Il savait que je ne plaisantais pas.

- Maman a déjà trouvé un appartement donc dès que nos affaires ici seront réglées.

Je sentis ma gorge se nouer à mesure que je continuais.

- Connaissant ma mère, ce sera dans quelques semaines.

Le bras que Romain avait passé autour de mes épaules me sembla soudain insupportablement pesant, aussi je me dégageais. Face à leurs regards tristes, je ne pouvais plus tenir :

- Peut-importe, ne perdons pas le temps qu'il nous reste.

Je fus agréablement surprise par l'intonation de ma voix, curieusement stable et forte. Probablement m'étais-je habituée à ce genre de situations.

Nous avons donc passé le restant de la journée à nous amuser ensembles. Nous étions tellement heureux que j'en oubliais presque la déchirure sourde que je ressentais. Ce n'est que lorsqu'ils partirent tous que le sentiment de solitude refit surface. Je m'isolait alors dans ma chambre et regardait passivement toutes les vidéos qui me passaient sous la main pour l'oublier.

Le repas du soir fut particulièrement désagréable. Je mâchais mécaniquement sans sentir le goût des aliments. Pourtant, malgré mon attitude plus que dissuasive, ma mère tenta d'établir le contact :

- Tu as vu tes amis aujourd'hui ? Me demanda-t-elle.

Je me retint de lui répondre que oui, je les avais vus ; peut être pour la dernière fois à cause d'elle. A la place, je me contentais d'acquiescer.

- C'est important pour moi ce déménagement Anni. Comprend-moi.

Elle avait utilisé les mots les plus malvenus, cette fois j'explosais.

- Comprendre quoi ? Tu ne m'explique rien !

Je comprend juste que pour la première fois de ma vie j'ai de vrais amis et tu veux encore partir.

Le regard obstinément tourné, je sentais mon cœur s'affoler tandis que j'attendais sa réponse.

- Il faut que l'on parte.

EN une seconde j'étais debout, absolument dépitée.

- Je vois, dis-je froidement, prête à m'enfermer dans ma chambre. Une fois de plus, elle m'avait déçue par son manque de confiance en moi. Pourtant elle essayait vraiment cette fois. Aussi, elle me rappela.

- Si je ne pars pas, commença-t-elle, je vais devenir folle.

Sa voix tressaillait et ses yeux grands ouverts me fixaient intensément.

Alors elle me raconta comment à ma mort de mon père à l'âge de 10 ans elle avait perdu pied. Nous étions allées vivre chez ma tante et elle s'était occupée de nous deux. Un an plus tard, ma mère allait mieux, en façade tout du moins. Intérieurement, elle était dévastée. C'est à partir de là que nous avons commencé à voyager ; parce qu'elle ressentait le besoin pressant de fuir un sentiment de solitude qui revenait sans cesse. Elle m'expliqua enfin que cette fois, si elle voulait revenir chez ma tante c'était pour renouer avec sa famille. Cette fois-ci, elle voulait vraiment s'établir quelque part.

Nous avons terminé dans les bras l'une de l'autre. Incapables désormais toutes les deux de reculer.

Le lendemain, Françoise nous annonçait qu'elle partait aussi. Malgré nos efforts à tous, le harcèlement n'avait pas cessé et elle espérait prendre un nouveau départ dans un nouveau lycée.

Pendant tout ce temps, j'avais eu de moins en moins de contacts avec Romain. Nous essayions tout deux de maintenir notre relation mais l'annonce de mon départ imminent avait tout chamboulé.

Et finalement, à la mi-août de cette année, je partis.




« Salut Anni,

J'espère que tu t'habitue à ta nouvelle vie. Tu nous manque beaucoup, à moi surtout.

J'ai une autre raison pour laquelle je t'envoie ce message. Je n'ai pas été honnête avec toi et je le regrette d'autant plus que maintenant il est sûrement trop tard. C'est moi qui t'ai envoyé ce message anonyme en début d'année. Sans doute un peu trop vite car on se connaissaient à peine. Pourtant mes sentiments n'ont pas changés. Je t'aime Anni.

Je n'espère pas que tu tomberas subitement amoureuse de moi, ni même que tu accepteras encore d'être mon amie. J'avais juste besoin d'être un peu courageux pour une fois.

Rémi. »

AnniWhere stories live. Discover now