Chapitre 1

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Pas de soleil. Que de la brume. Il pleut. Je l'entends, la pluie qui tombe juste à côté de moi. Je suis fatigué, las de travailler. J'aimerai étudier. J'essaye de me rendormir : je ne veux pas perdre une minute de sommeil. Elle me paraissent tellement cruciales. Louna dort paisiblement. Elle aussi, elle entend la pluie. J'en suis sûr et certain. Mais elle est détendue. Pendant un moment, je panique. Personne ne peut être aussi détendu dans de telles conditions. Je me demande si elle est morte. Elle bouge. Je suis rassuré. Près de moi, maman dort profondément. Je me lève. Les Magnas sont silencieux, ce matin. Pas encore de coup de fouet. Pas de cris. Je regarde l'horizon : le soleil se lève à peine. Intérieurement, je lâche des tas de jurons. Je lève les yeux au ciel. Le petit toit métallique commence à rouiller, me dis-je, alors que Louna ouvre les yeux :
«  T'es enfin réveillé ! J'ai cru que t'étais morte, pendant un moment. J'ai eu peur pour toi, imbécile !
- Oh ! Tu t'inquiètes pour moi, Erik. C'est plutôt mignon, dans un sens. »

Je déteste quand elle prend cet air là. Elle m'ébouriffe les cheveux : je m'éloigne, en la regardant de travers. Puis, je finis par sourire. Je lis dans ses yeux la flamme de l'espoir que j'ai perdu depuis longtemps. Maman se réveille à son tour. La mère de Lou fait de même. Peu à peu, le camp de New York se réveille. Les Magnas font de même. Un garde vient fouetter les plus endormis. Ma mère nous fait nous mettre au garde à vous. La mère de Louna part vers la maison du chef, ma mère la suit. Je sais ce qu'il leur fait, mais je suis incapable d'agir. Je sais que même une fois adulte, je ne ferais rien. Parce que j'ai peur. Je tremble : à la fois de peur, de froid, mais aussi de colère. Mon poing se serre. J'aurais du me jeter sur celui qui venait vers nous. Louna pose sa main sur la mienne. Je me calme : j'aime le contact de sa peau sur la mienne. Le Magna la frappe :
« Pas de contact entre humains !
- T'aurais jamais du faire ça !
- Erik ! Ne fais pas ça ! »
Je n'entends plus rien, mis à part les battements de mon cœur de plus en plus rapides. La haine, la colère, le désir de vengeance, tout se mélange et se met en ébullition dans mon corps. Je n'entends pas Louna qui me supplie. J'attrape le couteau à ma droite : ils ne sont pas futés, ces Magnas, de laisser un couteau près d'un adolescent éperdu. Je m'avance, toujours dans un silence brouillé par ma colère. Je sens les larmes de nerfs me monter. Elles resserrent ma gorge. Je vais le faire. Je ne me crois pas moi même. J'envoie mon bras. Ces quelques secondes me paraissent interminables. J'ai fermé les yeux. Je ne veux pas les ouvrir.

Les Abysses de l'HommeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant