1. Sept silhouettes

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Ses pattes puissantes foulaient le sol avec entrain, son long pelage doré tirant sur le roux virevoltant dans le vent. L'herbe folle s'inclinait sur son passage, ployant sous la forte brise. Le grand fauve bondissait, galopait avec une joie sans pareil, filant comme l'éclair. Était-ce un lion? Difficile à dire... Ce pelage épais et ces denses touffes de poils sombres se dressant au sommet de ses délicates oreilles rondes légèrement pointues ne correspondait point... Mais la forme de la queue, ce doré couvrant le ventre, les pattes et le visage, ainsi que cette silhouette à la fois souple et robuste ne trompait pas : l'apparence de ce félin s'apparentait à celle d'une lionne fougueuse et pleine de vie.

   Le fauve dérapa au sommet d'une colline, prit une grande bouffée d'air et poussa un rugissement à faire trembler la terre. Quel bonheur était celui de vivre! Elle ferma doucement ces yeux bleu-vert, laissant les bourrasques caresser sa fourrure lorsque brusquement, tout devint noir. La créature ouvrit aussitôt les paupières, alertée. Sa longue queue fouettait nerveusement le sol maintenant asséché, jonché de quelques brins d'herbes éparses et racornis. Son cœur se serra, l'affolement la fit frémir. Le noir, le noir partout. Il n'y avait aucun moyen de percer cette obscurité huileuse, gardant jalousement sous son joug les si beaux paysages présents à peine une fraction de seconde plus tôt.

— Aidez-moi! cria le félin en griffant le sol, une note de désespoir pointant dans son appel.

Nous sommes là.

   La créature fit volte-face vers la voix, légèrement rassurée. Mais la méfiance restait, pendant qu'elle scrutait l'orbe argenté flottant devant elle, auréolé d'une lumière immaculée.

Pour te guider

Pour te soutenir

Pour ne jamais désespérer

De ton cœur suis la voix

Qui auprès des Élus

Elle te mènera

   Le fauve inspira un bon coup. Les sept voix si mystérieuses lui semblaient maintenant tellement familières...

Car les cieux veilleront toujours

En déposant les héros de ces noirs jours :

Le feu, admiré, mais terré parmi les glaciers

La terre, chassée, sillonnant les boisés

Le vent, traqué, fuyant l'obscurité

L'eau, dissimulé, inconscient de ses facultés

L'un doté du sang d'un roi redouté

L'autre élu par le ciel comme messager

Et ces Élus aux cœurs purs

Du retour de la lumière, ils en trouveront la serrure

   Sept silhouettes apparurent, une aura colorée dessinant leurs chevelures, leurs vêtements, leurs traits restant toutefois sombres et difficiles à distinguer. Chacun avait entre leurs mains, un symbole étincelant d'une couleur propre, s'apparentant à des runes mystiques.

   La créature les observa calmement, et lentement, se métamorphosa. Progressivement, le fauve se dressa sur ses pattes arrière qui s'allongèrent. Son visage perdit la plupart de sa fourrure pour devenir plus délicat, de longues oreilles pointues d'elfes, toujours dotées de petites touffes de poils émergèrent d'une dense chevelure châtain roux s'apparentant à une crinière.

   La jeune félinaroise recula lorsque les ténèbres envahirent peu à peu les personnages énigmatiques, grugeant les lueurs peinturlurées avec délectation.

Coeur de Lionne *En pause*Where stories live. Discover now