Nous sommes le 28 septembre 1916.
Louis s'était assis à la table, la lettre à la main. Il l'ouvrit comme il l'avait fait la première fois. Puis il recommença à lire les premiers mots, en connaissant presque le texte par cœur.
de H. Styles
à Sommes
le 13/09/1916Louis,
Je suis arrivé en France il y a de celà trois jours. Je suis actuellement contre un talus de terre, dans une tranchée, au moment où je t'écris. Les gouttes que tu vois ne viennent pas de mes yeux mais du ciel.
Je t'ai abandonné seul à la maison, j'en suis désolé. Il fallait des volontaires pour aller se battre et je voulais y participer, pour le bien de notre pays. Pour notre bien peut-être. On arriverait peut-être, après la victoire de la guerre, à la victoire des couples de même sexe. J'espère que personne ne remarque les mots que je t'écris, on pourrait me tuer pour ça. Avec l'ambiance qu'il y a, on a la gâchette facile.
Je n'arrête pas de penser à toi, à la chaleur de ton corps alors que j'ai si froid, au bleu de tes yeux alors que notre paysage est marron, je n'arrête pas. Chaque seconde sans toi m'assome. Chaque minute sans toi me torture. Chaque heure sans toi me tue. J'ai également peur de mourir, mais j'ai plus peur encore que tu n'aurais. J'ai peur que tu m'en veuilles. Je suis seul ici. J'ai peur sans toi. Mes doigts tremblent d'effroi et de gèle. J'espère que tu arrives quand même à me lire.
Je sais que je n'ai pas toujours fait les bons choix pour nous deux, mais je te promets qu'à mon retour je t'aimerai comme jamais on ne t'a aimé. Je vais faire le plus d'effort possible pour que tu continue de m'aimer autant que tu m'aimais avant mon départ. Tu m'aime toujours? Tu t'es trouvé un autre amant? Ça me fait mal de me dire que tu es parti avec quelqu'un d'autre, mais je me dis que c'est peut-être le cas. Après tout, il faut bien combler tes envies pendant ma longue absence. Saches que moi je t'aime toujours et que je ne t'oublierai pas. Jamais. Je serai toujours tien et tu le sais. Je sais que nous sommes encore jeunes et que nous avons la vie devant nous, mais cette vie ne vaut rien sans toi. J'ai besoin de toi à mes côtés. J'ai besoin de sentir ton odeur pour m'endormir. J'ai aussi besoin de toi pour m'aider à rafistoler mes vêtements quand je les troues. Finalement, ce sont ces petits moments qui faisaient notre bonheur. Quand on se regardait pendant des heures sans se parler mais que nos yeux se communiquait tout nos mots. Ou alors quand tu préparais à manger dans ta vieille cocote et que je venais entourer ta taille de mes bras. Les baisers dans le cou, ça me manque aussi. J'aimerais embrasser chaque parcelle de ton corps à l'instant même. J'aimerais t'enlacer du plus fort de ma douceur. J'aimerais te faire l'amour comme nous ne l'avons jamais fait. Je veux juste t'aimer. T'aimer. Et t'aimer encore. Envoies moi ton amour de où tu es. J'en ai besoin. J'en aurai toujours besoin. J'en aurai besoin pour revenir. Et quand je serai là, je t'aimerai encore plus, et plus encore, chaque jour, chaque heure, chaque seconde.
Tu me manque autant que tu étais là pour moi, c'est à dire énormément.
Je ne t'oublie pas, je t'aime, et je pense à toi.À jamais dans mon cœur
H. SLouis avait encore une fois senti chaque lettre frapper son cœur d'un immense et même regret de ne pas avoir retenu Harry dans sa course. Maintenant qu'il est parti, il sait qu'il aime, qu'il lui manque et qu'il ne le remplacera jamais.
Il replia alors la lettre et la redéposa dans son enveloppe. Il retourna dans sa chambre, en laissant le mot sur la table pour le relire peut-être une ou deux heures après.