Chapitre cinq

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Erudita

La valise de Roméo était prête depuis un moment déjà. Elle gisait sur le sol dans le couloir cela faisait une éternité... Sa mère s'était occupée de tout, mais son fils ne pouvait s'empêcher de la questionner sur le contenu. En effet, aujourd'hui allait être son premier jour au Royaume, et rien ni personne ne l'empêcherait de s'évader de sa routine monotone.

Quand les douze coups de midi retentirent dans les rues, comme un appel à l'ordre, le jeune homme se précipita vers son sac, le prit à la hâte et sortit en courant, trop pressé de s'en aller de sa prison. Un carrosse se tenait en face de la porte. Les chevaux noirs et grands se tenaient fièrement à l'avant retenus par un vieillard presque invisible. Cette calèche si impressionnante allait le mener vers la liberté. Roméo allait enfin s'envoler. Quand il s'approcha, il découvrit sa mère, qu'un voile transparent dissimulait. Il s'arrêta devant elle. Elle pleurait. Même si il n'avait pas été proche de sa mère lors de son adolescence, il la prit dans ses bras. Ce fut une longue, sincère et chaleureuse étreinte, qui réchauffait le climat tempéré. Quand ses sanglots furent calmés, et devinrent presque inaudibles, il embrassa sa joue. Les pleurs avaient repris de plus belle et Roméo s'éloigna un peu de sa mère. Il avança ensuite vers son grand frère, qui flottait dans ses vêtements trop grands pour lui.

Il n'eut pas le temps d'embrasser son frère que le cocher, un vieil homme rond à l'air suffisant le poussa à l'intérieur.

Le garçon eut un premier aperçu de ce que représentait la vie de luxe à la capitale. En effet, bien que la calèche lui eut d'abord paru simpliste, presque triste vue de l'extérieur, l'intérieur quant à lui, était merveilleusement spacieux et richement décoré ; ce qui ne manqua pas de flatter l'ego déjà immense du jeune homme.

Il s'assit sur l'une des banquettes recouverte d'un tissu de velours rubis.
Une bougie dont la flamme frétillait par moment, était enfermée dans une prison de verre, créant une atmosphère tamisée, également due à l'absence de fenêtre.

Il faisait incroyablement chaud a l'intérieur, alors Romeo avait sorti un des livres de son sac ; car il avait omis son éternel éventail, et commença à l'agiter, créant un faible courant d'air.
Plus il le secouait et plus ses joues perdaient de leur rougeur, qui allait pourtant si bien à ce teint porcelainier.

Comme il était occupé à ne rien faire, ou du moins, à se rappeler des heures désormais révolues de sa vie, une image, un souvenir vint lui chatouiller l'esprit.

Le jour précédent, avant son départ, alors qu'il lisait un livre après un fort ascenseur émotionnel, il s'était assoupi, rêvant de sa vie au Royaume, imaginant la carrure que pouvait, ou du moins devait, avoir un soldat.
A son réveil, une parfaite représentation de ce dont il avait songé se tenait au pied de sa porte et le fixait... intensément.
Sa carrure qui aurait fait pâlir de jalousie Apollon, laissa le jeune garçon troublé. Ses joues quasi-creuses, se laissaient colorer de pigments rouges. Il le trouvait si beau. 

Roméo resta quelques instants bouche bée, avant de calmer ses esprits et de poser son livre sur la petite causeuse près de lui. Il descendit de la rambarde et alla vers la porte de sa chambre. Lorsqu'il posa sa main sur la poignée, il se rendit compte que cet homme; ressemblait comme deux gouttes d'eau au capitaine de la garde royale ; l'ennemi de sa famille, mais également son idole. 

Ne voulant pas perdre d'occasion, il descendit les marches de l'escalier à toute vitesse, manquant de renverser un vase, et quand il arriva enfin dehors, plus personne n'était là. 

"Merde", murmura-t-il dans la calèche.

Le cocher ne l'avait pas entendu. C'était le genre de vieil homme à se mêler et à juger les affaires qui ne le concernaient pas. Sur le siège de velours, le garçon ne voyait plus la chance qu'il avait d'être entouré de tant de luxe. Il ne pensait qu'à cet inconnu inaccessible. Il prit un des coussins qu'il avait près de lui et le serra contre son corps.

"Merde"

Il s'allongea sur la banquette et ferma les yeux. Il s'endormit rapidement, mais pendant toute la durée de son paisible sommeil, il ne rêva que du garçon aux cheveux d'or.


Roméo et RoméoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant