Debout dans le vent glacial, mains dans les poches, a regarder le paysage enneigé qui s'étend devant elle, une forme humanoïde soupire, laissant un nuage discret de condensation brouiller sa vue un court instant. Le froid ne lui fait rien. Ses joues, ses oreilles et son nez sont rougis par cette température négative. Mais pourquoi s'en préoccuper ? Le regard perdu sur ces étendus blanches, ses oreilles noyée dans le silence de la nature endormie, elle laisse s'échapper les secondes.
« Pourquoi faire ? » se dit-elle en sortant l'une de ses mains gantées pour attraper un des flocons qui virevoltent devant ses yeux. « Tout cela ne sert à rien. Personne ne me croirait. » Un craquement se fait entendre dans son dos, la forme se retourne. Rien. Seule la neige vierge. « Tout cela est sans valeurs à leurs yeux. » Nouveau soupire, elle brise le flocon en refermant sa main fatiguée, avant de la passer sur son visage éreinté. Du sommeil, que ne donnera-t-elle pas pour une nuit sans rêves. Sans ce même cauchemar ?
Voyance, sensations, pressentiments... Pourquoi faire alors ce même rêve en boucle ? Pourquoi frôler la crise cardiaque chaque soir ? Debout devant son miroir, cette chose bipède se regarde. Visage marqué par le temps, corps amaigri, yeux cernés, reposant sur des poches témoignant d'un manque critique de sommeil, une barbe brune mal entretenue parsemée de quelques nuances grises, cheveux gras ramenés en arrière. Cet homme n'est plus que l'ombre de lui-même. Une chose qui ne peut plus être considérée comme humaine. Il avale ses cachets, et va rejoindre son lit pour accueillir, encore une fois, ce cauchemar récurrent.
Il ouvre les yeux. Evidemment son lit, sa chambre, son petit appartement, ont disparu. Il est debout. Tout est noir autour de lui. « Encore une fois... » Il tâtonne à sa droite, jusqu'à rencontrer une surface lisse et froide, avant de se mettre en route, laissant sa main le guider dans ce monde aveugle. A force d'arpenter ces couloirs, il commence à comprendre où il doit aller.
Il marche. Seul. Le rythme de son pas régulier que lui renvoie l'écho pour seule compagnie. Jusque là tout va bien. Ici, il est en sécurité. Alors pourquoi chercher à aller plus loin ? Peut être parce qu'au fond de lui, cet endroit ne le rassure pas tant que ça. Le silence absolu, l'invisible... Il ne peut pas l'atteindre ici. Mais cela veut aussi dire qu'il ne peut pas obtenir plus d'informations.
Il s'arrête. 189 pas. Il tend l'autre bras. La porte est belle et bien là. Il reste un moment statique. Une fois cette dernière ouverte, c'est finit. L'homme prend une grande inspiration, ferme les yeux, et pousse l'un des battants de cette porte de fer, tel un condamné qui monte la première marche de l'échafaud. Un grincement strident vient perturber le silence.
Derrière, c'est le même spectacle, le même décor qui baigne dans cette pénombre grise. Ce sal labyrinthe de miroirs. Il avance calmement malgré la tension grandissante dans ses épaules. Il se souvient de sa première fois ici. Paniqué, il a couru dans tous les sens sans prendre garde aux signes. Il ignorait le danger. Puis deux, trois, quatre... Il a arrêté de compter. Maintenant il sait. Il a compris le modèle de ce premier endroit. Si tu croises des yeux qui ne sont pas les tiens, ne tourne pas le dos, recule juste, en ignorant ce regard, puis tourne à droite s'il vient d'en face, ou à gauche s'il vient d'un des miroirs latéraux. Répète la manœuvre, encore et encore.
Il s'arrête, baisse les yeux pour fuir ceux qui lui sont désormais si familier dans son reflet. Il recule, puis tourne à droite. « Respire, tout vas bien. » Il arrive à la fin de la première partie, il ne la connaît pas encore par cœur, sinon il n'aurait pas croisé ce regard qui l'effraie. Ce regard sombre et... si perturbant. Aucune animosité ne s'en échappe, pourtant il reste effrayant. Comment le décrire ? Même en le croisant si souvent, il l'ignore. Ce regard peut... comme lire en vous. Il peut sentir la peur, tout comme il peut l'instaurer. C'est votre reflet, mais ce sont des yeux étrangers. Qui ne vous veulent pas de mal. Mais qui ne vous souhaitent pas de bien non plus. Il frémit, un courant d'air lui parvient alors qu'il arrive aux escaliers.
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Distorted Reflection (fr)
Mistério / SuspenseQue se passerait-il si vous faisiez le même rêve en boucle, mourrez, et recommencez ? Encore e toujours le même, sans pouvoir vous enfuir ? Sans pouvoir vous défendre contre l'être qui l'habite ? Oliver est enchaîné, incapable d'échapper à ce quotid...