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La veilleuse fonctionne.
Je la pose sur la table de nuit. Au moment où je me redresse pour partir, Stella réouvre les yeux et me fixe d'un regard accusateur. Ou furieux ? Non, plutôt troublé...

- Quoi ? Dis-je. Qu'est-ce qu'il y a ? Il faut dormir ma puce.

-Mais, maman...

-Qu'est-ce qu'il y a ? Explique moi chérie.

-Et Pussy, alors ?

Pussy, le chien de la famille. Notre springer anglais, que Stella aime beaucoup.

-Est-ce que Pussy va venir avec nous en Écosse ?

-Bien sûr ! Ne t'inquiète pas, on ne va pas le laisser ici tout seul... Bien sûr qu'il vient avec nous !

Stella hoche la tête, rassurée. Ses paupières se referment, elle serre fort Leopardy, et je ne peux m'empêcher de l'embrasser une nouvelle fois. Je suis devenue beaucoup plus attentionnée qu'avant.

Avant c'était Marc le plus affectueux de nous deux, celui qui faisait les câlins et les bises, tandis que moi je montrait l'amour que j'ai envers elles en les habillants, les nourrissant. Maintenant, j'embrasse ma fille, la seule qu'il me reste.

La peau clair de Stella est constellée de tâches de rousseur. Au moment de lui donner un baiser, je la hume : elle sent le dentifrice et vaguement le maïs qu'elle a mangé. Son odeur est aussi celle de Lady. Elles avaient la même quoi qu'elles fassent.

Je l'embrasse une troisième fois pour nous rassurer toutes les deux, et lui murmure un dernier «Dort bien». Je sors doucement de la chambre, mais alors que je tire la porte, une pensée dérangeante me traverse l'esprit : le chien.
Pussy.

Quelque chose me perturbe à son sujet, sans que je puisse dire de quoi il s'agit.
Immobile dans le couloir, j'essaie de rassembler mes pensées.

Nous avons acheté Pussy, il y a 3 ans. À l'époque on avait les moyens de s'acheter un chien de race. C'était l'idée de Marc : il voulait un chien quand nous auront un vrai jardin, un chien que nous pourrions promener, dont nous serons tous proche.

Marc l'adorait, les jumelles aussi. Quand À moi, j'aimais voir mes deux blondinettes sautiller autour de ce beau chien roux, qui gambadait joyeusement autour d'elles.

Adossée au mur, je ferme les yeux pour mieux réfléchir. J'entends des bruits provenant de la cuisine : des couverts qui s'entrechoquent, ou peut être un tire bouchon qu'on range dans un tiroir.

Qu'est ce qui cloche avec Pussy ? Pourquoi la seule mention du mot «chien» suscite elle en moi un malaise diffus, dont je n'arrive pas à saisir la cause tant il se fond dans la masse des souvenirs douloureux ?

Reprends toi, Sophie, me dis-je en rouvrant les yeux. Je vais descendre, bavarder avec Imen, boire un etre de bon et aller me coucher. Et demain, Stella – car c'est bien Stella– ira à l'école avec son cartable rouge et son pull noir. 

Imen m'attend dans la cuisine, assise au comptoir. Elle me sourit, légèrement éméchée, découvrant ses dents blanches et régulières, tachées toutefois par le tanin du vin rouge.

-Marc vient de filer, m'annonce-t-elle.

-Ah bon ?

Questionnement... Où les histoires vivent. Découvrez maintenant