C'était une fin d'après-midi d'automne assez fraiche. Un vendredi soir typique où Lina allait chercher sa nièce au service de garde. Il était environ 16h lorsque Lina franchissait la clôture de l'école Jolicoeur. La petite Mathilde avait un peu trop l'habitude de la routine de sa tante. Elle attendait déjà à côté de son éducatrice avec son sac d'école et sa boîte à lunch en regardant sa montre. Elle faisait un signe à sa tante, disait au revoir à ses amis et son éducatrice, puis partait enjouée. La routine était excessivement importante pour Lina et sa nièce. Après l'école, tous les vendredis, elles allaient faire l'épicerie pour la semaine suivante puis rentraient à la maison. Ensuite, c'était les devoirs de la semaine suivante pour Mathilde, le souper, puis une activité sportive pour les deux. Seulement, cette soirée-là, après l'épicerie, lorsque Mathilde et sa tante rentrèrent à la maison, Carlos, leur beau Beagle de 3 ans ne jappait pas. Il y avait aussi une excellente odeur qui leur chatouillait les narines lorsqu'elles ouvrirent la porte d'entrée. Il y avait en plus de tout cela un beau grand rire grave et une petite voix de femme qui provenaient du salon.
« -Grand-maman, grand-papa, s'écria Mathilde toute heureuse.
-Bonjour ma puce, comment allez-vous les filles? Les interrogea tout de suite Giovanni.
-Quelle surprise de vous voir, on ne s'attendait pas du tout à ce que vous veniez, lui assura Lina »
Maria et Giovanni, de leurs prénoms vivaient en Italie. Ils avaient vécu tous deux leurs enfances en Italie, puis avaient eu leurs trois enfants au Canada. Lorsque leurs deux filles et leurs fils avaient atteint tous les trois leur majorité, ils étaient retournés vivre en Italie, mais revenaient une ou deux semaines par année au Canada rendre visite à leur fille et leur petite fille. Jusqu'à ce moment-là, ils avaient toujours annoncé leur venu à l'avance, mais cette fois-ci, ils voulaient briser un peu les habitudes trop routinières de leur fille. Ils étaient donc arrivés à l'improviste et avaient l'intention de rester jusqu'à ce qu'ils veuillent rentrer en Italie.
Lina partageait sa maison avec la petite Mathilde et Carlos, mais la maison était bien trop grande pour deux personnes et un chien, donc la visite était toujours bienvenue chez eux. Les parents de Lina en particulier remplissaient chaleureusement la maison. La succulente cuisine de Maria faisait raffoler tout le monde et les blagues de Giovanni mettaient tous de bonne humeur. Cette soirée-là, ils mangèrent le traditionnel spaghetti de Maria avec de la tarte aux pommes, comme dans chaque soirée automnale digne de ce nom. Une soirée joviale, sans routine, une Mathilde tout à fait rayonnante. La fillette de 8 ans était pour une des rares fois dans sa vie sortie de sa routine. Elle s'était couchée tard et n'avait pas fait de sport.
Mathilde était une petite fille maigrichonne. Elle avait de jolis yeux bleus qui faisaient ressortir son mince visage et ses cheveux noirs. La fillette était tellement petite qu'elle pouvait aisément se faire passer pour une enfant de cinq ans. Pourtant, elle était pleine d'entrain. Certes elle paraissait très timide, mais on ne pouvait l'arrêter, elle devait toujours avoir quelque chose à faire.
Le lendemain matin, Lina travaillait. Une enquêteuse assez réputée se devait de travailler durant les fins de semaine. Lorsque Lina travaillait la fin de semaine ou le soir, Mathilde se faisait garder chez des voisins qu'elle n'aimait pas vraiment. La mère de la petite Mathilde, Sara était décédée deux mois après la naissance de celle-ci. Comme le frère et les parents de Sara vivaient en Italie, Sara avait demandé à ce que la petite soit confiée à sa sœur, soit la tante de l'enfant. Le père de Mathilde l'ayant toujours renié ne s'était jamais mis le bout du nez dans le décor de sa fille et c'était probablement mieux comme ça. Personne ne savait ce qu'il était devenu. Il n'avait même jamais vu sa propre fille, sauf qu'il connaissait son existence.
