Prélude 1 / 2

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Les feuilles tombent, emportées par le vent. La vie les quitte peu à peu, elles sont piétinées sans la moindre attention.

Julia ne savait ni comment ni pourquoi tous ces sourires n'étaient qu'illusions. La tendresse qu'il avait daigné montrer, l'amour qu'il disait lui porter, tout était faux sans exception. Pourquoi ?

Pourquoi était-elle allongée dans cette neige maculée de son sang ? Pourquoi l'avait-il conduite ici ? Pourquoi étaient-ils venus le rejoindre ? Julia sentait encore leurs mains sur son corps. Le goût de l'alcool sur leurs lèvres.

Que lui avait-il donné dans ce verre ? Ses membres, son esprit s'étaient endormis. N'était-elle qu'une poupée à leurs yeux ? N'était-elle pas humaine ?

Aimait-il l'entendre le supplier d'arrêter, de l'épargner ? N'était-ce pas assez ? Ne lui avait-elle pas tout donné ? Pourquoi avait-il fallu qu'il la partage avec eux ?

Il l'avait jetée comme un déchet, recouverte des empreintes de leurs mains. Le vent mordait sa peau, mais n'arrivait pas à masquer les ecchymoses qui balafraient son corps.

Combien de temps lui restait-il ? Très peu, l'espérait-elle. Comment pourrait-elle vivre avec ce fardeau ? Sa fierté, sa dignité : tout était détruit. Ils avaient tout pris.

Si elle survivait, son reflet ne serait que l'ombre de ce cauchemar.

Allongée sur le dos, la jeune femme fixait sans ciller les nuages gris entraînés par le vent glacial. Les cumulus devenaient de moins en moins nombreux. Sa vision et sa respiration se troublaient.

La douleur qu'elle ressentait, si vive... si atroce ne faisait qu'attiser la colère qu'elle leur vouait. Elle le haïssait, elle les haïssait.

Elle entendit la neige se tasser sous le poids d'un intrus. Elle comprit qu'il se rapprochait avec rapidité. Un pas lourd, de grandes enjambées.

— Non ! Non ! s'était-elle mise à crier, murmurer.

Son corps tremblait telle une brindille à contrevent. Sa respiration s'emballait et son cœur battait à tout rompre. Sa cage thoracique se serra à tel point qu'elle en souffrit.

Une ombre se dessina dans la neige. Une main s'approcha et se figea dans le vide à mi-chemin en direction de son visage. Elle vit la masse ondulée jusqu'à ce qu'elle sentit un manteau recouvrir son corps dénudé.

Une sensation de réconfort l'enveloppa. Mu par la peur, son corps ne cessait de trembler. Lorsque l'inconnu tenta une nouvelle fois de se rapprocher, elle se recroquevilla.

— Je... Je ne vous ferai rien de mal. N'ayez pas peur.

Sa voix, rauque et profonde semblait sereine, dépourvue d'un quelconque intérêt malsain. Néanmoins, elle n'était pas en mesure de lui faire confiance. Il s'avança encore, Julia le vit à sa silhouette qui grandissait sous ses yeux.

— Ne... Ne me touchez pas !
— Je suis désolé. Ce n'est pas possible. Je ne peux pas vous laisser comme ça.

D'un seul mouvement, cet homme qu'elle détestait déjà la souleva. Elle se débattit autant qu'elle le put, jusqu'à ce que la prise de l'homme devint plus dure et qu'il n'entrava ses gestes.

Seulement quelques secondes s'étaient écoulées. Compressée contre son corps, sa prise était telle que chaque blessure, chaque bleu était soumis à une pression lorsqu'elle bougeait. Cependant, si elle restait immobile, elle ne ressentait aucune douleur.

La jeune femme savait qu'il était vain de lutter. Cet homme ferait ce qu'il voudrait d'elle. Elle n'avait plus la force ni l'envie de réagir. Le bras de l'inconnu glissa sous ses jambes. Il la fit basculer. La froideur de la neige délaissa son corps.

Pour une raison qu'elle ignorait ou simplement parce que sa raison avait enfin décidé de l'épargner de ce calvaire, ses paupières devinrent lourdes, à bout de force, elles abandonnaient.

Privée d'aimerWhere stories live. Discover now