Doctoresse

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      Le ronron aussi familier qu'insupportable de mon professeur d'économie parlant des bienfaits du libéralisme en cette première heure de ce dernier lundi de mars n'était pas le bruit de fond idéal pour faire ma sieste. J'étais épuisé, mes notes encore plus mal écrites que d'habitude se brouillaient devant mes yeux contre lesquels je luttais pour les maintenir ouverts. Ils gagnaient. J'avais l'impression d'avoir une gueule de bois à des kilomètres sous l'eau tant l'étau qui serrait mes tempes était fort. Pourtant, je n'avais pas bu. La plupart du temps je m'en souviens. Là j'étais juste fatigué, j'avais tout simplement mal dormi, c'est récurent chez moi. Du coup mon corps voulait rattraper tout ça.

"Hey Cédric,regarde comme c'est le moment idéal pour dormir !"

Je soupirai et en tentant d'ignorer la voix éraillée par les siècles de tabagisme de M.Vincent, je m'appuyai sur mon poignet qui aura certainement la circulation coupée et sera douloureux et engourdi au reveil, mais je n'avais pas le choix, je ne pouvais pas m'écrouler sur ma table.

Je fus réveillé parce qu'il me semblait au premier abord un phoque qui avait soit un orgasme ravageur soit un accouchement douloureux. Avec un temps de retard par rapport aux 34 élèves présents, je me tournai vers la source de bruit qui était Jade un rang derrière.

Elle respirait mal, cherchant de l'air, ou au contraire en prenant beaucoup trop. Elle pleurait, était crispé mais tremblait. J'étais inquiet. il y a quelques jours, elle avait fondu en larmes en plein cours et avait été obligée de sortir. Plus tard j'ai appris que ses parents divorçaient et qu'elle le vivait très mal. Je connais Jade depuis le collège : elle a toujours été une grande stressée. Avec ce qui lui arrivait en plus du bac qui approchait je pense qu'elle a craqué. Je vis Laure se lever, très calme comparée à la classe qui s'affolait et devenait bruyante d'élèves qui commentaient la situation. Elle se dirigea vers la pauvre fille au fond,prit la table vide à côté de moi et la poussa contre celle de Jade. Laure grimpa dessus et s'y installa en tailleur, en tenant une trousse à la main.
Malgré un ton posé, elle s'exprima avec une certaine autorité, allant droit au but.

"- Jade, tu as bu ou pris de la drogue dans la journée ? Juste être à coté de mecs qui fument de la beuh ca compte.

- Putain mais t'es sérieux mec ?"

C'était l'intervention de Damien Cassandre, qu'il a dû juger indispensable.

"- Alexandre, retourne à ta place. Damien tu ne parle pas comme ça, tout les autres vous vous calmez et Eva, c'est toi la déléguée non ? Emmène Jade à l'infirmerie pour qu'elle calme sa crise d'asthme."

Le bruit grimpait beaucoup. Notre prof a voulu ramener le calme mais c'était peine perdue. Il a juste rappelé à la classe qu'il ne savait pas gérer les situations de crise. Depuis les 3 ans passé à l'avoir en élèves, il aurait du savoir que Jade n'avait aucun antécédent asthmatique, Elle est sportive en plus. Et si c'était vraiment de l'asthme, Eva aurait plutôt pu lui donner un de ces deux inhalateur qu'elle a toujours sur elle. Il a rappelé aussi qu'il ne voyait pas Laure telle qu'elle est mais en tant qu'Alexandre alors que ça fait 2 ans que Laure nous a demandé de la considérer comme une fille, de ne plus l'appeler par le prénom que lui ont donné ses parents. Elle affirmait qu'elle se sentait fille, qu'on avait rien à dire mais qu'on pouvait faire l'effort de respecter ça. J'ai pas trop compris, mais j'ai respecté ça. Pas tout le monde. C'est dommage je trouve, on se connaît tous plus ou moins, on est dans un petit lycée du Sud-Est, on a presque tous fait le même collège voir la même primaire et maternelle. J'ai fait la sieste dans un dortoir accompagné de doudou avec certains présent dans cette pièce, et maintenant ce sont des connards.

Malgré le fait que je sois le plus proche des trois filles, je n'entendais presque rien à ce qu'elles chuchotaient. J'ai juste compris que Laure demandais à Eva si Jade avait des allergies. Laure fouillait dans sa trousse son contenu me perturba : des cachets, des flacons des feuilles et un grinder. Pas un bon mélange. Jade, elle, était toujours dans un état déplorable, en panique, gémissant qu'elle n'y arrivait pas, qu'elle n'en pouvait plus. Laure sortie finalement un flacon et à ma surprise, se tourna vers moi et me dit du même ton calme qui attendait pas de contestation :

"-Tu me remplis ça jusqu'à 8, pas plus"

Je regardai le creux de sa main et me brusquais aussitôt

"- Bordel ! Tu vas pas la piquer quand même !

- Cédric, ne cri pas c'est une pipette, pas une seringue"

Je senti le bout de mes oreilles rougir, j'avais vraiment cru qu"elle me tendait une seringue.

En attendant elle me présentait toujours la pipette graduée avec le flacon pour la remplir, quand je m'en saisis elle répéta :

"-Jusqu'à 8, pas plus"

Elle se retourna vers Jade. Je devisais dans le chaos de la classe, le prof ne s'occupait même plus de nous quatre. Il tentait vainement de ramener le calme. Et pendant que certains discutaient, donnaient leurs avis ou essayaient de savoir ce qu'il se passait, moi je remplissais une pipette avec un calmant dont j'aurais du m'y reprendre à plusieurs fois pour dire le nom à haute voix. Une fois fini, je rebouchais le produit et à cet instant Laure demanda pour la 1er fois le silence, à part moi, sa patiente et Eva, qui l'assistait personne ne l'entendit. Elle redemanda le calme plus fort cette fois, on l'ignora juste cette fois, même moi je commençais à être mal à l'aise par un tel niveau sonore . Lachant un profond soupire, elle regarda ma déléguée.

"-Eva, debout et éloigne toi du bureau"

Cette dernière s'exécuta sans question et Laure pris sa table par dessous et l'envoya valser, emportant avec elle la chaise qui vient s'écraser contre l'armoire métallique présente au fond les chutes engendré produisirent un vacarme monstre qui réduit la classe au silence mis à part Jade qui respirait et pleurait toujours aussi fort

"-Maintenant vous fermez tous vos gueule, elle a besoin de calme"

M.Vincent fit une drole de grimace, il avait sans doute du mal qu'une élève de 17 ans puisse imposer un tel silence quand lui n'y arrivais pas.

"-Alexandre ! Comment o-

-Ca vallait pour vous aussi Monsieur"

Cette fois c'était Eva qui avait parlé, elle était debout à côté de Laure et Jade qui se faisait rassurer et expliquer l'effet du calmant. Damien et les garçons autour la sifflèrent. Il était vrai qu'elle avait une certaine classe ainsi, droite, bras croisé après avoir fait taire un professeur. Niveau femme noire forte, elle avait du niveau.

Je pense que j'étais le seul à avoir remarqué que sa converse gauche était éclaboussé par l'encre qui semblant provenir d'une cartouche d'encre qui a explosé quand Laure a jeté la table.

"-Cédric ? C'est bon ?"

Laure me tendais sa main où j'y glissai la pipette rempli même pas au tiers malgré le fait qu'elle ne soit pas plus grande que la paume de ma main. Elle lâcha un juron à mon égard en me lançant un regard noir. En la regardant vider un peu du produit par terre je compris que j'avais sans doute dépassé la graduation du 8. Laure vient vider le contenue restant sous la langue de Jade puis sauta au sol, saisi délicatement ses mains et aida une Jade encore tremblante à se lever.

"-On va marcher un peu et respirer, d'accord ? Eva ? Cédric ? Si vous nous prenez les cours vous seriez des amours !"

On ne répondis pas, un silence lourd pesait, contrastant avec le désordre présent il y avait quelques minutes de cela. Jade respirait un peu mieux et les sillons creusés sur ses joues semblaient moins inondés.Eva ramassa le contenu de sa trousse qui avait volé en pestant contre l'encre présente sur le tissus violet qui protégeait son pied pendant que Laure rangeait son calmant avec les autres médicament de sa trousse. Moi je mettais la table sur laquelle Laure s'était assis. Au moment où j'allais aider Eva, Laure m'interpella :

"-J'aurais pas du t'insulter, excuse moi. Merci Cédric"

Victor et Damien crièrent "Gay" en même temps et rigolèrent en se tapant dans la main avant de me fixer avec un grand sourire.

Laure sortit en emportant Jade à sa suite, qui haletait et hoquetait encore.

Personne ne dit rien pendant de longues secondes. M.Vincent semblant perdu.
En retournant à ma place après un sourire pour Eva qui m'avait aidé à ranger le bazar du fond de la classe je pensais à la quantité de substance qu'avait Laure sur elle, à la manière dont elle avait su garder son calme et gérer la situation alors que c'était le premier événement du genre. Peut être pas pour elle. Je fronçai les sourcils d'inquiétude.

C.QUILLACQ

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⏰ Dernière mise à jour : Mar 26, 2018 ⏰

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