Y'a pas à dire... Jonas a quand même un sacré cul dans son petit pantalon de sport blanc qui épouse parfaitement son corps d'athlète.
Ça, c'est ma pensée de l'instant, les yeux ostensiblement tournés vers de jolis horizons virils et musclés qui se chamaillent pour un ballon ovale. Le football américain, sport de brutes où le kilo de viande pèse plus dans la balance que celui de cervelle, je dois le reconnaître. Mais c'est à ça que s'entraîne mon nouveau petit ami, à l'instant où je le mate, quand moi, je suis aussi censé m'entraîner pour la nouvelle chorégraphie de l'équipe de chearleaders dont je fais partie.
- "Megan, le porté !"
Mais Megan n'est plus avec vous les amis. Je mate, bon sang ! Et je suis tellement ailleurs que forcément, le porté... Il foire. Voyez la tête de la garce qui nous sert de leader. Voyez ses sourcils se froncer et son nez trop parfait se plisser. Jane Miller. Je la hais de manière viscérale, et c'est réciproque.
- "Désolée. On le refait."
Je reste calme. Pas elle.
- "Non, on ne le refait pas. Je peux savoir qu'est-ce que tu foutais ? Si une fille se tord une cheville ou se claque un truc à cause de toi, j'te promets que ta place dans l'équipe, déjà discutable cela va sans dire, va disparaître."
Les autres filles nous observent en susurrant. J'accueille cependant la remarque avec un large sourire parfaitement agaçant, comme je sais si bien le faire :
- "Ne sois pas si aigrie, Jane. Ce n'est tout de même pas de ma faute si Jonas préfère mes fesses que les tiennes maintenant."
L'équipe se met à glousser. Certaines se retiennent carrément de rire genre "non, elle a vraiment osé ?". Bien sur que j'ose. Qu'est-ce que je n'ose pas, de toute manière ? Je ne suis pas vraiment réputée pour avoir la langue dans ma poche, ni pour être sur la retenue. Et elle le sait très bien, la Jane. Elle sait aussi très bien que son poste de leader de l'équipe pourrait bel et bien lui échapper, parce que je convoite cette place depuis peu et que j'en ai fait la demande. Étant une excellente élève, et fille du meilleur ami du proviseur... Je crois que ça se tente, non ?
Son visage se déforme d'une expression un peu flippante. Elle veut me répondre quelque chose qui aurait pour but de m'enterrer pour de bon, mais je la coupe :
- "Ne réfléchis pas trop à la réponse, tu fais fumer le peu de neurones nageant dans l'espace béant qui trône entre tes deux oreilles."
Je la termine ainsi. L'entraînement est fini de toute manière :
-"Les filles, c'est l'heure du vestiaire !"
Nous tournons les talons, Jane fermant le groupe, le visage rouge d'une colère qui me retombera dessus au moment le moins attendu, j'en suis certaine. Mais je m'en fiche, là, tout de suite parce que vous savez quoi : c'est le week-end ! Dans le vestiaire, c'est un brouhaha de discutions tandis que nous prenons nos douches. Les filles ressassent mon altercation avec Jane, mais je ne les écoute plus. Enroulée dans ma serviette de coton blanc, mes yeux lisent ce texto que m'a envoyé ma mère, il y a maintenant une heure :
Ton père a été placé en quarantaine a l'hôpital de Waukesha Nord. Rien de grave, mon chat. Ne t'inquiète pas. Je te tiens au courant, dès que j'ai plus d'infos. Bisous.
Mon père est docteur biologiste au Wisconsin Viral Research Group. Son truc à lui, ce sont les petits micro-organismes agressifs... Il maîtrise la virologie mieux que personne, si bien qu'il est réputé dans tout le pays, notamment pour ses recherches concernant le virus du SIDA. Quel métier passionnant. Doutez donc vous bien que pour le coup, les quarantaines, on en a l'habitude à la maison, alors je ne m'inquiète plus. Je réponds au texto de ma mère par un simple "Ok", et file à l'extérieur du vestiaire, suivie de près par ma copine Leïla, une brunette plantureuse et bavarde. À la sortie du lycée, après son monologue qui m'aurait presque filé mal au crâne, elle pense pouvoir rentrer avec moi mais : qui est-ce qui m'attends le cul divin, posé sur le capot d'une superbe voiture de sport rouge ? Tout de suite, je papillonne des cils. Leïla sait que nous ne rentrerons pas ensemble. Jonas est bien plus attrayant en réalité.
-"Salut Princesse."
Je crois que j'aime tout chez lui. Ses yeux gris, son sourire plein de charme, sa carrure impressionnante... La façon qu'il a de s'occuper de moi comme si j'étais l'une des Merveilles du monde... Je me laisse tenter par ses lèvres, appréciant sentir tous les regards qui se posent sur nous. C'est cela, bavez. Vous avez raison parce que j'ai franchement la vie rêvée. Il fait rugir le moteur quand il démarre et nous voici sur les routes qui me ramènent chez moi. Enfin, c'est ce que je croyais au départ.
- "Bébé, t'as loupé ma rue..."
La seule réponse qu'il m'offre, c'est un petit sourire joueur, prenant un virage à gauche, puis un autre. Nous n'allons pas chez moi, nous allons chez lui. Mes parents ne rentreront surement pas avant une heure tardive... Je suis donc libre de toute contrainte pour le moment. Moi aussi, je me mets donc à sourire, enlaçant mes doigts aux siens, posés sur ma cuisse. La fin d'après-midi va être bien plus intéressante que tout ce que j'avais pu prévoir.
***
C'est vers dix-neuf heures que mon téléphone vibre à nouveau, dans mon sac de cours négligemment posé au pied du lit de la chambre de Jonas. L'insistance des vibrations m'oblige à m'extirper du dessous de la couette, encore nue, tandis que mon Apollon lui, grogne en tentant de me retenir :
-"Tu vas pas déjà partir, si ?"
Je me saisi de mon smartphone, à l'aveuglette, grimaçant à la lumière de son écran tandis que je lis le nouveau sms de ma mère :
Fausse alerte, comme toujours. Le temps de signer les papiers de sortie, on est là dans vingt minutes. Bises.
Génial. Moi qui pensais pouvoir entamer une deuxième mi-temps...
-"J'vais devoir y aller. Mon père rentre de l'hosto, il est de tradition que je sois là pour jouer les petites filles inquiètes..."
J'use d'un léger sourire, me vautrant de moitié sur le torse nu de Jonas, embrassant tendrement la commissure de ses lèvres.
-"Tu me ramènes ? Comme ça, toi aussi, tu pourras jouer le gendre inquiet, pour te faire bien voir."
Je ris légèrement, et sa réponse ne tarde pas :
-"Tu sais très bien que ton père ne peux pas me blairer. Pas d'cervelle, trop d'muscles. C'est ça qu'il a dit la dernière fois, non ?"
C'est vrai, c'est bien ça qu'il a dit.
-"Mais comme ce soir tu ne laisseras pas sa fille adorée rentrer toute seule dans le noir, à la merci des fous qui traînent dehors, je pense que tu peux remonter un tout petit peu dans son estime."
Je quitte à contrecoeur la chaleur de son corps pour repousser la couette et me lever afin de me rhabiller. Il n'hésite pas à claquer une de mes fesses quand je me glisse dans ma robe et je pouffe un peu bêtement, embrassant ses lèvres pendant qu'il enfile un survêtement. Je salue brièvement sa mère quand nous passons par le salon, toujours un peu gênée qu'elle me voit sortir de la piaule de son fils, et me hâte dans la voiture rouge qui me ramène chez moi.
Une fois déposée, Jonas ne s'éternise pas. Un baiser fiévreux clos notre rendez-vous du jour, le bolide s'échappe, je grimpe le perron, clés de l'entrée en main mais... La porte s'ouvre sur le visage un peu railleur de mon père :
-"Alors... On ne s'inquiète plus pour son papa chéri à ce que je vois ?"
En guise de réponse, je me hisse sur la pointe des pieds pour l'embrasser sur la joue, un grand sourire étirant mes lèvres, joueuse au possible également :
"Mon papa adoré... Tu sais bien que si."
J'entre et l'attrape par le bras, l'entraînant dans le salon avant d'embrasser ma mère à son tour, me retournant quand même vers le principal intéressé, les poings sur les hanches :
"Alors ? Tu me racontes ?"
S'en suit un repas avec les explications. Un virus qui mute. Une fausse alerte. Un bon film en famille. De la bonne humeur. Mon bonheur au quotidien.
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L'Aube Rouge - Tome 1 - "Survivre"
Horror-"Crois-tu aux revenants, Megan ?" -"Bien sur que non." Un fin sourire se dessine sur les lèvres roses de la lycéenne, immédiatement suivi d'un petit rire moqueur. Megan n'est pas de celles qui se préoccupent des choses immatérielles et irréelles...