Chapitre 2: Averses

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« Eh merde ! » se dit-elle quand elle sentit quelques gouttes de pluie tomber sur son visage. Elle se retourna et croisa le regard d’une personne qu’elle n’avait pas vue depuis ce qui lui semblait une éternité.

- Hayley ?

- Bonjour Madame Walker... Je… J’étais sur le point de partir…

- Oh… Il pleut, tu voudrais que je te raccomp…

- N-Non… !, l’interrompit-elle, j’irai bien, merci…

Après que Hayley ait quitté le lieu, Anne, elle, entra dans le bâtiment, où elle demanda de l’aide à une infirmière.

- Excusez-moi, je voudrais rendre visite à ma fille, Madelyn Walker.

- Je vous prie de me montrer votre carte de visite.

- Oui, tenez, dit-elle en la lui tendant.

- Bien, ajouta-t-elle après l’avoir vérifiée, suivez-moi s’il vous plait.

La dame en blouse blanche la conduisit à la chambre 83 dont elle a ouvert la porte avec une clef.

«  Madelyn ? Tu as de la visite. »

Anne entra et retrouva sa fille assise sur le lit, le regard dans le vide, exactement comme elle l’avait laissée hier. Même après avoir essayé d’entamer une discussion avec elle, elle continuait à l’ignorer.

« …Comment ça s’est passé avec Hayley ? »

Madelyn se mit à tourner lentement la tête vers sa mère.

« Hayley… ? »

Ce fut le premier mot qu’elle prononça depuis son arrivée au Disorder Asylum. Après l’avoir entendue, Anne réfléchit à maintes reprises à ce qu’elle allait dire, comme si la plus petite erreur aurait les plus grandes conséquences sur l’état de sa fille, encore fragile. Enfin, c’est ce qu’elle croyait. Elle avala sa salive et lui répondit.

« Oui, je… je l’ai vue partir de l’as… d’ici. »

Après un moment de silence, Madelyn sourit légèrement et chuchota « Eh bien, qu’elle ne revienne pas. ».

En arrivant chez elle, Hayley remarqua quelqu’un assis sous le porche de sa maison : un garçon aux cheveux châtains extrêmement familiers à ses yeux.

- T’avais besoin d’aller quelque part ? J’aurais pu t’y emmener, tu sais ?

- C’est bon, Nate, laisse-moi. Je ne suis pas d’humeur à être engueulée.

- Je ne t’engueule pas. Je te demande juste pourquoi tu m’as menti.

- De quoi tu parles ?! Je ne t’ai pas menti ! Et qu’est-ce que tu fais chez moi, d’abord ?! Je n’ai pas besoin d’être surveillée tout le temps ! Je comprends que t’essayes de jouer ton rôle de petit ami mais là, franchement, tu me saoules !

- Hayley, tu m’as menti sur le fait que tu n’étais pas triste. Je sais que tu es allée la voir, je te connais beaucoup trop. C’est pour ça que je suis venu, je voulais t’aider, en parler avec toi à ton retour, mais… Si je te saoule, je préfère partir…

D’un côté, elle voulait le retenir mais d’un autre, elle avait besoin d’espace pour réfléchir. Alors, elle le laissa. De toute façon, elle savait que, le lendemain, il fera comme si rien ne s’était passé. Nate est très compréhensif, après tout.

Hayley claqua la porte d’entrée et se dirigea vers sa chambre sans même avoir pris la peine de saluer ses parents qu’elle inquiétait déjà assez. Sa mère se leva du canapé sur lequel elle était si confortablement assise et la suivit. En arrivant, elle toqua à la porte : aucune réponse. Elle voulut mettre sa main sur la poignée mais celle-ci fut tirée brusquement.

- Qu’est-ce que tu veux, maman ?

- Je peux entrer ?

Elle soupira, puis la laissa passer. Elle comprit qu’elles allaient parler de quelque chose de sérieux  quand elle entendit sa mère lui dire d’une voix basse « T’as envie d’en parler ? »

- De quoi ?

- Je suis au courant à propos de Maddie… Tu voudrais en parler ?

- Maman… Tu ne vas pas t’y mettre toi aussi…

- Tout ce que je veux dire c’est que, si tu te sens mal, c’est tout à fait normal, parce que…

- Mais qu’est-ce qu’il y a de tellement dur à comprendre ?!, hurla-t-elle sans la laisser finir sa phrase, pourquoi tout le monde croit que je me sens mal ?! Je m’en fou de Madelyn ! Je m’en fou de ce qui lui arrive !

- Chérie, je…

- Non, maman ! S’il te plait, laisse-moi ! J’ai déjà eu une assez mauvaise journée à cause de cette folle ! Pourquoi je laisserais ses problèmes affecter ma vie ?! On n’est plus amies !

- …Tu as raison, je vais retourner au salon, si tu as besoin de moi…

Elle n’eut même pas la force de répondre, elle restait là à regarder le sol en attendant que sa mère ait quitté la chambre. Dès qu’elle entendit la porte se fermer, elle mit un t-shirt qu’elle avait volé à Nate il y a quelques mois et un vieux pantalon de jogging. Elle avait l’intention de passer le reste de la journée enveloppée d’une couverture à regarder une série qu’elle avait commencée récemment, mais, au milieu du vingtième épisode, son téléphone se mit à sonner. C’était Denise.

- Hey, t’as quelque chose de prévu aujourd’hui ?

- Pourquoi tu me demandes ça ?

- Tu savais que Jake Brandon organise une soirée chez lui ? Il vient de me dire qu’on était toutes invitées ! Bon, je passe te prendre vers quelle heure ?

- Je n’ai pas l’intention d’y aller.

- Quoi ?! Pourquoi ?!

- Parce que je ne suis pas d’humeur à faire la fête. Voilà.

- Mais…

- Denise, pas la peine d’insister, dit-elle avant de raccrocher.

Après quelques heures, elle éteignit son pc et le mit sur la table pour pouvoir se coucher, mais, au lieu de se mettre au lit, elle ouvrit la fenêtre et se mit à regarder dehors. Il ne faisait pas entièrement nuit, mais un silence anormal régnait sur la ville. Le seul bruit qu’on pouvait entendre était celui de la pluie, ce qui était étrangement relaxant pour elle. Elle avait l’impression que le temps s’était arrêté. Elle n’avait aucune envie de dormir, ni celle d’affronter la journée qu’allait être demain. Elle n’a jamais autant apprécié quelque chose d’aussi banal. Difficile d’expliquer pourquoi, mais elle aimait énormément cette atmosphère si calme. Tellement qu’elle serait bien restée devant sa fenêtre jusqu’à l’aube si le sommeil ne s’était pas emparé d’elle vers les environs de minuit.

Elle, par contre, était effectivement restée jusqu’au lever du soleil à sentir ce vent agréable ainsi que de minuscules gouttes de pluie arrivant à pénétrer entre les petites ouvertures du grillage qui l’empêchait d’avoir tout contact avec le monde extérieur. Elle ne savait pas pourquoi elle avait autant envie de rester debout toute la nuit. Elle ne savait même pas si c’était normal pour elle d’avoir envie de quelque chose. Peut-être que ça lui rappelait les nuits blanches qu’elle passait dehors autrefois, quand elle n’était pas… Peu importe, elle était là à présent, et elle n’avait aucune idée du jour où elle pourra enfin sentir la pluie directement sur sa peau à nouveau.

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