Mariage pluvieux...

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Samedi 20 Mai 2017

Je suis avec Théo dans son appartement. C'est le déluge dehors, du genre les giboulées de Mars au mois de Mai. Aujourd'hui, c'est le grand jour. Pour lui, pas pour moi ça c'est sûr, je suis vacciné, croyez-moi ! Mais je suis tellement content que mon meilleur ami ait trouvé son âme soeur.

- Arrête de bouger, mais qu'est-ce que tu as à être stressé comme ça ? le taquiné-je. On dirait que tu es sur le point de te marier, dis-je en riant.

- Pfff ! Arrête de me chercher ou je pourrais t'en coller une ! me menace-t-il.

- Tu pourrais en effet. Mais tu ne le feras pas. Tout simplement parce que si tu amoches ton super beau témoin, Candice ne sera pas contente, mais alors pas contente du tout, et les photos de mariage seront ratées.

- Ouais, bah c'est ça qui te sauve mon ami ! rétorque-t-il.

- Ah bon, moi qui croyais que c'est parce que tu m'aimais ! ricané-je.

Il me regarde, le visage impassible, puis il éclate de rire.

- T'es con, mais oui en effet je t'aime mon frère, en me donnant une accolade. Heureusement que tu es là, je ne sais pas comment j'aurais fait sinon. Entre ma folledingue de mère qui une fois de plus a tenu à tout régenter.

Cette petite remarque ne peut que me ramener 8 ans en arrière, au souvenir de mon propre mariage. Enfin, mariage, on ne peut pas dire ça puisque je me suis fait planter juste avant de dire oui. Mais c'est Hélène qui s'était également occupée de toute l'organisation, étant donné qu'il s'agissait de sa fille. Une vraie furie mais il faut avouer qu'elle est douée et que le mariage de mon pote sera une vraie réussite. Une nausée me prend alors que je repense à cette maudite journée. "Inspire, expire". Je répète ce geste plusieurs fois et tout revient à la normale. Je n'arrive toujours pas à m'en rappeler de manière détachée. Même après toutes ces années. Bref, je ne suis pas le sujet de ce chapitre. Enfin, pas seulement.

Vous l'aurez compris, aujourd'hui, nous allons enfin marier Théo, avec la douce Candice. Ce petit bout de femme a réussi à le faire rentrer dans le rang, pour notre plus grand bonheur à tous. Théo, le queutard invétéré se faisant passer la corde au cou. A marquer dans les annales. Je suis très fier de lui, il aura mis le temps, mais c'est la bonne pour lui, j'en suis persuadé.

- Voilà, tu es prêt. Tout beau comme un camion, ris-je.

- Merci mon pote. Pour tout. Je sais que ce n'est pas facile pour toi de revivre ce genre d'évènements.

- T'inquiète ça va, et puis l'issue ne sera pas la même qu'avec elle, donc je suis serein. Candice ne t'abandonnera pas, elle.

Il me regarde, il sait que je ne veux plus entendre son prénom, il comprend et ne m'en veut pas. Je n'y peux rien, je n'y arrive plus.

- Oui, soupire-t-il. Je le sais aussi.

- Tu sais quoi ? On a encore du temps, je vais aller nous chercher deux bières et on va trinquer à ta nouvelle vie d'homme marié, tu veux ?

- Carrément ! Je t'attends. dit-il, tout content.

Je traverse le couloir qui mène aux escaliers, et au passage je croise Hélène, le visage fermé qui se dirige vers la chambre de Théo.

- Quelque chose ne va pas Hélène ? me hasardé-je.

- Oh, non mon grand, je vais juste voir un détail ou deux avec Théo. Il est prêt ?

- Oui, ne t'inquiète pas, tu lui diras que je l'attends en bas sinon. Comme ça, je ne vous dérangerai pas.

- Non, non t'inquiète pas, je n'en ai que pour une minute.

- Ok, de toute façon, il faut que j'appelle Emilie, elle était de garde cette nuit à l'hôpital. Je vais voir si elle a réussi à se réveiller la pauvre.

- Oui, je comprends, il faut qu'elle se repose quand même un peu, ne la brusque pas surtout, m'ordonne-t-elle gentiment.

- J'en prends soin, du moins j'essaie.

- Je sais que tu fais de ton mieux, et tu y arriveras. J'aime beaucoup cette petite, elle te fait du bien.

- Merci, Hélène, lui dis-je en la prenant dans mes bras.

Elle est comme une deuxième mère pour moi.

- De rien, mon grand. Puis, elle me fixe quelques secondes et son sourire s'efface de nouveau en même temps qu'elle tourne les talons et passe son chemin jusqu'à la chambre du fond.

J'ai l'impression que quelque chose la tracasse, mais je me fais peut-être des idées après tout. Faut dire que j'ai un peu été traumatisé.

J'attrape les deux bouteilles dans le frigo, et je les pose sur l'îlot central. J'en profite pour regarder mon téléphone, et je vois un message d'Emilie, qui me dit qu'elle est bien réveillée, mais crevée. Mais elle sera quand même à l'heure à la mairie. Je lui réponds "ok, je t'embrasse".

 Un peu bref, mais en même temps, je ne sais plus faire que ça maintenant. Je ne sais plus m'exprimer au sujet de mes sentiments, je suis fermé, je ne me livre plus et alors pour dire "je t'aime", encore moins. 

Elle m'a détruit. Je suis vivant, mais je suis mort à l'intérieur. 

Depuis 8 ans, j'enchaîne les conquêtes, juste pour la baise. Emilie, pourtant elle est différente des autres nanas que j'ai pu lever, mais malgré ça, je n'arrive pas à me projeter. Je sais, on est loin du mec nunuche qui ne voyait que par la théorie de l'amour éternel. En effet, j'en suis là. Je suis devenu complètement hermétique aux sentiments. Le spectacle est désolant, n'est-ce pas ? Pour autant, je ne me plains pas, je suis bien entouré, j'ai un boulot qui me passionne, une famille aimante. Tout va bien dans le meilleur des mondes. Sur ces bonnes paroles, je commence à remonter vers la chambre, en espérant qu'ils aient terminé leur conversation. En avançant, j'entends la voix grave de Théo. Il a l'air énervé, la porte est entrouverte. Ils ne sont pas dans l'axe, donc il ne me voient pas tendre l'oreille.

- Dis-moi que tu n'as pas fait ça maman ? s'énerve-t-il.

- Mais mon chéri, que voulais-tu que je fasse d'autre ? Que je lui interdise de venir ?

- Oui, par exemple. C'est un peu mon mariage je te rappelle, et je suis encore libre de choisir mes invités, et je te dis qu'elle ne viendra pas !

J'ai un mauvais pressentiment, je serre les bouteilles tellement fort que les jointures de mes doigts commencent à blanchir.

- Mais enfin Théo, c'est ta sœur ! crie-t-elle.

- Non, je n'ai plus de sœur depuis huit ans.

- De toute façon, c'est trop tard, elle sera à la mairie.

Soudain, une odeur de bière se répand dans un fracas sur le carrelage. Je viens de laisser tomber les bouteilles, qui se sont brisées.

Théo et Hélène accourent.

- Bastian ! s'écrient-ils tous les deux en même temps.

Je desserre ma cravate, j'ai du mal à respirer. Pitié non, je ne veux pas revivre ça. Théo m'apporte un petit sac en papier, il a décelé la crise de panique. Je m'en empare et me mets à inspirer et expirer. Au bout de quelques minutes, ma respiration s'est stabilisée. Je les regarde tous les deux :

- Dites-moi que ce n'est pas vrai ! Elle n'est pas de retour ?

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⏰ Dernière mise à jour : Mar 05, 2023 ⏰

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