Nouvelle Destinée: RENAISSANCE

Renaissance

De la lumière... elle inonde mes yeux et brûle mes rétines. Des formes floues se transforment tranquillement en images plus claires. Un homme torse nu est perché au-dessus de moi, des sons sortent de sa bouche. Ils ne font aucun sens, l'homme est dans la mi-trentaine, cheveux foncés, mi-longs et yeux bruns pâles, il est massif. Une femme mince le pousse et prend sa place au dessus de moi. Elle aussi bafouille des sons incongrus, ils changent en intonations et restent incompréhensibles, jusqu'à ce que je comprenne: <<comment te sens-tu?>>. 

Je me surprend moi-même en sentant des vibrations remonter le long de mes cordes vocales: << Qui êtes-vous?>>. La femme m'observe avec ses yeux vert-de-gris, son expression faciale est perplexe. Elle se retourne vers l'homme et lui bafouille quelque chose dans un langage inconnu. L'homme se lève et disparaît dans la pénombre, j'observe l'environnement qui m'entoure. Je suis étendue dans une ruelle éclairée par une simple enseigne lumineuse, les bâtiments sont délabrés sur les côtés, probablement pareil pour le devant. Le sol est froid contre mon dos, je porte un manteau, mais il est déchiré et ensanglanté. Je sens du sang ruisseler sur ma tempe gauche,  j'y porte ma main et découvre une belle entaille, qui part de mon sourcil au haut de mon oreille. Le haut de mon oreille est déchirée et elle me picote, je sens la peau se refermer. Se refermer? Je ferme les yeux et compte jusqu'à dix, je sens toujours mon oreille et ma peau picoter, en fait, tout mon corps me démange.  Mon dos, mes jambes, mes bras, mon visage et mon intérieur brûlent.

J'ouvre les yeux de nouveau, la femme est toujours là, ses yeux brillent dans la pénombre, elle semble perdue dans ses pensées. Elle murmure de façon incompréhensible et se lève, ses vêtements sont simples, passe-partout , un manteau brun foncé et une écharpe pourpre, des pantalons noirs et des bottillons assortis. Ses cheveux rassemblés en une queue-de-cheval amplifient les traits acérés de son visage. Ses yeux croisent les miens et elle soutient mon regard.  Je détourne le regard en premier et ressens tout de suite une impression de défaite.

J'ai perdu.

La femme secoue ses épaules et se détourne de moi.

Je m'assois, la douleur est presque insoutenable, des lumières dansent devant mes yeux.

Des cliquetis lointains se font entendre sur le pavé inégal et résonnent dans l'air hivernal. Un énorme chien marron (un chien?), de la taille d'un lion, viens vers nous en courant, il s'arrête aux pieds de la femme, la gueule écumante. Il regarde dans ma direction en grondant et me défie du regard. Je ne baisse pas les yeux, un pressentiment inconnu m'en empêche. La bête fait quelques pas dans ma direction et je commence à gronder, je ne peux me contrôler. Je me lève et un avertissement sourd et animal sors du plus profond de mes entrailles, on dirait qu'il utilise les tréfonds de mon âme, le chien baisse les oreilles, puis la tête.

J'ai gagné.

La femme s'accroupit près de l'animal et lui parle. Le chien (ou plutôt le loup?) glapit et claque des mâchoires puis repart en courant. La douleur s'intensifie et avant que tout ne devienne noir, la femme m'attrape dans ma chute.