« Penser. Réfléchir. Observer. Se questionner. Ignorer. Finir par refouler le tout. Ne pas réussir à tenir. Recommencer. Constamment.
Il était coincé dans ce cercle vicieux et ne savait pas comment il en était arriver là.
Il était coincé alors il recommençait.
On aurait pu croire qu'il aurait seulement fallu faire abstraction de ce sentiment mais non. Il ne pouvait pas. Il avait manqué quelque chose. Quelque chose d'important. Quelque chose dont il avait besoin.
Ce quelque chose était là sous ses yeux. Il le savait. C'était même dans sa tête. Il y pensait constamment mais ne parvenait pas à en identifier la cause.
Avoir sans savoir.
Voir mais ne pas regarder.
Parcourir et ne pas lire.
Survoler et ne pas toucher.
Il avait un symbole mais ne parvenait pas à le déchiffrer.
Ce sentiment d'avoir quelque chose mais de ne pas pouvoir mettre un mot dessus ou réussir à le décrire. C'est ce qu'il ressentait et cela le frustrait.
Plus il la regardait plus il sentait qu'il s'approchait de ce qu'il cherchait. Mais plus il approchait du but plus il était effrayé. Il en devenait obsédé presque. Il ne pensait plus qu'à elle, au mystère le plus intéressant qu'elle représentait pour lui. C'était étrange et effrayant mais ça le rendait heureux. Il l'aimait comme jamais personne n'a jamais aimé quelqu'un sur Terre. Je sais qu'au fond de lui il savait parfaitement ce qu'il prétendait ignorer et chercher, et une part de lui le savait aussi.
Comme on dit il n'y a que la vérité qui blesse. Et il n'était pas près à souffrir à un tel point. Elle était la plus belle chose qui lui soit arrivée mais aussi la pire malheureusement.
Pendant des semaines elle l'avait repoussé, ignoré et même détesté. Eh oui, l'amour est un sentiment bien compliqué ! Il avait compris qu'elle n'était pas heureuse et s'était mis en tête de tout faire pour changer cela. Quoi qu'il arrive. Il savait que le temps n'était pas de son coté mais il était plus déterminé que jamais.
Et c'est là que tout commença entre eux.
Ils échangèrent enfin un mot, puis deux puis plus. Vint ensuite le café, le ciné, le déjeuner romantique. Et enfin, le baiser. Mais pendant tout ce temps passé ensemble, il n'avait pas su définir ce qu'il cherchait, ce qu'il savait. A chaque instants passé avec elle il l'avait regardé cherchant encore et encore dans ses yeux. Tout ce qu'il avait vu c'était un mur au fond de ses magnifiques yeux bleus. Il en était plus que persuadé à présent : elle avait un secret qu'elle protégerait jusqu'au bout. Plus le temps passait plus il voyait ce mur s'élever et, dans ses yeux à lui, tristesse et impuissance s'installaient petit à petit au coté de l'amour qu'il lui portait.
Il l'a voyait se perdre jours après jours malgré ce sourire qu'elle avait constamment. Il sentait que tout en elle voulait lui dire ce qui n'allait pas pourtant il existait quelque chose de plus fort que ce qu'elle souhaitait. Cela le tuait à petit feu tout comme elle.
Savoir qu'il avait toutes les pièces du puzzle mais qu'il ne pourrait pas les assembler si elle ne le lui permettait pas. Cela devenait plus que frustrant. Il y avait plus que ça : elle ne le lui permettrait pas car elle ne pouvait pas lui donner la permission. Ce secret si bien gardé était maître d'elle. Il voulait la sauver, la délivrer de ce qu'il voyait comme un poids. L'était-ce pour elle ? Peut être bien.
Quoi qu'il en soit, il n'aura jamais la réponse. Un matin au réveil, tout ce qu'il trouva c'est une lettre, dernière trace de son passage.
Je t'ai détesté comme jamais car j'ai su dès que je t'ai vu que tu allais faire de moi la femme la plus heureuse du monde. Je ne voulais pas. Je m'étais faite à l'idée de m'en aller et je ne voulais pas commencer quelque chose que je ne pourrai pas terminer et dont je ne pourrai pas profiter. Et toi tu es arrivé et pour la première fois j'ai aimé. Je t'ai tellement aimé ! Tu m'as donné l'envie de commencer à vivre. Tu m'as faite vivre plus que quiconque. Et pour ça je t'ai détesté. Je suis désolé que tu ai du subir ça. Je suis désolé que tu sois tombé sur moi. Mais merci. Même ça je ne pourrais le faire comme il se doit. Je n'ai pas été assez forte pour te protéger. J'arrive et je repars sans prévenir. C'est ainsi. C'est quelque chose que je ne contrôle pas. Les dernières choses que tu obtiendras de moi ce sont ces mots. Ce n'est pas les réponses que tu souhaiterais avoir, car je sais que tu as su voir en moi ce que personne n'avait su voir auparavant, mais je ne peux t'en dire plus. Pardonne moi. Je pars et je dois emmener mon secret avec moi.
Désormais Oublie moi. »
Fin
Il referma le livre puis me regarda.
-Alors, entre toi et moi, qu'elle est son secret ?
Je lui rendis son regard, souris gentillement et répondis : « Ça, c'est entre le lecteur et elle. » Puis, le laissant planter là, je me levais et quittais le café. Arrivée à la porte, je posais la main dessus, me retournais une dernière fois. Mon regard croisa le siens au fond de la pièce et je murmurai :
-Désormais Oublie moi.
Et je sortis.
