Le ciel est gris

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Le ciel est gris. J'ai rongé mes ongles jusqu'au sang, révisé quelques accords de guitare, et me suis plantée devant la télé durant quelques heures. Mais finalement, je crois que la maussaderie du temps a eu raison de moi. J'ai fini par m'allonger sur un lit, rêvant d'aventures et de grandes batailles, songeant à toutes les découvertes des films les plus extraordinaires qui me seraient éternellement refusées par ma minuscule et méprisable condition humaine. J'ai pensé à prendre une épée et à rejoindre Peter pour la guerre de Narnia, ou à tout lâcher et partir pour le voyage de la destruction de l'anneau. Mais je crois bien que les cours de math et les dissertations de philosophie m'ont retenu dans ce monde assombri de simplicité et d'ennui. Aussi je les accuse d'être indignement et sans aucun doute la pire prison dont on puisse s'accabler chaque soir et sans relâche, assise à un bureau éclairé par une petite lampe dans la pénombre des soirs qui suivent l'école. Dans ces moments imbibés d'un profond désespoir devant la quantité d'inutilités qu'il me reste à savoir encore, et de toutes celles que j'ai oublié et qu'il me faudra réapprendre, ma tête souvent se pose lentement sur l'inox de ma table, mes yeux se ferment, et mon esprit quitte ce monde pour un autre plus grand, plus vaste, plus incroyable et surprenant que tous ceux que l'on peut rencontrer dans les milliards de galaxies de notre univers. Avec la musique déclenchée précédemment par ma chaîne hifi, mon regard se perd dans la multitude des arbres d'une forêt elfique, les violons mêlés aux sabots d'un cheval en furie résonnent dans tout mon corps, et mon imagination prend le dessus sur les fractions, les théorèmes, les règles de grammaire, et les réflexions incessantes. Inspirée par les plus grands chefs d'½uvres littéraires et cinématographiques, une grande hymne à la liberté et à l'insouciance s'invente dans mon esprit. Des images d'aventures plus extraordinaires et inaccessibles les unes que les autres défilent. Voguant sur les flots, gravissant des montagnes, fuyant une armée meurtrière. Le feu de l'action et un monde nouveau imprévisible m'envahissent d'une majesté plus grande que les tours de New-York. Puis doucement, la musique se calme, la vision se floue, le rêve s'effrite. Mes yeux se rouvrent, et un cahier encré de signes mathématiques incompréhensibles se dessine devant moi. Je prends une grande inspiration, éteint la musique, et empoigne à nouveau mon stylo. Le monde réel.

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