Décembre 1994
La pluie s'abat sur moi sans ménagement. Palvin, bien plus rapide, se trouve à plusieurs centaines de mètres devant. Mon cœur s'essouffle, non habitué à courir aussi vite. Mes vêtements collés sur ma peau est désagréable, mais j'enlève cette sensation de mal-être afin de réussir à franchir le pas de ma porte en temps et en heure. Si j'arrive une minute en retard, Mama va me gronder.
J'arpente les rues, non sans croiser quelques habitants du coin et Palvin, toujours vif, disparaît de ma vue. Je me donne un peu plus de courage, et accélère la cadence. Les lampadaires, partiellement allumé me donnent la lumière nécessaire pour éviter de me perdre. Les chemins se ressemblent tous et Palvin, en bon moqueur, s'est amusé à me rappeler un bon nombre de fois mon manque d'orientation.
Pas de ma faute si les maisons sont toutes les mêmes !
Arrivée tout près de la charmante entrée qui représente les fleurs de Mama, je me jette en un rien de temps sur la porte fenêtre qui semble ouverte. J'approche ma tête avec appréhension et je fixe les billes chocolat qui me narguent d'avance. Palvin, installé sur la petite chaise en bois, m'offre un clin d'œil de victoire. Ce petit con sait à quel point la course et moi nous ne sommes pas copains.
━ Tu es longue à la détente, fait-il, encore plus fier qu'il y a deux minutes.
Je roule des yeux, nullement surprise par sa pique provocatrice. Palvin et moi sommes comme chiens et chats. Nous aimons les petites guerres entre nous, et ce, depuis quelques années. Quand je suis arrivée dans une nouvelle école, Palvin, que je surnomme Pal-Pal est le seul de la classe à m'avoir adressé la parole. Un peu surprise par ce manque de convivialité, Pal, lui, s'est montré gentil et très taquin dans sa prise de parole. N'ayant pas froid aux yeux, ni même peur, il m'a entraîné dans bien des bêtises que je ne pensais pas commettre un jour. Mais bon, il faut savoir faire des erreurs pour grandir plus vite. Du moins, j'essaie toujours de me responsabiliser telle l'adulte de dix-neuf ans que je suis.
Mama, elle, est peinée par mon comportement. Quand mon père nous a quittés il y a de cela cinq ans, elle s'est effondrée. Littéralement. Son mari était mort et la vie devenait dure.
Malgré mon jeune âge, j'ai dû apprendre à rester calme et plus ou moins débrouillarde. Mais avec un phénomène comme Pal-Pal dans les parages, difficile de rester docile en toutes circonstances.
Mon meilleur ami, gamin des rues et sans famille aime briser les interdits. Et pour ça, tout est prétexte à tenter les choses. Aujourd'hui, ne déroge pas à la règle. En bonne suiveuse, je l'ai accompagné dans ses drôles d'expériences.
━ Tu as triché, je m'exclame avec virulence. C'est bien plus facile ainsi. Dis-moi, tu as peur de te faire dépasser par une fille ou bien ?
Le regard sombre de Pal est plus intense, signe que j'ai touché son ego d'homme macho, comme il aime le répéter. Ses cheveux trempés qui lui barre le front – et sa veste déchiré sur les épaules, celui-ci bombe le torse de manière à prouver sa virilité. J'évite de rire face à cette démonstration de testostérone plus que ridicule.
━ Quelle menteuse ! Tu n'as qu'à faire du sport au lieu de te plaindre.
Avant que je puisse répliquer, Mama, les mains prises par son panier à linge, nous interromps par son regard plus que noir. Ses traits tirés dû à la fatigue et ses dents qui claquent m'achèvent dans ma plaisanterie avec mon meilleur ami. Pal-Pal, sourit, amusé de me voir si impressionné par ce petit bout de femme que représente ma mère.
Cheveux bruns mi longs, coiffé dans un petit chignon défait, un cou fin et si tassé, Mama, me fixe une seconde avant de reporter son attention vers mon meilleur ami.
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Proshchay, moya strana (Adieu, mon pays.) - Tome 2.2
Romance1994 -1995 : Megan Aleksandrovna vit tranquillement à Grozny auprès de sa famille et son meilleur ami. Pourtant, cette vie simple et sans histoires s'arrête net lorsque la guerre de Tchétchénie fait rage. Megan et sa famille sont sur le qui-vive et...