Cent-mille ans de progrès. Ou l'inverse...

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Une nouvelle est apparue récemment aux yeux et dans les oreilles. Réjouissante.

Nos ancêtres directs auraient laissé des traces de leur existence cent-mille ans plus tôt que ce qui était su. Peut-on écrire cent-mille ans de plus et aucun progrès ? Je ne pense pas mais les apparences sont si trompeuses que l'on pourrait le dire sans craindre d'être beaucoup démenti.

Pensez donc, il y a trois-cent-mille ans, déjà, ils avaient été nombreux à élire un de vos ancêtres, un certain Maaahacrooohon, sans le plébisciter toutefois car cela aurait été exagéré et franchement inconvenant. Un ou deux sur dix seulement, les autres étaient à la chasse pour la plupart, un petit nombre au guilledou (les plus sages certainement).

Comme il arrivait d'on ne sait d'où et qu'il semblait loin, les individus d'alors l'avaient surnommé la millionième partie du mètre.

De fait, de grands espoirs avaient été placés dans le « micron », référence au micromètre, si important et si invisible à l'œil nu.

On parlait de nouveauté, d'une sorte de révolution même, qui avait l'avantage de faire monter aux cocotiers les plus vieux d'entre nous. Tel était ce que disaient les aboyeurs. De tous temps, il y eu ce combat totalement idiot entre modernes et anciens. Il existe, je vous assure que c'est vrai, aujourd'hui comme à l'époque, des sortes de personnes qui ne jurent que par la plus petite quantité d'années, selon une célèbre formule d'un certain Molière ou Racine, je ne sais plus... Mais non, je rigole, c'est Corneille.

Les bananes et les singes étaient donc contents, singes que d'aucun avait appelé « veaux » beaucoup plus tard bien que les veaux aient quatre pattes. Terme certes élégant qui correspond à l'aveuglement des puissants devant leur peuple identique à l'aveuglement de ce dernier face aux premiers : être dans l'incapacité de changer de niveau de pensée tout en se gardant...

Cela tombait bien car très vite il était prévu d'enlever des bananes aux singes pour les laisser sous bonne garde à une palanquée d'experts qui sauraient, eux, les distribuer à qui de droit, c'est à dire au droit du plus fort.

De plus, on voulait tout moderniser, ce qui était une bonne idée qui sera reprise tous les vingt ans durant les trois-cent-mille à venir. Et modernisation il y a eu à l'exception de la psychologie des crânes, seul sujet qui ne se prête pas à la modernisation.

Le premier, le Pavillon de Breteuil avait pris ce chemin en remplaçant le mètre étalon par la nouvelle unité qui, bien qu'elle fît beaucoup de bruit, restait invisible, incompréhensible et presque ubuesque.

Un autre grand ancêtre fut celui que l'on nomma Omas Squet, un être surnaturel. Porteur d'un petit drapeau, même sur sa chemise, il restait parfois six mois dans les arbres puis lorsqu'il en redescendait, il dessinait sur les parois de nos grottes de nombreux petits portraits de soi-même. Lui au milieu des branches et des feuilles, tellement elles étaient belles, avec des soleils, des étoiles, à coté de sa divine figure. Il prenait soin de rappeler et de montrer aux nigauds, tous les outils qu'il utilisait dans son espace élevé pour bien marquer l'importance de son action. Il s'avéra que quelque utilité de ses travaux fut découverte mais d'un point de vue éthique, beaucoup de ses pairs se demandaient quel est l'intérêt de vivre là-haut dans les arbres sans espoir de redescendre, notre destinée étant de mourir et, pour les moins bornés, de savoir qu'il faut chercher le bonheur et non les maux.

On appelait son art, le sfie. Cela plaisait beaucoup.

Le rien comme le néant sont remplis de jolies choses.

Le vide, lui, est vide...

Il y avait aussi Sol Rène. Une magicienne. Elle était capable, à ce qu'elle disait, de soigner les petits bobos de l'existence comme l'ancêtre du cancer, la diphtérie, la sénilité, le choléra, la peste, le mal aux cheveux mais pas encore la bêtise.

Outre qu'elle allait toujours et uniquement aux mangeoires pleines, elle parlait en permanence du vent qu'elle faisait, de ce que les commissions qu'elle nommerait un jour feraient pour soigner encore plus mieux bien. Elle parlait peu des mesures qu'elle prenait, qui bien que parfois utiles, avaient l'énorme avantage de ne jamais rien changer et surtout permettaient à des spécialistes de poursuivre leurs enfantillages. Enfantillages, à l'époque, signifiaient : « toi, tu me donnes, moi, je te donne, mais on dit rien à personne ».

Un témoin de l'époque ma raconta un jour qu'il assistait à un discours du grand maître de Sol Rène dans lequel il disait que la santé des singes et des bananes était essentielle et serait toujours défendue, que chacun et chacune seraient l'égal de l'autre. Ce témoin me dit aussi que cela fit rire les démineurs présents ce jour là car nous étions à une époque de grande terreur. Non j'exagère, les démineurs n'avaient pas le droit de rire et n'ont pas ri. Mais ils se sont regardés...

Pour hâter la fin de ce court rappel historique, j'ai peu de place pour évoquer les baies rouges, les maréchaux-ferrants et autres parasites, il me faut ajouter que le micron s'entoura de personnalités éclatantes. Tout d'abord, leur apparence. Une sur deux étaient munie d'un visage vêtu d'une barbe, taillée très courte et pas un poil plus long que l'autre : une barbe de faux-cul, très à la mode et faisant office de sauf-conduit. Rien à voir avec celle du fameux capitaine Archibald Haddock évoqué par un célèbre historien ou comme celles que l'on croise dans la rue parfois, qui sont aussi longues et jolies que les pensées du philosophe.

Ensuite, les mêmes avaient ramassé les réserves d'os que nous gardions pour que tous puissent manger. Nous avions là des hommes honnêtes, puisqu'ils le disaient, ce qui nous incita à rester bien tranquilles comme ils aiment. Nous nous aperçûmes qu'ils n'étaient que voleurs, l'erreur est humaine.

Ainsi commença l'existence de l'homme moderne qui n'avait comme outil que son cerveau, organe que n'ont pas au même niveau de puissance les animaux. Il y eût donc beaucoup de progrès extérieurs au dit cerveau. Ces progrès furent une sorte de dessin ou d'écrit sur papier calque, ce qui permit de les reproduire à l'infini sans que rien ne changeât réellement.

On s'aima peu, on se tua beaucoup, avec joie, envie et de tous ces morts l'on fit des monuments, des souvenirs pour que les générations suivantes puissent se rappeler comment tuer, mais jamais, jamais, on apprit comment faire l'amour.

C'est comme cela que les micron, les Sol Rène et les Omas Squet se multiplièrent sans cesse et comme le dit un acteur du cinéma des temps futurs : « pourquoi y-a-t'il cinquante pour cent de la population qui emm... les cinquante autres ? ».

Avant eux, juste pour donner l'envie de savoir, il y eut cette époque nommée « l'histoire avant l'histoire », c'est à dire inutile où se multiplièrent les amis de Assange et de Snowden, en particulier Pluie sur mon costume, traître d'entre les traîtres, Tétanos du nombril et de la clavicule et Frais de bouche avec sa raie.

Encore avant ? Rien d'important. Que du navrant.

Comme après.

Pcc. George Vé

Cent-mille ans de progrèsWhere stories live. Discover now