Le Fantôme de l'Opéra

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Je pourrais écrire la moitié du texte de Gaston Leroux tant les mots qu'il emploie sont captivants, et le texte bien mené. Je vais réfréner ma passion et m'arrêter à deux extraits, en essayant de contextualiser sans trop dévoiler de l'histoire. Et comme ça me frustre, je n'ai qu'un conseil : lisez Le Fantôme de l'Opéra !


Raoul De Chagny, à l'opéra avec son frère, reconnait dans l'envoutante chanteuse, Christine Daaé, la petite fille avec qui il jouait étant petit. Après le spectacle, le cœur battant, il se rend dans sa loge pour lui présenter ses hommages. Pris d'une vive émotion, il n'ose pas entrer :

"Sûrement, si son cœur continuait à faire autant de tapage, on allait l'entendre, on allait ouvrir la porte et le jeune homme serait honteusement chassé. Quelle position pour un Chagny ! Écouter derrière une porte ! Il prit son cœur à deux mains pour le faire taire. Mais un cœur, ce n'est point la gueule d'un chien et même quand on tient la gueule d'un chien à deux mains _un chien qui aboie insupportablement_ on l'entend gronder toujours."


Après de nombreuses péripéties qui éloignent puis rapprochent Christine et Raoul, la jeune femme est enlevée par le Fantôme de l'opéra, Erik. Celui-ci, la séduisant par sa maîtrise incroyable de la musique, lui avoue composer un Dom Juan triomphant, l'œuvre de sa vie.

"- Voulez-vous me jouer quelque chose de votre Dom Juan Triomphant ? Demandai-je, croyant lui faire plaisir [...]

-Ne me demandez jamais cela, répondit-il d'une voix sombre. Ce Dom Juan là n'a pas été écrit sur le paroles d'un Lorenzo d'Aponte, inspiré par le vin, les petites amours et le vice, finalement châtié par Dieu. Je vous jouerai Mozart si vous voulez, qui vous fera couler vos belles larmes et vous inspirera d'honnêtes réflexions. Mais mon Dom Juan, à moi, brûle, Christine, et, cependant il n'est point foudroyé par le feu du ciel ! ..."

Erik abreuve Christine de musique, ne lui demandant qu'une chose en retour : ne pas enlever son masque. Mais la jeune fille cède à sa curiosité et Erik sombre dans le désespoir. Il s'enferme dans sa chambre et commence à jouer l'œuvre qu'il destinait à sa mort. Christine est stupéfaite par la beauté de la musique :

"[...] Je revoyais le cahier aux notes rouges et j'imaginais facilement que cette musique avait été écrite avec du sang. Elle me promenait dans tout le détail du martyre ; elle me faisait entrer dans tous les coins de l'abîme, l'abîme habité par l'homme laid ; elle me montrait Erik heurtant atrocement sa pauvre hideuse tête aux parois funèbres de cet enfer, et y fuyant, pour ne les point épouvanter, les regards des hommes. J'assistai, anéantie, pantelante, pitoyable et vaincue à l'éclosion de ces accords gigantesques où était divinisée la Douleur et puis les sons qui montaient de l'abîme se groupèrent tout à coup en un vol prodigieux et menaçant, leur troupe tournoyante sembla escalader le ciel comme un aigle monte au soleil, et une telle symphonie triomphale parut embraser le monde que je compris que l'œuvre était enfin accomplie et que la Laideur, soulevée par les ailes de l'Amour avais osé regardé en face la Beauté !  J'étais comme ivre ; la porte qui me séparait d'Erik céda sous mes efforts. Il s'était levé en m'entendant, mais n'osa pas se retourner."

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