Prologue

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Robyn

Buono soggiorno in Francia, signora* ! minaude l'hôtesse de l'air au moment où je passe devant elle en sortant de l'avion.

– Sono francese*, je réponds machinalement.

La grande jeune femme rousse en uniforme bleu pétrole m'adresse le même sourire aimable et jovial qu'elle réserve à tous les passagers sans exception.

Cette nana arbore un je-ne-sais-quoi dans le regard qui me fait sérieusement flipper. Elle ressemble à la fiancée grandeur nature de Chucky, on jurerait qu'elle s'apprête à extirper un couteau de sa veste ajustée pour m'ouvrir le thorax du cou au nombril. Sa compagnie aérienne lui verse-t-elle une prime de bonne humeur ? Si ce n'est pas le cas, cette fille adore sa vie et son métier, et ça, ça me donne envie de l'éventrer.

Arrête tes conneries, Rob, me tance une de mes voix intérieures.

– Davvero ? Il tuo accentuo, si sente a malapena* ! me complimente l'hôtesse.

– Grazie, je remercie d'une voix atone en franchissant la porte. Ciao, signora.

Je n'ai aucune envie de jacasser avec elle. Ni avec personne.

Ce n'est pas ma fille qui trouvera quelque chose à y redire... Collée à sa tablette, Anya n'a pas décroché un mot pendant tout le vol. Elle me fait la gueule. Il vaut peut-être mieux, d'ailleurs. Je ne suis pas encore tout à fait prête à affronter les inéluctables reproches qui bouillonnent dans sa jolie petite tête blonde. Je préfère la tension à l'explosion, du moins à l'heure actuelle.

Je m'en veux déjà suffisamment moi-même.

Paris, aéroport Charles de Gaulle. La grisaille. La bruine. La fraîcheur.

La déprime, quoi.

Un nuage noir flotte dans ma tête saturée de pensées tourmentées. L'une d'elle domine toutes les autres :

Ai-je fait le bon choix ?

– Brrrr, il caille ici, je fais remarquer d'un ton léger par-dessus mon épaule à ma fille qui me suit sur le tarmac.

Silence radio dans mon dos. Pas même un grognement approbateur.

Nom d'un cul de poule, ça sent super mauvais pour moi. Elle m'en veut terriblement, là... Je ne sais pas comment je vais m'y prendre pour apaiser sa colère. Je laisse les autres passagers nous dépasser et me retourne vers Anya.

Yeux vissés à l'écran de sa tablette qu'elle tient entre ses doigts contractés.

Sourcils froncés.

Dents serrées.

Petite veine qui bat sur la tempe.

La totale.

Elle ne s'arrête pas. Sans quitter son écran XXL du regard, elle me contourne par la droite en marchant.

– Principessa*, je...

– Non, me coupe-t-elle sèchement.

Voilà. Le premier mot que mon adolescente rebelle prononce depuis notre départ précipité de Florence. « Non. »

Amour, flingues et macaronis *publié chez Black Ink éditions*Où les histoires vivent. Découvrez maintenant