Guns and Roses

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- Fermez les yeux, dit-il. Imaginez-vous quelque part, dans un endroit qui vous rassure. Où êtes-vous ?

Le bruit qu'émettait la pendule auparavant disparaissait peu à peu dans mon esprit, je laissais place à mon imagination et visualisais un paysage que je jugeais comme agréable et paisible.

- Sur une colline, le haut d'une colline, répondis-je.

- Et pouvez vous me décrire ce que vous voyez ?

Je penchai ma tête en avant, comme pour mieux voir, puis d'un ton très calme Docteur James me demandait de lui décrire ce que je pouvais apercevoir.

- Le soleil brille, je peux le voir depuis la colline car il surplomb tout ce décor. L'herbe est fraichement découpée, il y a un fleuve à l'eau bleu clair, il coule puis tombe en cascade sur les rochers. Des oiseaux multicolores sifflent, ils paraissent joyeux.

- Et vous, êtes vous joyeuse ? questionna t-il.

- Oui je suis joyeuse, en tout cas j'en ai l'air...

- Très bien Elizabeth. Vous avez mentionné un soleil occupent la majorité du ciel, pouvez vous me décrire ce ciel ?

Je pris longtemps à prendre en compte sa question, mais heureusement pour moi mon psychiatre était un homme très patient. J'avais focalisé toute ma concentration sur cette image de ciel et j'en décryptais les moindres détails.

- Il est nuancé de bleu et du blanc des nuages. Les rayons du soleil le transpercent, quant aux nuages ils bougent trop vite, je n'ai pas le temps de bien les voir, et...

Soudainement j'arrêtai de parler et claquais machinalement mon pied gauche contre le plancher, je fronçai mes sourcils me sentant à nouveau déstabilisée, quelque chose n'allait pas...

- Continuez, s'il vous plait, insista t-il.

- Le ciel s'assombrit... hésitais-je, et les nuages se regroupent cachant peu a peu le soleil. Le vent souffle très fort emportant tout dans son passage même les gentils oiseux, j'ai peur et... Elles arrivent, elles sont là, elles sont de retour !

Je pris panique et m'accrochai de toute mes forces sur ma chaise. Mon doux paysages paradisiaque se transformait en un tableau apocalyptique puis cauchemardesque, mes démons refaisaient surface, cette hantise me submergeait.

- Qui est de retour ?

- Les ombres, elles sont de retour. Elle s'approchent de moi et elles me chuchotent des mots indistinct, tout s'embrouille dans ma tête... Je ne veux plus être ici, je veux disparaître, mes oreilles sifflent ! Sortez moi d'ici je vous en supplie, elles parlent toutes en même temps ! hurlais-je en compressant mon crâne avec la paume de mes mains. Elles viennent me cherchez mais je ne veux pas aller avec elles ! affirmais-je en claquant de plus en plus fort mon pied.

- Elizabeth, me rassura t-il. Tout vas bien vous êtes en sécurité, n'écoutez que ma voix. Je vais compter jusqu'à 5 et à 5 vous rouvrirez les yeux, m'avez vous compris ?

J'hochai la tête en guise de réponse, bien trop tétanisée pour continuer à parler.

- 1, 2, 3, 4, 5, ouvrez les yeux !

J'obéis et levai mes paupières, la respiration saccadée, je ne savais plus ce que je faisait ici, dans le bureau froid et familier de Dr. James. Je tournai la tête de partout puis je réalisai avec effroi que mes paumes étaient toutes rouges, comme si j'avais frappé sur quelque chose.

- Que fais-je ici ? demandais-je interpellée en reluquant mes mains.

Le psychiatre posa ses lunettes sur la table basse en bois parfaitement polis et articula ces quelques mots :

- Elizabeth, je ne faisait que vous testez et je crains que vous ayez une fois de plus échoué.

"Échoué" ce mot résonnait dans ma tête tel un écho rythmique sans fin, cela faisait déjà 4 fois que j'avais échoué aux test de stimulation, tout me paressait plus clair maintenant. J'avais toujours la respiration rapide et je commençais à abondemment transpirer.

- Marion ! appela t-il en s'adressant à mon infirmière à l'aide de l'interphone. Veuillez ramener Mlle Stonem dans sa chambre, sa séance est terminée et mettez la sous tranquillisants.

Ainsi Marion apparu et me guida dans mon boxe. Elle m'aida à m'allongé sur le lit avant de me faire prendre quelques pilules.

- Merci Marion, murmurais-je après avoir avalé les tranquillisants, le regard fuyant et craintif.

Elle étira son son visage joufflue, je distingua ses petites dents dorées, un sourire me faisait t-elle.

- Ça ne vas pas, j'ai l'impression... dit-elle.

- Non, ça ne vas pas du tout, acquiesçais-je.

- Tu devrais te reposer, je reviens dans environs 3 heures, dit-elle avant de s'éclipser.

- Très bien, parlais-je dans le vide.

J'inclinai ma tête vers la fenêtre, un petit groupe de patients s'amusait avec un ballon, d'autres jouaient aux cartes dans le jardin principale. Et moi j'étais clouée au lit une fois de plus dans cette étroite pièce blanche.

Je levai les yeux vers l'horloge, il était bientôt 16heures et les sédatifs allaient bientôt faire effet. Mes draps sentaient très fort la lavande, je déposai mon regard sur le bouquet de fleurs que m'avaient offert maman, de magnifiques tulipes « elles sont jaunes, cette couleurs va te redonner le sourire ma chérie » avait-elle dit. Mais ça n'étais point le cas, j'observais attentivement leurs pétales jaunes vifs - qui débutaient à faner d'ailleurs - mais en aucun cas elles me faisaient sourire, je restait froide et neutre face à cette vision, j'étais profondément incapable de sourire alors que j'étais coincée ici à être gavée de sédatifs et à faire quotidiennement des test, test auxquelles j'échouais en permanence.

Je me sens paralysé par une peur. J'ai peur, peur d'échouer, peur de haine que j'accumule depuis tant d'années ne sachant même plus d'où elle provenait, peur de replongé dans ce cercle vicieux qu'est la dépression, peur de me réveiller un jour et de me demander si cette journée sera la dernière, peur de l'avenir, peur de m'enivrer de négativité...
Ma respiration s'était enfin calmée, elle était à nouveau régulière, mes paupières s'alourdissaient et je cédai à un long repos.

Guns and Roses [En pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant