Take Part Of Your Future Life

Par ce début de weekend, un après midi d'avril 2078, dans la technocôle de Charillon /sur Vénus, deux meilleurs amis, Julie et Igor discutent devant le portail. Il est exactement 16 heures, 32 minutes, 18 secondes et 230 centièmes de seconde.

Les deux amis se connaissent depuis maintenant deux ans. Il arrive qu'ils viennent à discuter de sujets catégorisés "taboos" du point de vue de la société. Mais justement, c'est ça qui rend leurs discussions plus intéressantes et instructives que toutes les autres.

Julie, toujours enthousiaste à l'idée de débattre avec son camarade, entama une discussion avec un sujet quelqueconque comme ils en avaient l'habitude.

"Dis Igor, tu as appris ce que le proviseur a l'intention de mettre en place ?

- Heu... Le buffet à volonté de la cantine ? Je trouve ça chouette comme idée !

- Mais non... La robotisation des profs ! Tu n'en as pas entendu parler ?

- La "quoi" des profs ? répondit avec hésitation le jeune élève.

- La robotisation, articula Julie, tu ne comprends rien ! On dirait que tu viens du siècle dernier. Il faut que tu te mettes un peu à jour !
Un léger sourire se dessina sur les joues du garçon qui se contenta de baisser simplement les yeux comme pour réfléchir.

- Tu sais, je ne suis pas tout à fait contre cette idée. Je suis même carrément pour ! Tu imagines, les probots seraient vraiment efficaces. Ils voient tout ! Fini les tricheurs qui ont des meilleures notes que nous grâce à leurs antisèches ! Fini les profs sans objectivités qui t'enlèvent des points dans que tu saches pourquoi !"

"Mais l'erreur est humaine !" pensa Julie.

"Oh, oh... Calme toi ! Tu ne trouves pas ça dangereux toi. Le fait qu'un probot se fasse pirater par exemple... Ou même qu'il beugue pendant le cours. Il pourrait disjoncter ! En plus, ces machines ne sont pas conçues pour durer ! C'est hélas la dure loi de la consommation. Il pourrait donc y avoir des remplacements fréquents de probots. Et ça, c'est très déstabilisant pour notre scolarité, et surtout si je dois te le rappeler, nous allons passer notre D.I.N.T.E.M*, répondit Julie.

(*Diplôme Informatisé National des Techniques Électroniques Modernes)

- Mais n'importe quoi, s'énerva Igor, ces machines là sont justement programmés pour éviter ce genre d'accident. Surtout dans les lieux publics. Les robots ne sont pas dangereux. Je ne comprends pas pourquoi tu es tant effrayée. De plus, les probots savent tout, ils pourraient donc éviter un quelqueconque malaise, ou alors savoir si un élève simule une maladie pour rater du temps de cours à la salle de revitalisation médicale. Et puis, avec un robot en tant que professeur, on attendra plus 10 minutes dehors dans la cour de recréation. " 

Julie était ébahie devant un tel déchaînement de la part de son ami.
"Justement Igor, les robots sont parfaits, mais n'y a t-il pas un manque d'humanité derrière ce projet ? C'est beaucoup plus instructif et constructif si l'enseignant est vivant, non ?

- Tu as dans doute raison, déclara Igor, mais les probots ne sont jamais malades. On loupera donc moins d'heures de cours. Tu sais, quand tu ne comprends pas l'exercice qu'il faut faire et que le professeur vient t'expliquer personnellement, si il transpire ça va te dégoûter. Alors qu'avec les robots, il n'y aura plus ce problème là. Il est aussi question de confort derrière tout ça.

- C'est vrai. Mais penses tu à tous les devoirs à faire ! Les robots n'ont pas les notions de fatigue et de travail ! Et puis, tu sais... Si les robots occupent de plus en plus les postes de travail des humains. Notre espèce serait vouée à disparaître ! C'est effrayant !
Igor se sentit ému.

"Mais non, c'est bizarre, je ne peux ressentir d'émotions... Pourquoi suis-je atteinds par ces mots ?"

Il reprit donc :
"Moi j'ai confiance en cette entreprise de fabrication, c'est comme ma mère !
- Oui... Je le sais. Conclut Julie.
Elle se sentait incohérente.

"Je ne veux pas être en compagnie de probots dans mon quotidien, et pourtant Igor, lui, ne me dérange pas du tout ! "

Il ne restait plus qu'eux devant la technocôle.