PARTIE 2

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J'ai eu beau faire ça plusieurs fois depuis que j'ai sorti mon album, j'ai toujours autant de mal à m'y habituer. Les spots de lumière me donnent chaud et je suis stressé par tous ces regards sur moi, que ce soient ceux du public ou ceux des chroniqueurs sur le plateau TV. Je suis assis maladroitement sur un tabouret et je bouge nerveusement la jambe. Ça parle allemand autour de moi et je ne comprends pas. Un traducteur me parle dans une oreillette qui, d'ailleurs, n'arrête pas de glisser de mon oreille. Je sue. Je suis extrêmement mal à l'aise. D'autant plus que Mathieu, dans les coulisses, est juste en face de moi et me lève ses pouces l'air de dire " tu vas gérer ". Je déglutis.

Je reprends un peu mes esprits quand j'entends le jingle de l'émission, qui annonce qu'on change de rubrique  : musique. C'est mon tour. Je regarde vaguement autour de moi : des fans - des filles - sont dans le public avec des pancartes. Je leur fait un petit signe de la main en souriant sincèrement ; ça me fait plaisir de voir qu'on aime ma musique. Les chroniqueurs ont l'air heureux d'être ici en ma compagnie. La présentatrice, les cheveux courts à la garçonne et bleus foncés, commence à parler. En léger différé, la traduction française de ses questions me vient dans les oreilles. Je suis réponds, en français bien sûr.

- Je suis très heureux d'être ici. Il y a deux ans je jouais dans les bars de mon département et aujourd'hui je suis connu dans toute l'Europe et je suis en tournée en Allemagne. C'est dingue, et les fans sont super.

Je souris en leur faisant un signe, un sourire sincère placardé sur mon visage. Peu à peu, je me sens à l'aise. On parle de tout et de rien. Un nouvelle question après un long monologue me vient aux oreilles.

- Comment vivez-vous votre succès soudain ? Ce n'est pas trop difficile à vivre ?

- Hem... un peu. Les gens me reconnaissent dans la rue et me demandent des photos, des autographes. Je n'ai jamais vraiment aimé attirer l'attention, alors au début c'est sûr que ce n'est pas facile. Mais on s'y fait !

Je ris un peu. C'est lassant. Les questions sont souvent les mêmes dans toutes ces émissions et, à force, je suis habitué à donner les réponses adéquates. J'attends qu'on me pose une nouvelle question :

- Votre album est dans le top 10 de plusieurs pays, en concurrence avec de très grands artistes de la pop ou de grands groupes de rock. Êtes-vous fier ?

- Oui, extrêmement fier. J'ai écrit cet album dans ma chambre ou pendant mes cours au lycée. Ce sont des chansons qui me ressemblent, qui expriment ce que je ressens et c'est cool de voir que ça plaît aux gens, qu'ils l'écoutent et qu'ils l'achètent. Je ne pensais vraiment pas en arriver là.

C'est la vérité. J'ai écrit les 3/4 des chansons de cet album pendant mes cours de terminale au lycée ; les cours de maths où je ne comprenais rien ou les cours d'anglais qui m'ennuyaient à mourir car j'étais déjà bilingue depuis des années grâce à ma mère. Alors, voir mes titres dans les charts sur internet ou les entendre à la radio, c'est énorme.

- Pouvez-vous nous jouer l'un de vos morceaux ? Je crois avoir entendu que vous avez amené votre guitare.

- Hem... oui, bien sûr.

- Super ! Pendant ce temps là nous allons sélectionner plusieurs questions que vos fans vous ont posées via le hashtag de l'émission.

Je me lève, un peu paniqué - c'était pas prévu - et je cherche Mathieu du regard. Il me sourit, ma guitare acoustique entre ses grandes mains. Je manque de trébucher sur un câble quand j'arrive à sa hauteur. Il ricane, mais me fait les gros yeux.

- Hé...,  il dit entre ses dents. Souris un peu... et détends-toi, tu t'en sors très bien.

- Ok... et...

Grey StormOù les histoires vivent. Découvrez maintenant