Je plonge mon regard dans le sien.. Je ne vois que cruauté et haine dans l'expression de son visage.. Il bave presque.. Une détonation retentit et je vois la mâchoire de mon ennemi se décrocher dans un flot de sang et de dents. Il reste figé, surpris par la balle qui venait de lui arracher la moitié du visage.
Il me fixait toujours mais la lueur meurtrière qui émanait de ses yeux semblait s'être éteinte. Il essaie de parler mais il n'émet qu'un gargouillis répugnant doublé de suffocations. Une deuxième balle l'atteint et là, son crâne explose comme un fruit trop mûr. Du sang m'atteint au visage et je m'écroule. Ma vision était trop altérée pour rester debout. Entre le manque d'oxygène résultant de ma strangulation antérieure et le sang du soldat allemand, la meilleure solution est de faire croire que j'ai moi-même reçue la balle. Un poids vient me couper la respiration. J'essaie de le lever, le faire basculer sur le coté, creuser un peu le sable pour me glisser mais rien à faire. Je m'essuie le visage avec le seul membre qui n'est pas écrasé par la masse qui vient de me clouer au sol : mon bras gauche. J'écarte de mes paupière le mélange d'os, de sang et de cervelle qui commence déjà à coaguler. Ma vision reste floue mais j'ai pu voir l'insigne du soldat. Je comprends mieux maintenant. Le cadavre qui me plaque au sol dans une étreinte mortelle est celui du soldat allemand. Il m'aura fait chier jusqu'au bout celui-là ! Des mains saisissent le corps et le renverse sur le coté.
Je prends une grande goulée d'air et je me met assise. Je suis dans un bon état dis-donc ! Mon casque est tombé et a roulé à deux bons mètres de moi. Mes cheveux se sont détachés et tombent en cascade sur mes épaules. Ils sont pleins de sable mais ce qui m'embête le plus c'est les bandages qui retenait ma poitrine. Ils se sont desserrés et je les sens reposer sur ma taille, complètement détendus. Pleins d'images se secouent dans ma tête. Le soldat, la plage, les explosions au loin et.. on crie mon nom.
Je vois les garçons arrivés et le premier qui se trouve être Rayan me regarde avec un mélange de stupéfaction et d'interrogation. Avant qu'il n'ouvre la bouche, je le regarde sévèrement et il comprend qu'il doit fermer sa grande bouche. Les deux autres arrivent juste derrière et ne peuvent constater que la même chose que leur compère. Ils essayent tous de parler en même temps. L'un parait consterné, le deuxième curieux et le troisième complètement abasourdi. Comme quoi, y'a pas besoin de voir quelqu'un se faire étriper pour forcement perturber quelqu'un, une poitrine et des cheveux longs suffit.
"- Taisez-vous ! Je comprends rien de toute façon."
Je ne prends pas la peine de remettre mes bandages. Je me contente de renouer mes cheveux et je remet mon casque. A peine nouer, la sangle du casque casse et il tombe mollement dans le sable. Tant pis, mes cheveux resteront tel quel. Je ramasse mon arme et me met face à eux. Ils ont l'air totalement perdu. Peter bredouille
"- Tu.. ouah.. putain.."
Alec passe devant lui en le bousculant
"- On ne dira rien. Ne te fais pas de soucis."
Derrière lui, Peter et Rayan acquiescent d'un signe de tête.
je regarde longuement le corps du soldat allemand décapité par la puissance du tir qu'il a essuyé un peu avant. Je me met accroupi et je le fouille. Je regarde dans chaque poche et chaque pli de vêtement. Je trouve un bon petit paquetage. Quelques morceaux de pain, une montre à gousset, deux couteaux élégamment gravés de lettres d'or et un petit carnet accompagné d'un petit crayon de papier dont la mine est cassé. Je tends la nourriture à mes camarades. Je regarde la tocante. La vitre est brisée et la grosse aiguille est pliée en deux. Je la fourre dans ma poche. Je regarde le petit carnet. Il est petit mais assez épais. Le cuir paraît de bonne facture. Un petit cordon le retient à la poitrine du soldat et j'en déduis que le bout de ficelle sert aussi à fermer le petit carnet. Je tire un coup ferme dessus et j'ouvre l'objet étonnamment propre vu les conditions de son propriétaire...
