FORGET.

Réveil 2

Kloée courait. La forêt dans laquelle elle se trouvait semblait vouloir l'avaler, les arbres ayant l'air de se pencher sur elle. Des branches lui griffaient le visage et les bras tandis qu'elle trébuchait sur des racines. Il faisait jour mais l'épais feuillage des immenses piliers de bois qui la surplombaient empêchait la plupart de la lumière de passer.

- ____ !
Elle se dirigeait vers la voix lorsque ses pieds se dérobèrent sous elle.

***
Kloée se réveilla d'un coup dans son lit d'hôpital. Comme le jour d'avant, elle ne ressentait ni la faim ni la fatigue. Elle regarda autour d'elle, les derniers vagues souvenirs de son rêve s'échappant peu à peu de son esprit.
J'étais dans une forêt, je crois...
Les murs de sa chambre temporaire demeuraient blancs comme la veille, mais quelque chose dans la pièce la dérangeait.
Les meubles. Ils sont bleus.
Le bureau, la chaise, la porte et même son lit avaient changé de couleur pendant la nuit, passant d'un blanc presque trop éclatant à un profond bleu nuit.
M'ont-ils déplacée pendant que je dormais ?
Elle secoua la tête.
Impossible. Tout est exactement à la même place, et je doute que l'on trouve deux chambres avec la même tache sombre dans un des coins supérieurs, occupé d'ailleurs par une identique araignée, se dit-elle en frissonnant à la simple pensée de cet animal repoussant.
Kloée se leva en tentant de faire abstraction de l'abominable bestiole, et se dirigea vers la modeste salle de bain pour faire une toilette rapide.
Tiens ! Je n'ai ni cernes ni acné ; au moins un bon point pour ma rentrée.
Elle finit rapidement de s'essuyer le visage avant de se diriger vers sa spartiate chambre, où l'attendait déjà une infirmière.

- "Bonjour !"
Elle sursauta, n'ayant pas entendu entrer l'intruse depuis l'autre pièce.
La main sur le coeur, elle s'exclama :

- "Vous m'avez fait peur ! Comment avez-vous fait pour être si silencieuse ?"
Je ne sens pas mon coeur battre ! C'est... c'est sans doute à cause du tissu ! Mais alors pourquoi je ne ressens rien de particulièrement fort ? Mon sursaut était plus un réflexe que réellement dû à la peur, et depuis hier je ne peux rien ressentir de plus que des émotions légères, comme de la satisfaction, ou une légère inquiétude pour ce qui m'attend. Rien de trop profond, pas de colère, de tristesse, de peur ou même un brin d'amour. Quoique, peut-être que c'est normal pour mon cas ; après tout j'ai perdu tous mes souvenirs de les avoir jamais ressenties... C'est tout de même étrange.
Elle rit.

- "On me le fait souvent remarquer, je suppose que c'est un don."
Kloée l'observa avec curiosité. La femme était vêtue d'une tenue d'hôpital d'un bleu-vert relativement commun.

- "Dépêche-toi de t'habiller", continua-t-elle, "il faut que l'on attrape quelque chose à manger pour le petit-déjeuner avant de partir."
À ces mots l'amnésique enfila ses chaussettes et son jean, avant de balayer la pièce des yeux, se rendant compte qu'elle n'avait rien à oublier.

- "Je suis prête !"
L'infirmière acquiesça de la tête. Elle se dirigea ensuite vers l'entrée en lui faisant signe de la suivre. Elles croisèrent plusieurs patients et personnels de l'hôpital dans la même tenue que la femme alors qu'elles suivaient le couloir le long duquel se situait la porte de sa "chambre".
Il me semblait être venue par l'autre côté, la dernière fois.
Le duo s'avança jusqu'à un ascenseur, qu'elles empruntèrent pour se rendre au rez-de-chaussée. L'entrée du self de situait juste en face lorsqu'elles en sortirent.
Je n'avais pas vu l'ascenseur hier ; il n'y avait qu'un mur ?
Une odeur alléchante embaumait la salle de restauration de l'hôpital. La jeune patiente reconnut les arômes distincts du café moulu et du jus fraîchement pressé, accompagnés de celui des pâtisseries tout juste sorties du four.

- "Je pense prendre un croissant nature avec une demi-baguette de pain, beurre et confiture inclus bien sûr, ainsi qu'un jus d'orange et un café noir. Est-ce que la même chose t'irait ou veux-tu un petit-déjeuner plus salé ?" lui demanda l'infirmière avec un léger sourire.