Le Saule Pleureur

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    La journée n’avait pas été bonne pour Anselme ; il décida de se changer les idées par une promenade le long de l’Ill , promenade qu’il aimait bien et connaissait par cœur. Comme souvent, il observait les maisons alsaciennes autour de lui avec mélancolie “ Encore une journée à mourir d’ennui… ” se lamenta-t-il. Son professeur préféré était malade et son remplaçant gâchait cette matière si intéressante ! Il marchait perdu dans ses pensées, quand soudain, des cris le sortirent de sa rêverie. Plus loin, plusieurs personnes étaient attroupées autour d’un arbre. Il y alla finalement, à contrecœur. Une fois arrivé au niveau de cet arbre, il fut fasciné par le spectacle qui s’offrait à lui.

    Enroulé dans les branches de cet arbre, un petit serpent au regard bleu profond fixait Anselme. Soudainement, il fut comme envoûté par son regard. Quand il réussit enfin à détourner ses yeux du serpent, tout était différent : la foule avait disparu et il régnait une atmosphère étrange. Après avoir jeté un dernier coup d’œil au serpent, il tourna les talons et rentra chez lui. Une fois arrivé dans son appartement, il voulut se renseigner  sur ce mystérieux serpent. Il fut étonné que ses recherches ne menèrent à rien, malgré une légère ressemblance avec le python royal. Étant jeune étudiant en sciences, son enquête aurait dû aboutir à un résultat plus précis. Déçu, il finit par aller se coucher.

    Tout le reste de la semaine fut encore plus monotone que d’habitude, il finissait ses journées le long de l’Ill où plus personne ne se promenait. Aucun passant, tous les bateaux étaient amarrés à quai, tout était silencieux, seul le vent qui soufflait dans les arbres et le bruit de l’eau étaient audibles. Chaque soir, il s’asseyait au pied de l’arbre où il avait vu ce fameux serpent, en attendant une nouvelle apparition, mais en vain.

    Le lundi suivant, après une heure à attendre ce serpent, Anselme se leva et s’apprêta à partir lorsqu’une voix féminine l’interpella : “ Je pense que nous cherchons la même chose. Ce serpent est introuvable depuis une semaine. ” Anselme se retourna pour découvrir le visage de son interlocutrice, mais personne.

“ Tu te souviens, le soir où tu l’as vu, j’ai crié ton nom mais tu ne m’as pas entendu, débuta-t-elle

- Et… Tu connais mon prénom.

- Évidemment, tu t’appelles Anselme.

- Puis-je voir ton visage ?

- Tu le verras bien assez tôt.

- Quel est ton nom ?

- ...Iris. ”

Même si Anselme trouvait cette discussion très étrange, il aimerait qu’Iris devienne son amie. Ayant un physique avantageux, (grand, élancé, blond aux yeux verts) des tas de filles lui couraient après, mais aucune ne l’intéressait. Tout à coup, des maux de ventre l’attaquèrent. Une fois assis, il sentit une fine brise effleurer sa peau. Il sursauta quand il entendit Iris dire :

“ Qu’y a-t-il ?

- Oh rien… Ce ne sont que de simples maux de ventre.

- Ça va aller ? Veux-tu que je te raccompagne ?

- Ne t’inquiète pas, je n’habite pas loin. ”

Sur cette phrase, il laissa sa nouvelle amie et rentra chez lui. Arrivé devant chez lui, il cherchait ses clés, mais ne les trouvait pas, quand quelqu’un lui dit : “ Elles sont là. ” Il reconnut immédiatement la voix d’Iris mais quand il se retourna la seule chose qu’il vit fut ses clés qui flottaient dans les airs. Le jeune homme apeuré dit :

“ Comment es-tu arrivée là ?

- Je t’ai suivi, tu avais fait tomber tes clés, et comme tu es malade, je voulais vérifier que tu arriverais chez toi en un seul morceau.

- Comme tu peux le voir, je suis toujours vivant. ”

Il s’avança vers ses clés et les récupéra.

    Il finissait ses journées au pied de l’arbre où il avait vu le serpent. Ce saule pleureur était le seul de toute la promenade. Anselme y retrouvait Iris pour chercher le serpent tout en discutant de tout et de rien. Quand ils eurent l’idée d’aller voir dans les branches de l’arbre, ils découvrirent une mue du serpent accompagnée d’un petit mot. “ Si tu veux retrouver ce serpent, suis mes instructions. Chaque soir tu viendras et un défi tu relèveras, lut Anselme à voix haute.

- C’est pour ça que nous ne retrouvons pas ce serpent ! Il a été mis en cage ! s’écria Iris, affolée.

- Pourquoi suiverions-nous ses instructions, ce n’est qu’un simple serpent !

- Mais tu l’as bien vu ce serpent n’est pas commun, il ne ressemble pas aux autres.

- Nous allons réfléchir à tout ça chez moi. ”

    Une fois chez Anselme, ils discutèrent du serpent et décidèrent de le retrouver. Ils s’endormirent finalement sur le canapé. Une fois reposée, et sans qu’Anselme s’en rende compte, Iris partit en direction du parc, un bout de papier à la main. Elle réfléchissait sous le saule pleureur quand Anselme arriva en criant : “ Iris, es-tu là ? ” Elle ne répondit pas. Quand Anselme s’approcha d'elle, il vit le bout de papier. “ C’est grâce à votre confiance en l’autre que vous réussirez cette épreuve : Iris mets-toi derrière Anselme, et rattrape-le quand il tombera en arrière. ” lut Iris à haute voix. Quand ils furent en place ; Anselme dit :

“ Hors de question que je tombe dans tes bras, je ne te vois même pas !

- Mais si tu veux retrouver ce serpent, il va falloir que tu me fasses confiance ! ”

A ce moment précis, Anselme eut une vision du serpent, il en fut tellement troublé qu’il tomba en arrière. Il se réveilla après un léger malaise dans les bras d’Iris.

“ Je croyais que tu ne voulais pas le faire, débuta-t-elle

- J’ai vu le serpent quand soudain je me suis senti comme poussé en arrière.

- Impossible ! Il est en cage !

- Comment sais-tu cela ?

- Et bien… C’est parce que c’est moi qui ai fait ça…

- Mais pourquoi ?

- Parce que j’avais peur que tu me rejettes si je n’avais pas capturé ce serpent.

Maintenant ferme les yeux, compte jusqu’à deux, et rouvre-les, dit-elle après un silence pesant. “

Anselme s’exécuta, pendant ce court moment, le jeune homme eut des frissons et se sentit vaciller.  Quand il rouvrit les yeux, il fut à la fois effrayé et impressionné par ce qu’il entendait : il y a quelques instants, tout était silencieux mais depuis que ses yeux étaient ouverts, il entendait les cris des passants heureux qui ne se promenaient plus ici depuis l’apparition du serpent.

    Quand il se retourna pour demander à Iris si c’était possible, il eut le souffle coupé. Iris se tenait devant lui, enfin visible, le fameux serpent sur son épaule, il en eut des papillons dans le ventre.

“ Pourquoi n’ai-je pas vu ton visage plus tôt ?

- Mais ne dit-on pas que l’amour rend aveugle ?… ”






                                Fin.

Le saule pleureur (Nouvelle) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant