L'Ombre (Victorian Johnlock)

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Au cours de nos longues années de collaboration, Holmes et moi avons été confrontés a de très nombreux mystères. Mon détective vint à bout de la grande majorité, bien entendu, son brillant cerveau démêlant avec succès les plus terribles écheveaux.

Parmi toutes ces affaires, bien nombreuses sont celles qui se sont présentées à nous sous le couvert du fantastique. Je me souviens, évidemment, du chien de Baskerville, du vampire du Sussex, ou encore du vers mystérieux d'Isadora ; mais le passage de Holmes avait vite fait de déchirer ce tissu d'illusions, révélant derrière les mensonges un héritier vénal, une mère inquiète, ou une femme haineuse.

Et pourtant... Pourtant, parmi toutes ces affaires, il s'en trouve quelques-unes que je ne peux qu'évoquer avec un frisson glacé, même aujourd'hui, même sous le soleil du Sussex, alors que le ciel est bleu et Holmes vêtu de blanc, au fond du jardin, une ruche à la main.

Car parmi tous les mystères qui nous ont été confié, certains ne relevaient simplement pas du règne des mortels.

Les années ont passé, depuis ce terrible octobre 1895. Mais jamais je n'oublierai ni le froid, ni le brouillard qui avait engloutit Londres, cette année-là, ni les terribles évènements qui nous ont presque coûté la vie, à Holmes et moi.

~

La nuit tombait à peine. Nous étions assis face à face, chacun confortablement installé dans son fauteuil, devant la cheminée de Baker Street. Madame Hudson s'étant rendu au chevet de sa sœur malade, nous étions seuls pour quelques jours.

Holmes fumait distraitement, perdu dans ses pensées. Le journal que je lisais gisait sur mes genoux. Le menton posé dans la paume de la main, j'étais perdu dans la contemplation de son visage. Cela faisait presque six mois que Holmes m'était revenu, mais il m'arrivait toujours de ces instants de panique où je le croyais perdu, où j'oubliais qu'il était de nouveau là, avec moi, que je n'étais plus seul, et qu'il n'était pas mort. Il m'arrivait encore de me réveiller en sursaut, couvert de sueur, les oreilles emplies du terrible grondement des chutes de Reichenbach...

Mais il était là. Il était là quand je me réveillai, pour m'embrasser et m'aider à me rendormir, il était là lorsque j'insistai pour le suivre partout, craignant de l'étouffer, mais bien plus terrifié à l'idée de le perdre de vue. Il était là.

Son regard croisa le mien et ses lèvres étirèrent un sourire amusé. Je souris en retour et me levai pour me diriger vers la fenêtre, déposant au passage un baiser fugitif sur le haut de son crâne.

Londres n'existait plus. Le brouillard avait tout engloutit, dévorant jusqu'aux façades d'en face. Un brouillard lourd, épais, qui étouffait la ville depuis le début de l'après-midi, nous confinant dans nos appartements. Si un criminel avait été assez fou pour sortir par ce temps, ni le détective ni moi n'en avions été informé, et, pour une fois, même Holmes s'en félicitait.

Une violente bourrasque fit frissonner la vitre, déchirant un petit cri avant de s'évanouir. Je frissonnai à mon tour, peu rassuré. Après tout, je venais d'une famille paysanne. Combien de soir de mon enfance s'étaient écoulées dans le salon, au coin du feu, alors que la grand-mère nous contait, à mon frère et moi, de terribles histoires d'esprits, de diable, de démons et de fantômes maudits ? Nous étions le soir de la Samain et, malgré toute mon expérience médicale, malgré toutes ces années passées près d'un esprit aussi rationnel que celui de Holmes, l'enfant en moi ne pouvait s'empêcher de frémir en se remémorant les récits de la grand-mère.

-On dirait que le voile qui sépare notre monde de celui des morts résistera une année de plus, souffla Holmes dans mon oreille avant de passer ses mains autour de ma taille.

Petites nouvelles de Samain (OS Johnlock - Mystrade)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant