Je n'avais pas pu dormir. Je n'arrivais pas à réaliser. Demain à la même heure, j'allais dormir au château d'Illeá ! Moi, à Angeles ! Cela paraissait si loin quand on le voyait à la télévision...Après une nuit passée à fixer le plafond en me demandant si je n'étais pas juste en train de rêver, je sortais donc de mon lit en douce pour ne pas réveiller ma jumelle qui dormait dans la même chambre que moi. En arrivant dans le salon, mon premier réflexe fut de regarder l'heure : 4h00. En voyant ma valise trôner au milieu de la pièce, un besoin inexplicable, comme une sensation de malaise au fond de moi, me fit quitter la maison familiale. Je sorti sans laisser de mot, tout le monde saurait bien que j'étais partie me vider la tête.
Je marchais seule sur le port depuis une minute, ou peut-être une heure, j'avais perdu la notion du temps. L'air frais rempli d'embruns de ma province me faisait du bien, il allait me manquer... On m'avait dit qu'à l'Ouest, il faisait plutôt chaud très tôt jusqu'à très tard et que, de toute façon, en tant que sélectionnée, je n'aurais pas le droit de sortir la nuit. Adieu, ma liberté, mais il s'agissait d'un sacrifice à faire pour atteindre mon objectif et je n'avais jamais reculé devant un sacrifice personnel. Le soleil était en train de se lever, il devait être environ cinq heure et demi, plus que temps de rentrer. Je rebroussai chemin. La boule qui me retournait les entrailles s'était un peu dissipée et j'allais pouvoir finaliser mon départ...
Arrivée chez moi, la maison se réveillait doucement. Je vis ma mère qui s'affairait autour de ma valise avec un tas de vêtements chauds.
"- Tu as pris une valise trop petite Pinda ! Tu vois bien que tu n'as pas la place de prendre de quoi te couvrir...
- Je pars à Angeles, Mamusia, pas au Groenland... Il fait grand minimum -7 degrés en hiver et on est en mai ! Je ne vais pas mourir de froid !
- C'est ce que je lui répète depuis une heure !"Je me retournai vers mon père qui me souris. À ses cernes, je pouvais dire qu'il n'avait pas beaucoup dormi non plus... Je le pris dans mes bras tandis qu'il me murmurait :
"- Comment tu te sens ?
- C'est la chance de ma vie, Tato.
- Ça ne répond pas à ma question...
- C'est la seule réponse que je peux t'apporter..."Il me lança son regard sévère de Professeur en colère mais je lus dans ses yeux bien d'autres sentiments : de la tristesse, de la crainte, mais surtout, de la fierté, et cela me mit du baume au coeur.
"- Où sont les autres ?
- Ton frère dort encore et ta soeur est sous la douche.
- Tu as déjeuné ?"L'intervention de ma mère me fit lever les yeux au ciel. Je m'apprêtais à lui assurer que oui mais mon ventre se chargea de démentir mes propos dans un grognement affamé. Il n'en fallu pas plus à maman pour filer dans la cuisine, sous le rire franc de mon père.
"- Je te laisse te préparer.
- Merci Tato."Sur ce, il m'embrasse sur le front avec un sourire et je pars dans ma chambre. Je fus seule dans la pièce vide. Lançant instinctivement un regard à mon lit, j'y remarquai un sac de voyage. Ma mère avait réussi par je ne sais quelle magie à y faire rentrer deux gros pulls et un gilet en maille. Je les y laissai, ça lui ferait plaisir.
Avec un soupir, je me dirigeai vers mon armoire pour l'instant fatidique de l'habillage... Que mettre ? Quelque chose qui me ressemble, c'est clair, mais quoi ? Mon regard se posa sur un coin sombre du rangement. Là, une robe à la coupe originale et rétro d'un vert profond attira mon attention. La dernière fois que j'avais porté cette robe, c'était pour accompagner mes parents voir une de leurs pièces de théâtre modernes où ils nous traînent... Autant dire qu'il était plus que temps de redorer l'image de cette robe ! Je l'attrape et l'enfile avec une paire de collants quand j'entends derrière moi un sifflement admiratif.
- Je ne vois même pas pourquoi on fait une sélection quand le prince pourrait juste te demander en mariage !
Je ris à ces propos. Ma jumelle me souriait dans l'encadrement de la porte, ses cheveux mouillés tombant en longues mèches sur son visage. On se précipita dans les bras l'une de l'autre, déchirées entre joie et désespoir. Elle finit par me lâcher, son sourire lumineux toujours accroché à ses lèvres.
"- Allez viens ! Je vais m'occuper de ton visage et de tes cheveux !"
Elle m'entraîna dans la salle de bain et je la suivis sans broncher. Elle me fit assoir sur le bord de la baignoire et attrapa un bandeau. Elle commença alors à me maquiller et je me laissai faire, trop heureuse d'être chouchoutée comme ça. Pour mes cheveux, elle opta pour un bun tout simple retenu par un bandana vert bouteille. Je contemplai le résultat avec émerveillement.
"- Les autres filles n'ont aucune chance...
- Tu m'étonnes ! Tu vas leur montrer à ces gosses de riches !"Ai-je précisé qu'on était pas super fan des bourgeois dans ma famille ? Presque fin-prête, je sortis de la petite salle de bain et repartis vers la cuisine où mon petit déjeuner m'attendait. Mon frère était là, à moitié réveillé et je soupçonnais mes parents de l'avoir fait se lever contre son gré.
"- Bonjour frangin !
- Grmmfh..."Je n'obtiendrais pas mieux de lui pour l'instant... Je m'apprêtais à manger enfin cette appétissante assiette d'oeufs brouillés quand la sonnette retentit, manquant de me faire m'étouffer. DÉJÀ ?! En panique, je me levai et couru vers l'entrée quand je cru entendre des voix familières. Non... Ce n'était pas possible...
Et pourtant si, elles étaient là, mes deux soeurs aînées, resplendissantes comme toujours. Cette fois, c'en était trop, je ne pu retenir mes larmes, vive le masquara waterproof ! Je me jettai dans leur bras en pleurant chaudement. Cela faisait un an que je n'avais pas vu Junie et sept mois que Riva était partie dans l'Ottaro pour ses études. Nous fûmes bientôt rejointes par Naami, maman, papa et Jeremiah, si bien que l'entrée devenait un peu étroite et que nous dûmes passer au salon.
L'heure passa vite. Nous avions finalement déjeuner dans le salon, la seule pièce assez large pour tous nous accueillir, en parlant et en riant comme avant le départ des deux aînées. Quand le garde du corps arriva enfin, j'étais prête. Je dis rapidement au revoir à toute ma famille et, mes sacs chargés dans la limousine, je montai à mon tour en faisant d'immense signe de la main à mes proches jusqu'à ce qu'ils disparaissent au coin de la rue.
Arrivée à l'aéroport, de nombreux gens commencèrent à me saluer en criant. Impressionnée, j'appris que certains étaient là depuis la veille pour avoir la "chance" de me parler. Je souriais, du plus authentique des sourires car j'étais fière, fière d'être moi, fière d'être ici, fière de ces gens, et surtout, fière de les représenter à partir de maintenant. Forte de ce constat, je m'envolai vers Angeles...
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J'espère que c'est pas trop !
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Lilith Stokes-Barnes [RPG La Sélection]
RandomMa sélectionnée pour le RPG de @Persephone-X-IV