Chapitre 1 : Les disparus

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Au petit matin d'une journée hivernale au froid particulièrement rude, les elfes, et leurs esclaves humains, s'activaient. Au cœur de la forêt elfique de Dafaorn, le village de Ladros apparaissait comme l'un des plus riches.

Situé à seulement trois jours de marche des montagnes de Khazdon, la population se vantait de ses équipes de collecteurs, véritables experts dans la recherche des minerais les plus rares, qu'ils acheminaient en quantité jusqu'à leurs meilleurs artisans.

Doué pour le travail du métal grâce à leur technique transmise depuis des siècles, et une maitrise particulièrement fine de la magie, les elfes de Ladros jouissaient en contrepartie d'un train de vie élevé, gérants bien mieux leur économie que leurs concurrents. Ces bienfaits provenaient en partie du travail acharné de leur chef, Anulis. Un sage, ayant déjà soufflé cinq centenaires.

Anulis voyait les chances de profit partout. Il poussait la traite des esclaves humains jusqu'à ses limites, même au coût de leurs vies. L'elfe avait remarqué la capacité des humains à se reproduire rapidement. Il lui était apparu bien plus rentable de les user jusqu'à la mort, et d'en acheter d'autres, plutôt que de les ménager, ou d'investir dans des infrastructures pour leur permettre de se reposer. Il entrevoyait même la possibilité de les forcer à se multiplier, en les traitants comme du vulgaire bétail.

Le chef de village trouvait même une utilité aux demi-elfes, preuves des sévices commis par les elfes sur les humaines. Les enfants de tels unions, incapable de faire appel au mana comme leurs mères, possédaient pourtant une faculté accrue à sa détection. De parfaits petits appâts, qu'il suffisait de ligoter dans la forêt autour du village. Si l'un d'entre eux hurlait, alors une menace approchait. Et ils tenaient assez à la vie pour crier avant de se faire trancher la gorge par un assassin d'un village rival.

Assis à son bureau, Anulis se frotta les yeux. Il ne sortait guère plus de sa maison perchée sur les cimes des arbres de Ladros. Le travail s'accumulait toujours, et il cherchait les meilleures solutions à chaque problème. Pour les elfes de sa communauté, les nuits sans sommeil ne le terrasseraient pas.

Pourtant, il se trouvait aujourd'hui préoccupé. L'aube et le bruit de son peuple en contrebas l'avaient tiré de sa réflexion, pourtant, il ne tenait toujours pas cette meilleure solution. Lorsqu'on toqua à sa porte, il comprit qu'il devrait faire avec son dernier recours.

— Veuillez entrer, lança l'elfe d'une voix grave, aux visiteurs qu'il attendait.

A l'ouverture de la porte de bois, soigneusement vernis, quatre silhouettes s'avancèrent dans la pièce. D'un geste, Anulis les invita à prendre place devant son espace de travail, sur les chaises qu'il réservait en ces occasions. Le plus âgé vint se placer face à lui. Volonario, un elfe mage centenaire. Des cheveux blonds coupés courts, une robe pourpre attestant de son ordre. Aux yeux d'Alnus, le magicien incarnait l'idéal qu'il espérait pour les siens. Pragmatique, la tête-froide, et sans pitié pour les humains qu'il voyait également comme une simple ressource.

A la droite de Volonario vint s'assoir une elfe à l'apparence bien moins sobre. Homa, la jeune femme aux cheveux de feu, et dont la courte robe écarlate apportait le doute quant à la réalité du froid qui s'infiltrait de toutes les ouvertures de la maison du chef de village. La rapière pendue à sa hanche témoignait de ses talents d'escrime, et chacun des mouvements de la jeune elfe témoignaient de la grâce acquise avec l'entrainement. Anulis se souvint que Homa approchait bientôt de la vingtaine d'années, et qu'elle souhaitait pourtant déjà participer au prochain rituel de vie pour devenir une matriarche. Elle s'émanciperait de sa famille pour fonder la sienne.

Le frère cadet d'Homa, Anzu, posa son bâton contre un mur avant de prendre place à son tour. Le regard absent, cet enfant possédait un talent immense pour son âge, et était intimement lié à la nature. Aux yeux d'Anulis, le garçon abritait en lui le potentiel d'intégrer un jour le prestigieux ordre de vie, une organisation au sein de Dafaorn au plus prêt des enseignements de la déesse Liarilia. Pour s'assurer que cet honneur rayonne sur Ladros, le chef de village comptait affuter le jeune elfe dans les années à venir, pour en faire un mage de tout premier plan.

Les collecteursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant