Pourtant, pourtant et bien la tentation est toujours aussi forte. C'est tellement plus facile de se laisser noyer en eaux troubles, tout est flou, tout est lointain, et le temps de quelques heures, je peux me séparer de mon corps, je peux arrêter d'être moi et frôler une vie normale. Alors, lorsque nous finissons par pénétrer dans l'énorme maison retirée dans la montagne, j'agis comme si j'avais des oeillères et me contente de suivre aveuglement Emilie en esquivant tout alcool présent. Nous trouvons enfin les filles après avoir circuler entre les pièces bondées de la maison, elles sont accompagnées par les filles d'Annemasse ainsi que des équipes masculines de nos deux clubs. Mon regard s'égard dans la foule, me rappelant combien je trouve genre d'événements oppressants. Je souffle un bon coup avant de me retrouvée littéralement le souffle couper. Pas une seconde il ne m'était venu à l'esprit que les équipes d'Annecy pourraient aussi être invités, et donc, je n'ai pas imaginé que je recroiserais le garçon aux cheveux châtain.

Je baisse les yeux, espérant devenir invisible, et me colle à Emilie. Je serre les dents alors que mon estomac s'agite. J'ai vraiment envie d'un verre. Je sais que ça m'anesthésierait, mais je résiste, si j'en bois un, je sais que je finirais par en boire d'autres, et c'est loin d'être une bonne idée. Je me ressaisis et reprend consistance, je n'ai pas besoin de ce liquide pour me changer les idées. J'intime à Emilie que je vais danser, et elle acquiesce en me disant qu'elle garde son telephone sur elle au cas où. Je m'éloigne de mon amie, et par la même occasion, du garçon. J'entre dans l'énorme salon où la musique semble être la plus forte. Des lumières me frappent la rétine et les murs tremblants semblent poussés par la foule qui saute et crie encourageant le DJ à faire monter le rythme de la musique électro qui crève mes oreilles. Je me prend au jeu, c'est plus simple de danser avec un verre, ou en aillant bu. Je chasse cette pensée et me contente de sauter moi aussi au rythme du beat de la musique. C'est plaisant, agréable même, si bien que j'arrive à ne me concentrer que sur le moment présent.

Evidemment, rien n'est éternel, et une main se pose sur ma taille. Mon coeur s'accélère et je sens la panique paralyser tout mes membres. Je repousse la main qui envahit mon espace personnel sans me retourner et m'éloigne du centre du salon. Manque de chance, le type me suit, insistant, bourré, faisant jaillir en moi des flashs et un dégoût profond qui se rajoute à cette sensation de déjà vu. Sa main se pose à nouveau sur ma taille et ma respiration se bloque lorsqu'il s'approche de mon oreille en me demandant de venir avec lui dans une chambre. Je repousse à nouveau sa main et lui demande de me lâcher. Ce n'est pas de la peur qui m'envahit cette fois, je n'ai pas peur, je ne suis plus une enfant effrayée, je suis une enfant en colère, et je me délecte de la rage qui me prend aux tripes. Je me surprend à l'imaginer à nouveau me toucher pour que je puisse évacuer cette fureur qui m'étouffe. Et, comme s'il avait entendu mes pensées, il attrape mon poignet et je finis par me retourner en accompagnant mon geste d'un coup de poing. Il n'y a que quelques moyens de se reconstruire lorsqu'on nous arrache quelque chose auquel on tenait. La seule manière viable pour moi était la rage. Alors j'ai du apprendre à frapper.

L'adrenaline s'empare de mon corps, bien mieux que n'importe quel alcool, puissante, gouteuse, addictive. L'ivrogne est costaud, mais il titube en se tenant la joue, loin d'imaginer qu'une fille puisse lui retourner un coup. Il pose une main sur sa mâchoire et un sourire mauvais se dessine sur ses lèvres. Sa main s'abat fermement sur mon visage et le gout métallique du sang vient titiller mes papilles. J'évite son second coup et lui donne un coup à mon tour. Cette fois, ce n'est pas un coup qui envoie, mais simplement sa main qui vient se refermer sur ma gorge et me coller contre le mur. Boostée par l'adrenaline, je ne ressens pas bien son emprise sur ma gorge. Je me débats pendant quelques secondes et fini par lui coller un grand coup de pied entre les jambes. Il couine comme un chien et me lâche en se recroquevillant sur le sol. Maintenant, j'ai besoin d'un verre. Je n'avais pas remarquer qu'autour de nous, un cercle silencieux s'était formé. La musique s'était arrêtée et les yeux curieux me scrutaient. Je les ignore, porte ma main à ma bouche et regarde mes doigts. Du sang. J'ai la lèvre fendue, probablement des bleus, et j'ai du mal à respirer. Mais peu importe, je veux à boire. J'attrape une bouteille et sors dans l'immense jardin de la propriété.

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