Je marchais là, dans ce couloir froid où les gens passent sans prendre le temps, jamais. Je marchais là, étant bousculée et bousculant, slalomant entre ces corps, ces corps d'adolescents, ces corps recroquevillés. Ils ressemblent à des tiges, des fleurs qui n'ont pas encore leurs pétales. Il y en a qui font semblant alors on peut les imaginer et tout de suite c'est plus plaisant, plus équilibré. Il y en a qui en ont déjà, ou qui s'efforcent de les faire pousser, ceux là, je les aime bien, peut être parce que j'en fais partie alors je les comprends. Ils sont courageux et matures, j'aime ça.
Je marchais donc là, encerclés par des casiers bleus et uniformes quand j'ai fini par en avoir marre de marcher derrière toi et ton pull rouge trop grand. Je ne saurais dire si je voulais voir ton visage et avoir le privilège de te frôler ou si tu étais tout simplement trop lent pour que j'atteigne mon casier avant la sonnerie. Je ne le saurais sans doute jamais, maintenant que tout est teinté d'orangé.
Je t'ai jeté un regard en coin et j'ai découvert ton visage, j'ai tout de suite su que tu étais une tige pourtant tu étais loin d'être laid. Très loin. Mais tu étais proche de moi, par contre, alors tu as bien dû remarquer que je te fixais et tu t'es tourné vers moi. J'ai accéléré, rosie de honte et mon casier m'est apparu, enfin.
Je l'ai ouvert, toujours fébrile, et j'y ai déposé mes livres. Cette journée de rentrée en première s'achevait enfin. La sonnerie retentissa et je me précipitais vers la sortie qu'un flot interminable d'élèves franchissait.
Mon car m'attendait, ses vitres traversées par le grand soleil de septembre. Il était temps de retrouver ma playlist.