Obliviate

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Le charme de l'instant fut vite rompu par des cris et des bousculades dans les couloirs. Charity quitta le serpent des yeux et tourna la tête vers l'enfilade de corridors que l'on apercevait par la porte entrouverte. La rumeur venait de nulle part et partout à la fois. Elle n'en distinguait pas la source. Cela ressemblait à des cris d'enfants, des rires et des discutions. C'était bruyant, ça l'entourait, c'était terrifiant. Ce fut la première fois que Charity se sentit prise au piège.

Tom remarqua le changement d'attitude de la fillette. Son aura chaleureuse avait disparu, tellement bien cachée qu'il doutait de l'avoir vraiment senti contre lui. Cependant, lorsqu'il croisa de nouveau son regard bleu, il discerna encore l'étincelle de chaleur dans son cœur et une forte envie de protéger sa nouvelle amie prit possession de lui. Il voyait la peur dans ses yeux et c'était la première fois qu'il ne voulait pas la voir.

Alors il se redressa rapidement et ferma la porte avec délicatesse. Il ne savait pas si ce serait efficace, ni si ça servirait à quoique ce soit, mais c'était la seule idée qu'il avait eu. Cela avait au moins le mérite d'étouffer les bruits. Anxieux, il revint s'asseoir à côté de Charity et trouva le courage de poser délicatement sa paume sur le genou de la fillette.

Charity était touchée. Cela se voyait dans son attitude que Tom n'était pas habitué à ce genre d'attention et encore moins aux contacts physiques délicats. Pourtant il faisait l'effort, pour elle. Et c'était peut être bien le premier effort, pensa-t-elle, pour lui comme pour elle. Elle voyait même son aura se colorait légèrement et essayait de la réconforter avec tendresse. La seule réaction qu'elle put avoir fut de sourire. Un sourire doux et aussi tendre que la main posée sur son genou. Un sourire franc, les yeux dans ceux de Tom. Ainsi prostrés, ils attendirent patiemment que les bruits aient cessés de retentir.

Lorsque le silence fut de retour, Tom se dégagea rapidement et s'éloigna un peu de la fillette. Elle faisait opérer chez lui trop de changements et il se sentait devenir faible en sa présence. Alors, bien qu'une partie de lui s'insurgea contre cette décision, il se jura de faire plus attention et de garder ses distances avec Charity.

- Viens, il faut aller manger.

Le ton était froid, presque tranchant, cependant Charity ne s'offusqua pas. Elle savait combien s'était dur de faire confiance, sans doute mieux que personne. Sans compter qu'elle sentait encore la même énergie protectrice dans l'aura du jeune garçon. Cela voulait dire beaucoup et c'était déjà une grosse satisfaction aux yeux de la fillette. Cacher ce qu'on ressent ne nous empêche en rien de le ressentir, elle le savait.

Les deux enfants cachèrent la petite vipère dans un panier en osier et sortir de la petite chambre. Charity avait l'impression d'émerger d'un rêve, de revenir d'un autre monde. Ses yeux s'étaient habitués à l'obscurité ambiante de la pièce calfeutrée. Tous ses sens semblaient s'être adaptés à l'univers que camouflait la porte de bois sombre.

Tom se dirigea vers l'escalier qu'elle avait pris quelques heures plus tôt avec Mme La Vielle Directrice et la fillette le suivit de près. Ce lieu ne lui avait pas fait peur lorsqu'elle y était entrée mais depuis elle allait de déceptions en mauvaises surprises. Il était donc hors de question qu'elle lâche ce garçon qui lui semblait si semblable à elle-même et si sur de lui dans cet environnement nouveau.

Ils arrivèrent dans une longue salle bruyante et Charity se rapprocha de Tom. Celui-ci ne s'en rendit même pas compte, il était concentré, il se préparait à l'épreuve qui allait arriver. Trois longues tables de plusieurs dizaines de mètres occupaient le centre de la pièce. Tom serra les dent, les enfants étaient excités. Il détestait quand tout le monde criait et n'attendait qu'une chose : l'arrivée de la directrice. Même si il haïssait cette femme, il était obligé de lui reconnaître un mérite. Lorsqu'elle rentrait dans la pièce, les enfants se taisaient enfin.