Chapitre 11 -Nicholas

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- À l'Arc de Triomphe s'il vous plaît, déclarais-je en rentrant dans le taxi.

- Aucun souci... Répondit le chauffeur en allumant la radio.

Je regardai Aubrey s'engouffrer dans le hall de son immeuble. J'attachai ma ceinture et je me laissai choir sur la banquette arrière. Une sensation chaude et agréable se dégageait des sièges. Le cuir me faisait glisser quand le chauffeur déviait sur la gauche ou la droite, ce qui me berçais légèrement.

Je posai ma tête contre le repose-tête et j'observai le paysage défilé devant moi. Sans réel interêt, je plissai les yeux et je repensai à cette soirée en dehors du temps. Je ne pouvais retenir un sourire malicieux étirer mes lèvres. Cela faisait un long moment que je n'avais pas souri autant en l'espace d'une journée.

Dans ma famille, le rire fut bannie il y'a plus d'un siècle. Qui osait rire était affreusement injurié. C'est comme cela qu'un cousin germain de père a était exclus de notre communauté, il y'a plus de trois ans.

Aux repas de famille nous restions bouches closes, le regard plongé dans nos assiettes à écouter le bruit de nos couverts sur la porcelaine. La joie avait déserté les lieux, laissant à la place la froideur et la tristesse. Je me demandais souvent si les autres familles d'Hessarte étaient comme la nôtre, si elles aussi bannissaient la gaieté de leurs existences de façon si radicale.

A plusieurs reprise, j'essayai de participer aux quêtes pour rencontrer d'autres Hessartes mais sans succès. Seul Achille avait cette opportunité. Les seuls moments de bonheur manoir était ceux du bal de Noël, mais je n'avais jamais l'autorisation d'y participer. J'observais tout cela de la fenêtre de ma chambre. Si les gens savaient ce qu'il se tramait la dessous, plus personne n'oserait y mettre les pieds.

Chaque année, j'éprouvais du dégoût envers moi-même et envers ma famille. Chaque année je voyais ces gens passer dans le manoir, le sourire aux lèvres sans savoir qu'ils rentraient dans la gueule du loup et chaque année, je priais pour qu'aucune de ces innocente personne ne soit porteur de la sensibilité extrême...

Un bruit de tôle froissée interrompit le fil de ma pensée. Je me redressai et je tournai la tête. Un homme vêtu d'un tutu rose bonbon tapait sur le capot avant de la voiture. Il était ivre, visiblement.

- C'est pas vrai ! A clamé le chauffeur de taxi en klaxonnant pour tenter de le faire fuir. Il va me bousiller toute ma voiture s'il continue !

Il enleva sa ceinture et descendit du véhicule.

L'homme à tutu se jeta littéralement sur lui, faisant basculer leurs deux corps sur une barrière en acier.

- Mais lâche-moi ! Criait le chauffeur en tentant de se défaire des bras de l'homme à tutu.

D'un mouvement de force, le chauffeur le repoussa en lui infligeant un coup sur la joue, le marquant ainsi d'une légère coupure. L'homme à tutu se défendit aussitôt. D'un pas incertain, il lui fonça dessus comme un éléphant en rute.

Sans réfléchir, j'otai ma ceinture et je descendis. Je n'allais pas rester devant sans rien faire et attendre que l'un des deux déclare K.O . Le chauffeur jeta sa veste sur le trottoir taché d'essences et leva les poings en l'air. La rage pouvait se lire sur leurs visages. Je me mis devant le chauffeur -le visage rouge de colère- et j'essayai de l'empêcher de continuer.

- Arrêtez ! Vous ne voyez pas qu'il est complètement bourré ! Il ne sait pas ce qu'il fait ! Lui dis-je en plaquant mes mains sur ses épaules.

- Cela m'est bien égal ! Il ne sait pas à qu'il se frotte ! Poussez-vous !

 Au-delà De Nos Rêves Où les histoires vivent. Découvrez maintenant